Je m'attarde - Mot-clé - Adultère le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLa Jeune fille et les paysans (Chlopi), de Dorota Kobiela et Hugh Welchman (2023)urn:md5:0f0db5d4035845ce95f38951bacf42162024-03-25T09:38:00+01:002024-03-25T10:36:28+01:00RenaudCinémaAdultèreEmancipationFilm d animationJalousiePaysanPeinturePologneRotoscopieRuralité <div id="centrage">
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg" title="jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.jeune_fille_et_les_paysans_A_m.jpg" alt="jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg, mars 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg" title="jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.jeune_fille_et_les_paysans_B_m.jpg" alt="jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg, mars 2024" /></a>
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<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Destins animés</strong></ins></span></div>
<p>La formule présente dans <ins>La Passion Van Gogh</ins> est répétée en partie par <strong>Dorota Kobiela </strong>et <strong>Hugh Welchman </strong>: c'est par rotoscopie que les images de <ins>La Jeune fille et les paysans</ins> sont générées et animées, dans un second temps, après un premier tournage en décors et en acteurs réels. Le résultat visuel est époustouflant, on passe un bon moment au début à simplement contempler les tableaux s'animer sous nos yeux tout en songeant à la technique utilisée pour atteindre un tel résultat. On atteint presque la limite du procédé ici — avec lequel personne ne peut vraiment être parfaitement familier il me semble, les longs-métrages réalisés de la sorte se comptant probablement sur les doigts d'une main : en plus des deux déjà cités, seuls deux autres me viennent à l'esprit, <ins>A Scanner Darkly</ins> de <strong>Richard Linklater</strong> et <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Teheran-Tabou-d-Ali-Soozandeh-2017"><ins>Téhéran Tabou</ins></a> de <strong>Ali Soozandeh</strong> — en ce qui me concerne, car à de très nombreuses reprises, sur la durée, c'est presque comme si on voyait les images réelles derrière les peintures, avec un filtre très réaliste appliqué par-dessus. L'effet de surprise produit n'est pas du tout désagréable, bien au contraire, mais à la longue on en vient à se questionner sur l'intérêt profond d'une telle méthode et, de la sorte, on quitte de temps en temps le récit.</p>
<p>Là où <ins>La Passion Van Gogh</ins> avait un petit côté enquête documentaire, ce second film est quant à lui adapté d'un roman polonais (<strong>Władysław Reymont </strong>reçut le Prix Nobel de littérature au début du XIXe siècle à cet effet) qui plonge dans un village de campagne en pleine ébullition autour d'une femme prénommée Jagna. Elle est amoureuse d'un jeune paysan, lui-même déjà marié, mais c'est au père de ce dernier, riche propriétaire terrien, qu'elle sera contrainte de se marier, mettant en place les conditions pour un double adultère. C'était un roman assez avant-gardiste en matière d'émancipation féminine et de rejet des traditions locales, et il faut reconnaître que l'esthétique du film épouse admirablement bien l'évolution des émotions, au gré des saisons qui rythment l'effusion des sentiments.</p>
<p>Quelques scènes sont incroyablement hypnotisantes, comme par exemple celle des danses traditionnelles le jour du mariage qui interpelle vigoureusement autant par la menace qui enfle soudainement autour de la jeune femme que par la dimension esthétique captivante qui illustre le travail des quelque 150 artistes (chaque image est peinte à la main, il faut tout de même un peu de temps pour l'intégrer) qui ont travaillé sur le projet. Ces tableaux accompagnent agréablement la tragédie vaguement shakespearienne qui se noue dans un coin de campagne paysanne polonaise, à mesure que la jalousie et la haine des uns et des autres se développent, comme inéluctablement, avec pour point de chute une séquence finale particulièrement difficile. Très belle ultime image, à ce titre, d'un corps nu sali par le regard des malveillants et lavé par la pluie au milieu des champs.</p>
<p><em><ins>N.B.</ins> : On peut penser aux travaux de <strong>Rino Stefano Tagliafierro</strong> en matière de court-métrage animé, avec <ins>Beauty</ins> et <ins>Peep Show</ins>, dans lesquels il introduisait de légers mouvements au sein de grands tableaux.</em></p>
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<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/img1.jpg" title="img1.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, mars 2024" /></a>
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Jeune-fille-et-les-paysans-de-Dorota-Kobiela-et-Hugh-Welchman-2023#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1367Désir meurtrier, de Shōhei Imamura (1964)urn:md5:7d12ce2b23271acbfc0d6e64cb18ba212019-11-29T12:52:00+01:002019-11-30T17:38:21+01:00RenaudCinémaAdultèreFamilleFemmeJaponMeurtreShōhei ImamuraTrainViolence <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/desir_meurtrier/.desir_meurtrier_m.jpg" alt="desir_meurtrier.jpg, nov. 2019" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Émancipation par l'humiliation</strong></ins></span>
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<p>Première incursion chez <strong>Imamura</strong>, et on peut dire que <ins>Désir meurtrier</ins> laissera des marques indélébiles. Pendant un moment, on peut faire le rapprochement entre le personnage de Sadako et celui interprété par <strong>Ayako Wakao </strong>dans <ins>La Femme de Seisaku</ins> (sorti un an plus tard en 1965), mais leurs trajectoires seront en réalité bien différentes : loin des sentiers du mélodrame, c'est celui d'un drame beaucoup plus insidieux et pervers qui sera emprunté ici. Ou comment une femme humiliée quotidiennement par sa situation familiale (un mari particulièrement méprisant) prendra son envol suite à une énième humiliation, extérieure, l'humiliation de trop, le viol. J'avoue tout net ne pas être à l'aise avec le discours sous-jacent, très dérangeant, mais le talent d'<strong>Imamura </strong>sur le plan formel a rendu ces 2h30 particulièrement intrigantes.</p>
<p>J'évacuerais bien volontiers le passage au cours duquel Sadako, victime d'une sorte de syndrome de Stockholm dégénéré, sombre dans une passion déchaînée avec la personne qui l'a violée, grosso modo après qu'il lui ait exposé sa situation personnelle bien gratinée (pauvreté, maladie, etc.). Ce mécanisme de retournement n'est clairement pas le point fort du film, en l'absence de progression un tant soit peu intelligible. Pourtant, le film conserve une originalité de ton incroyable, en alternant entre accès dramatiques et irruptions d'un burlesque insoupçonné, à l'instar de cette tentative de suicide ratée : on ne sait pas trop s'il faut en rire ou en pleurer. Dans le registre du mélodrame, <ins>Désir meurtrier</ins> (comme beaucoup d'autres dans le cinéma national) ne fait pas vraiment dans la demi-mesure : Sadako est tout de même une servante, femme illégitime d'un homme méprisable, victime d'un viol qui l'entraînera dans un malheur encore plus grand. Autant dire que c'est un exploit de parvenir à faire éclore une passion aussi ardente dans un contexte aussi glacial, renforcé par la grisaille et la neige des environs.</p>
<p>Graphiquement, les partis pris baroques et provocateurs du film ne peuvent laisser indifférent. La caméra prend des positions tantôt statiques (enserrant les personnages dans des cadres étroits) tantôt dynamiques (par exemple dans un lent mouvement de rotation en plongée depuis le plafond) littéralement exceptionnelles, et la mise en scène regorge de motifs récurrents qui façonne un drôle d'imaginaire, à l'image des fameux trains qui passent inexorablement dans l'arrière-plan, renvoyant la protagoniste à son immobilité. La recherche plastique a quelque chose de fascinant, dans ce noir et blanc austère et sombre, cultivant une forme d'insalubrité. Les délires avec les animaux sont en outre troublants : il y a tout d'abord les souris en cage, métaphore assez directe de la condition de Sadako avec les tours aussi inutiles qu'infinis dans la roue, mais aussi le cannibalisme de l'une d'entre elles, puis les vers à soie, au cœur de séquences étrangement érotiques. C'est difficile à l'admettre mais Sadako parviendra à s'extraire de ce contexte particulièrement oppressant à coups de traumatismes répétés, et gagnera son émancipation à la sueur de son front.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/desir_meurtrier/.souris_m.jpg" alt="souris.jpeg, nov. 2019" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/desir_meurtrier/.dessus_m.jpg" alt="dessus.jpg, nov. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/desir_meurtrier/.biblio_m.jpg" alt="biblio.jpg, nov. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/desir_meurtrier/.tunnel_m.jpg" alt="tunnel.jpg, nov. 2019" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Desir-meurtrier-de-Shohei-Imamura-1964#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/724Madame de..., de Max Ophüls (1953)urn:md5:23175e85f0e7da78116e5cbeedd6eeba2019-03-14T14:02:00+01:002019-04-12T11:31:38+02:00RenaudCinémaAdultèreAristocratieDanielle DarrieuxMax OphülsMensonge <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/madame_de/.madame_de_m.jpg" alt="madame_de.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="madame_de.jpg, mar. 2019" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>La ronde des boucles et la valse des mensonges</strong></ins></span>
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<p>Il est très tentant d'établir un parallèle entre les structures élégantes de <ins>Madame de...</ins> et de <ins>La Ronde</ins>, les deux films procédant de manière similaire pour charpenter le récit, en se basant sur une série de boucles et de motifs répétés. Ils semblent raconter presque toujours les mêmes choses, qui plus est de la même façon. Si un tel dispositif paraît dans un premier temps plutôt artificiel, bien qu'il soit relativement irréprochable d'un point de vue purement technique, ces aléas et ces allers-retours centrés sur les fameuses boucles d'oreilles de la comtesse "Louise de…" prendront sens très progressivement.</p>
<p>On peut constater à quel point le mensonge structure la narration et finit par former un écheveau complexe de non-dits et de petits arrangements de la part de presque tous les personnages. On feint de perdre les boucles, on feint de les retrouver, on feint de trouver ça normal, etc. Le parcours (entre autres géographique) des boucles prendra de plus en plus de sens, engageant le film sur une pente dramatique alors que les débuts semblaient s'aventurer à la lisière de la comédie. L'ensemble des personnages gagne peu à peu en lucidité, ce qui conduira assez naturellement au duel final, étant donnée la nature des antagonismes et des inimitiés. Mais dans les premiers temps, on ne saisit pas l'étendue des dégâts, on ne mesure pas l'ampleur des conséquences, on ne sait pas vraiment si le mari s'amuse innocemment du mensonge de sa femme où s'il rumine furieusement en silence avec de la suite dans les idées.</p>
<p>Ces mouvements de va-et-vient des boucles et des personnages se chargent d'une signification de plus en plus intense et délicate à démêler, à mesure que les uns s'enfoncent dans une spirale de mensonges et les autres dans la passion, le vide ou la tromperie. Des mouvements captés toujours de manière élégante et millimétrée par <strong>Ophüls</strong>, même si l'ensemble peut apparaître un peu moins audacieux que des films comme <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Plaisir-de-Max-Ophuls-1952"><ins>Le Plaisir</ins></a>. Le milieu mondain est sondé de l'intérieur jusqu'à son explosion, dans un cadre magnifique, même si l'on ne saura jamais vraiment si les deux amants sont véritablement morts : le hors-champ, par exemple, laisse planer un certain doute (de la même façon que dans <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Liebelei-de-Max-Ophuls-1933"><ins>Liebelei</ins></a>, qu'il tourna 20 ans plus tôt). Je reste un peu en retrait de ce témoignage, entièrement dédié à l'observation d'un univers "superficiel uniquement en superficie", peut-être un peu lassé par les innombrables pertes de connaissance de <strong>Danielle Darrieux</strong>.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/madame_de/.miroir_m.jpg" alt="miroir.jpg" title="miroir.jpg, mar. 2019" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/madame_de/.fete_m.jpg" alt="fete.jpg" title="fete.jpg, mar. 2019" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Madame-de-de-Max-Ophuls-1953#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/631