Je m'attarde - Mot-clé - Burlesque le temps d'un souffle<br />2024-03-29T08:45:23+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearTrafic, de Jacques Tati (1971)urn:md5:01b083d0f1152d1c50b60573924c80432024-01-06T11:17:00+01:002024-01-06T11:18:54+01:00RenaudCinémaAmsterdamBurlesqueComédieDessinFranceJacques TatiLoufoqueParisPays-BasPoésieUrbanismeVilleVoiture <a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/trafic.jpg" title="trafic.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.trafic_m.jpg" alt="trafic.jpg, janv. 2024" class="media-center" /></a>
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Où allez-vous, monsieur Hulot ?"</strong></ins></span>
</div>
<p>Le fond de l'air est décidément bien tristounet dans ce dernier épisode des aventures de Monsieur Hulot, vieillissant, souvent laissé sur le bas-côté et en marge de l'activité, qui fait suite quatre années plus tard à l'échec commercial (et pourtant magnifique) de <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Playtime-de-Jacques-Tati-1967">Playtime</a></ins> ayant entraîné la faillite de la société de production de <strong>Jacques Tati</strong>. Il est malgré tout parvenu à se remettre en selle pour <ins>Trafic</ins>, et à dissimuler des contraintes matérielles inévitables derrière un certain minimalisme de mise en scène qui s'accorde assez bien, il faut le reconnaître, avec son style lunaire et son appétence pour le détail. Aucun problème pour passer près de deux minutes à observer des conducteurs se tripatouiller le nez en gros plan ou des hommes d'affaires évoluer de manière très saccadée à cause de fils délimitant les stands dans un immense hall d'exposition en plan large...</p>
<p>S'il y a bien un changement majeur par rapport aux précédents films de <strong>Tati</strong>, c'est la présence d'un objectif précis structurant la narration et l'irruption d'un personnage féminin d'importance : à la différence de <ins>Playtime</ins> ou de <ins>Mon oncle</ins> qui campait une position très observationnelle, on peut résumer l'histoire de <ins>Trafic</ins> à celle d'un dessinateur pour une petite entreprise automobile parisienne chargé de présenter sa dernière invention (une Renault 4L aménagée en voiture de camping révolutionnaire, l'avant-garde des vans aménagés en quelque sorte) au salon d'Amsterdam en compagnie d'une attachée de presse dont il ne restera pas insensible. C'est clair et intelligible, même si cela n'empêchera évidemment pas une cascade d'imprévus et de gags reflétant sans doute la définition même de la méthode <strong>Tati</strong>.</p>
<p>On retrouve le Monsieur Hulot observateur à la fois candide et circonspect de la société moderne, de ses évolutions, de son progrès. Les routes parcourues par le personnage, sillonnées par d'innombrables véhicules (dont on aura observé la construction au gré d'une introduction quasi-documentaire) alors que lui-même restera la plupart du temps immobilisé sur le bord du chemin, forment une métaphore à la fois simple, distante, et loufoque du regard qu'il semble poser sur son époque. Même si on n'échappe pas à une certaine répétitivité dans le geste, comme si <strong>Tati </strong>faisait du sur place en roue libre, il reste une ambiance (très particulière et immédiatement reconnaissable, du burlesque de bande-dessinée des années 1970) et un foisonnement de détails. On retrouve aussi cet amour pour la confusion sonore, avec des dialogues souvent inintelligibles, noyés dans une cacophonie désagréable tant qu'on cherche à identifier la partie utile du signal, pour finalement dériver vers une sorte de film muet dégénéré. Ça parle, ça parle, mais personne n'écoute vraiment : tout le monde s'en fout.</p>
<p>Il y a dans <ins>Trafic</ins> comme dans tous les <strong>Tati</strong> une dimension expérimentale qui peut rebuter, surtout lorsqu'elle est alliée à un humour aussi burlesque et suranné. On voit bien le cinéaste expérimenter, ici avec les décors et les couleurs, là avec les effets sonores et les propos incompréhensibles. Ces jeux, toujours en mode mineur, provoquent un effet de contrepoids avec le constat désabusé de son personnage devant une forme de déshumanisation de la société par la consommation, impassible devant la fourmilière hystérique. Ils évitent au film de verser dans la critique passéiste et amère, et forment un petit espace de calme et de confort au milieu du chaos.</p>
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<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/img1.jpg" title="img1.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, janv. 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/img2.jpg" title="img2.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, janv. 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/img3.jpg" title="img3.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, janv. 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/img4.jpg" title="img4.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, janv. 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/img5.jpg" title="img5.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/trafic/.img5_m.jpg" alt="img5.jpg, janv. 2024" /></a>
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Trafic-de-Jacques-Tati-1971#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1315Infidèlement vôtre, de Preston Sturges (1948)urn:md5:0f8f637372b19b423daa2837e9be15762023-05-11T10:11:00+02:002023-05-11T10:11:00+02:00RenaudCinémaBurlesqueChef d orchestreComédieFantasmeHonneurJalousieMusicienMusique classiquePreston SturgesRex Harrison <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.infidelement_votre_m.jpg" alt="infidelement_votre.jpg, mars 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Well, it's better to do it in public than not to do it at all!"</strong></ins></span></div>
<p>Comédie sophistiquée américaine (utilisant d'ailleurs le potentiel comique du contraste avec les airs très british de <strong>Rex Harrison</strong>) assez particulière appartenant au sous-registre des farces qui explorent les aspects fantasmatiques des turpitudes humaines — en l'occurrence, la jalousie d'un chef d'orchestre qui se fait des films au sujet de son épouse qui la tromperait avec son secrétaire. Les territoires sondés sont donc très éloignés de ceux que le très bon <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Tar-de-Todd-Field-2022">Tár</a></ins> sillonnait récemment. <ins>Unfaithfully Yours</ins> se découpe de son côté assez ouvertement en trois parties : une première un peu longuette qui pose le cadre et explique en quoi les germes de la jalousie ont conduit Sir Alfred a être persuadé de l'infidélité de sa jeune femme, une seconde plutôt détonnante figurant les fantasmes tour à tour morbides et magnanimes en plein concert, et une dernière complètement axée sur le burlesque lorsqu'il s'agit de mettre en œuvre ces plans qui paraissaient si parfaits dans les pensées, mais dans une exécution au comble de la maladresse.</p>
<p>Les parties introductive et conclusive sont malheureusement un peu poussives et pénibles par leur durée exagérée, semant la petite graine d'ennui qui peut éventuellement faire rater le coche de l'embrayage sur la folie de la partie centrale. Même si la mise en scène déploie des outils alimentant un raffinement assez typique de ce cinéma américain des années 1950 et 1960, c'est bien une fois la folie établie dans le cerveau malade de <strong>Harrison </strong>que les choses dégénèrent avec malice.</p>
<p>En trois grands temps au sein d'un concert mené par le chef d'orchestre, Rossini, Wagner et Tchaïkovski se font successivement les supports de trois types de conclusion pour laver un honneur perdu, croit-il. D'abord, le plan le plus machiavélique, avec l'acte jouissif et libératoire de l'assassinat de sa femme en faisant accuser son secrétaire ; puis le sens du sacrifice à travers le pardon et la signature d'un gros chèque pour la laisser partir ; enfin la tragédie d'une résolution par suicide à la roulette russe (à ne pas confondre avec la russian bank, autrement appelée crapetten, une jeu de mots parmi les centaines que compte le film, plus ou moins lourdingues :"For me, there's nobody handle Handel like you handle Handel! And your Delius – delirious!"). Portrait d'une jalousie ouvertement pathologique donc, qui se fait franchement crue et frontale dans l'exécution du premier fantasme — quand le mari lacère sa femme à coups de rasoir, on se demande si on est bien dans un rêve quand même ! Malgré tout, le concept s'épuise très vite et le burlesque de la dernière partie vire à l'enchaînement stérile de petits gags inoffensifs.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img1_m.png" alt="img1.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img2_m.png" alt="img2.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img3_m.png" alt="img3.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img4_m.png" alt="img4.png, mars 2023" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Infidelement-votre-de-Preston-Sturges-1948#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1150Broadway Therapy, de Peter Bogdanovich (2014)urn:md5:4e6dc9fc41557f7a8ae47f3d3a97f7b72022-02-18T15:51:00+01:002022-02-18T15:51:00+01:00RenaudCinémaBurlesqueComédieErnst LubitschImogen PootsJennifer AnistonLoufoqueOwen WilsonPeter BogdanovichRhys IfanThéâtreWoody Allen <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/broadway_therapy/.broadway_therapy_m.jpg" alt="broadway_therapy.jpg, janv. 2022" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Squirrels to the nuts"<br /></strong></ins></span>
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<p>La mort récente de <strong>Peter Bogdanovich</strong> aura eu un effet catalyseur et tristement bénéfique sur mon visionnage de sa filmographie, étant donné qu'un titre comme <ins>Broadway Therapy</ins> (She's Funny That Way) trotte dans mon esprit procrastinateur depuis 7 ou 8 ans. Je ne m'attendais à rien, et pourtant je ne m'attendais pas du tout à ça : une comédie sophistiquée farcie de références (on reconnaît bien le <strong>Bogdanovich </strong>cinéphile) chassant sur les terres de <strong>Woody Allen </strong>et dont un ressort comique essentiel du vaudeville centré sur <strong>Owen Wilson </strong>trouve son origine dans un film de <strong>Lubitsch</strong>, <ins>Cluny Brown</ins> — la réplique de Charles Boyer : "<em>In Hyde Park, for instance, some people like to feed nuts to the squirrels. But if it makes you happy to feed squirrels to the nuts, who am I to say, "nuts to the squirrels?</em>".</p>
<p>Si les références sont nombreuses, elles ne sont pas pour autant assommantes, et <strong>Bogdanovich </strong>a eu la délicatesse de les insérer en préservant la fluidité de l'ensemble. Les mises en abyme sont nombreuses, dès la confidence de <strong>Imogen Poots </strong>à une journaliste qui sert de base au récit, les croisements d'arcs narratifs sont omniprésents et vont crescendo avec en toile de fond la préparation d'une pièce de théâtre qui servira de défouloir hystérique : on pourrait penser, à la lumière de ce foutoir, que le film ne peut être qu'indigeste. Et de fait, elle le sera pour certains. Pourtant, <ins>She's Funny That Way</ins> est une comédie loufoque dont l'articulation complexe des différentes strates m'est apparue comme vraiment bien maîtrisée, avec un effet cumulatif au potentiel comique très appréciable.</p>
<p>C'est un style tout de même très singulier. Il faut apprécier <strong>Jennifer Aniston </strong>en psychanalyste hystérique, <strong>Rhys Ifan </strong>en comédien narcissique lubrique, un large panel de seconds rôles farfelus, et surtout <strong>Owen Wilson </strong>au centre des échanges en chef d'orchestre du loufoque. <strong>Bogdanovich </strong>investit une screwball revisitée, alimentée par un tissu de mensonges et d'imbroglios faisant intervenir moult escort girls, dans une cacophonie grandissante assez jubilatoire. Le chassé-croisé burlesque est d'une densité telle qu'il pourra se révéler excessif aux yeux de beaucoup, mais à titre personnel c'est le genre de comédies sophistiquées contemporaines (influencées par <strong>Lubitsch </strong>qui plus est) que je n'attendais plus.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/broadway_therapy/.ecureuil_m.jpg" alt="ecureuil.jpg, janv. 2022" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Broadway-Therapy-de-Peter-Bogdanovich-2014#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1030Chronique du soleil à la fin de l'ère Edo, de Yûzô Kawashima (1957)urn:md5:79972b19e4702928bcc65405fab2e7a02021-08-20T12:38:00+02:002021-08-20T11:39:18+02:00RenaudCinémaBurlesqueComédieFilm choralFrankie SakaiGeishaJaponProstitutionSamouraïShōhei Imamura <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo/.chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo_m.jpg" alt="chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo.jpg, juil. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Zizanie en maison close<br /></strong></ins></span>
</div>
<p>Il y autant de monde devant que derrière la caméra dans ce film choral faisant partie des rares comédies japonaises de la période classique — instinctivement on peut penser à <ins>Sazen Tange, le pot d'un million de ryos</ins> (<strong>Sadao Yamanaka</strong>, 1935) — dans laquelle on retrouve <strong>Shōhei Imamura</strong> à la collaboration pour l'écriture du scénario. Derrière ce long titre <ins>Chronique du soleil à la fin de l'ère Edo</ins> se cache une chronique, certes, mais focalisée sur la vie à l'intérieur d'une maison close qu'on ne quittera presque jamais. Les débuts sont assez difficiles à appréhender car la multitude de personnages qui se croisent et l'imprécision volontaire des enjeux laissent pendant un long moment le regard hésitant, sans avoir la possibilité de le poser sur quelque chose de précis, d'immobile, ou d'aisé à cerner.</p>
<p>Petit à petit on se familiarise avec le rythme soutenu, avec le ballet des geishas qui passent d'un client à l'autre, aidé en cela par l'incroyable <strong>Frankie Sakai </strong>dans le rôle d'un acteur complètement fauché, contraint de rester dans les lieux pour y travailler afin de payer une addition très salée qu'il n'a pas pu régler. <strong>Kawashima</strong> semble prendre avec cette comédie burlesque, à la fois légère et complexe, un sentier radicalement opposé aux canons des classiques de l'époque, sérieux, à tendance sociale, investiguant ici une certaine frivolité doublée d'une comédie de mœurs.</p>
<p>Quasiment tout le film, et pour ainsi dire tous les segments qui le composent (et il y en a un sacré paquet), sont reliés par ce personnage d'hurluberlu au visage si singulier, le tricard qui devient grâce à sa vivacité d'esprit et son sens de la débrouille un élément incontournable. Petit à petit, presque malgré lui, au fur et à mesure des pécules qu'il obtient pour les services qu'il rend à tout le monde, personnel comme clients, il sait se rendre indispensable. Le public est hautement bigarré, des prostituées en conflit permanent jusqu'aux samouraïs nationalistes fomentant un attentat terroriste en passant par les clients réguliers sous le charme qui croient au mensonge d'une promesse de mariage. La quantité de personnages est aussi importante que la diversité des statuts sociaux et des problématiques respectives, et l'ensemble se trouve agréablement mélangé par l'entremise de la gouaille de ce sacré Saheiji.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo/.groupe_m.jpg" alt="groupe.jpg, juil. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo/.bain_m.jpg" alt="bain.jpg, juil. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chronique_du_soleil_a_la_fin_de l-ere_edo/.geisha_m.jpg" alt="geisha.jpg, juil. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Chronique-du-soleil-%C3%A0-la-fin-de-l-ere-Edo-de-Yuzo-Kawashima-1957#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/991De l'or en barres, de Charles Crichton (1951)urn:md5:37b26e020825047664422a77a54c66402021-04-23T09:50:00+02:002021-05-03T13:29:32+02:00RenaudCinémaAlec GuinnessAudrey HepburnBrésilBurlesqueComédieParisRoyaume-Uni <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.or_en_barre_m.jpg" alt="or_en_barre.jpg, avr. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"I propagate British cultural depravity."<br /></strong></ins></span></div>
<p><ins>The Lavender Hill Mob</ins> est un joli représentant de l'heure de gloire de la comédie britannique des années 40 et 50, dont les Ealing Studios constituent un peu la figure de proue avec des films comme <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Noblesse-oblige-de-Robert-Hamer-1949"><ins>Noblesse oblige</ins></a>, <ins>Tueurs de dames</ins>, <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Passeport-pour-Pimlico-de-Henry-Cornelius-1949"><ins>Passeport pour Pimlico</ins></a>, ou encore <ins>L'Homme au complet blanc</ins>. Un film entièrement raconté en flashback depuis Rio de Janeiro où le protagoniste incarné par <strong>Alec Guinness </strong>coule des jours heureux après avoir fait fortune d'une manière bien singulière — l'objet du flashback. Dans ces premières minutes, il ne faut pas trop cligner des yeux pour apercevoir <strong>Audrey Hepburn </strong>dans l'un de ses premiers rôles, avec 5 secondes de présence et une petite phrase seulement.</p>
<p>L'histoire d'un convoyeur de fonds qui rêve de s'emparer des lingots d'or qu'il surveille régulièrement, et dont la rencontre avec un artisan fabricant de tours Eiffel en plomb, alliée à une promotion inattendue, précipitera les plans. L'idée est simple en théorie : l'or volé substituera le plomb et sera utilisé pour fabriquer des babioles dorées, envoyées en France pour pouvoir écouler la marchandise sereinement. Une grande partie de ce film, par l'auteur de <ins>Un poisson nommé Wanda</ins> 37 ans plus tard, est dédiée à l'élaboration et la mise en œuvre du plan, avec tout le charme distingué de <strong>Sir Guinness </strong>au service de la sophistication comique, pour ensuite embrayer sur le versant beaucoup plus expansif dans le loufoque, lorsque des touristes achètent sans le savoir les précieux souvenirs, enclenchant à ce titre une course-poursuite en deux temps : d'abord, les deux larrons à la poursuite des objets, puis les mêmes en fuite traqués par la police.</p>
<p>Le duo <strong>Stanley Holloway </strong>/ <strong>Alec Guinness </strong>fonctionne vraiment bien à une époque où le buddy movie n'existait pas, dans un sens du burlesque typique, attendu, mais toujours aussi agréable. Le rythme souffre de quelques passages à vide, en abusant des poursuites, mais les nombreux "rôles" de <strong>Guinness</strong>, qui oscille entre différentes identités allant du bourgeois au petit fonctionnaire en passant par le malfrat fin calculateur, rehausse le tout. La descente délirante de la (vraie) Tour Eiffel, la fuite des deux compères (avec embrouille à l'aide de la radio), et quelques autres passages resteront au-dessus du lot, même si des films comme <ins>Whisky à gogo</ins> me paraissent supérieurs. Les parfums de whisky écossais, sans doute.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.rencontre_m.jpg" alt="rencontre.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.tours_m.jpg" alt="tours.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/or_en_barre/.corde_m.jpg" alt="corde.jpg, avr. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/De-l-or-en-barre-de-Charles-Crichton-1951#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/944Le Bonheur, de Alexandre Medvedkine (1935)urn:md5:85d11b84cc334a416122282e83dc08c12021-04-12T11:28:00+02:002021-04-12T11:28:00+02:00RenaudCinémaBurlesqueCinéma muetComédieNaturePaysanRussieSatireTerre <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.bonheur_m.jpg" alt="bonheur.jpg, mar. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Keaton au pays des Soviets<br /></strong></ins></span></div>
<p>Le cinéma soviétique dispose de nombreuses pépites à la gloire de la paysannerie, à travers l'éloge du kolkhoze qui s'oppose vaillamment aux riches koulaks, où l'on parle de paysans, de collectivité, de nature, de la terre, de cultures vivrières, avec autant de symboles et de motifs graphiques éclatants — des enfants qui croquent des pommes à pleines dents après la mort d'un vieillard à l'ombre d'un verger, des champs de blé ou de tournesol qui ondulent sous le vent, des écrémeuses en folie, des tracteurs embarqués dans des labours circulaires... La fin des années 20 russes compte de très beaux poèmes, qui vont bien au-delà de la seule dimension propagandiste, parmi lesquels on peut citer <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Ligne-generale-de-Serguei-Eisenstein-et-Grigori-Alexandrov-1929"><ins>La Ligne générale</ins></a> de <strong>Eisenstein</strong>, <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Terre-de-Alexandre-Dovjenko-1930"><ins>La Terre</ins></a> de <strong>Dovjenko</strong>, ou encore quelques séquences de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Arsenal-d-Alexandre-Dovjenko-1929"><ins>Arsenal</ins></a> du même réalisateur.</p>
<p><ins>Le Bonheur</ins> de <strong>Medvedkine</strong>, centré sur la même thématique champêtre, se distingue cependant très clairement de ce mouvement cinématographique à plusieurs titres. C'est un film muet relativement tardif, d'une part, sorti en 1935. C'est surtout un film largement atypique qui cultive son empreinte graphique caractéristique (on frôle le surréalisme onirique par moments) dans un univers étonnamment burlesque, un peu comme si <strong>Keaton </strong>s'était retrouvé au pays des Soviets. Une tonalité à tendance satirique qui cependant ne conduit pas aux mêmes excès que le burlesque révolutionnaire d'un <ins>Les Aventures extraordinaires de Mr West au pays des Bolcheviks</ins>, réalisé dix ans auparavant.</p>
<p>L'histoire se situe peu avant la Révolution d'Octobre et suit les pérégrinations hautement allégoriques de Khmyr, un paysan assez naïf, parti à la recherche du bonheur après avoir été chassé de chez lui en des temps difficiles. Son parcours ne sera qu'une vive succession de hauts et de bas : il trouve un sac contenant de l'argent lui permettant d'acheter un cheval et de générer d'abondantes récoltes avant de se retrouver dépossédé par un seigneur local très envieux, il veut en finir en se construisant son propre cercueil à partir du bois de sa maison mais la police ne tolère pas un tel niveau d'indépendance et l'en empêche en le punissant à coups de fouet, etc. Et le film d'enchaîner les séquences d'humour slapstick avec des volutes de fumée pour figurer une mort, avec un cheval à pois affamé sur un toit pour en manger la paille, des terrains à labourer inclinés à 45°, des tentatives de suicide à l'aide des ailes d'un moulin à vent, une armée de soldats affublés de masques tous identiques figés dans leur sidération, ainsi qu'un court passage de nudité explicite assez incroyable pour l'époque.</p>
<p>Les motifs issus de la culture populaire russe classique se mélangent à des manifestations d'un humour radicalement baroque pour former un film très étonnant, d'une singularité nette, mais qui subit les foudres de la censure — et ce malgré l'appréciation d'<strong>Eisenstein </strong>à l'époque. <strong>Alexandre Medvedkine </strong>ne finit pas au goulag comme d'autres artistes "déviants", mais il fallut attendre 1971 pour que <strong>Chris Marker </strong>redécouvre les bobines et se lance dans un travail de restauration. C'est pourtant un film très recommandable, doté d'une poésie drôle et attachante, penchant tour à tour du côté de la farce et du pamphlet, dépeignant un paysan soviétique à la fois flemmard et sympathique, très éloigné de tout modèle existant.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.arbre_m.jpg" alt="arbre.jpg, mar. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.fumee_m.jpg" alt="fumee.jpg, mar. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.cercueil_m.jpg" alt="cercueil.jpg, mar. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.labour_m.jpg" alt="labour.jpg, mar. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bonheur/.pente_m.jpg" alt="pente.jpg, mar. 2021" />
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Bonheur-de-Alexandre-Medvedkine-1935#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/932Nickelodeon, de Peter Bogdanovich (1976)urn:md5:053403eec994a73038cfe82efa3665cb2020-10-21T11:59:00+02:002020-10-21T11:59:00+02:00RenaudCinémaBurlesqueBurt ReynoldsComédiePeter BogdanovichRaoul WalshRyan O NealTatum O NealTournage <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/nickelodeon/.nickelodeon_m.jpg" alt="nickelodeon.jpg, oct. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Any jerk can direct."<br /></strong></ins></span></div>
<p><strong>Peter Bogdanovich </strong>est un cinéaste étonnant du Nouvel Hollywood, s'inscrivant dans ce mouvement de manière singulière et bien différente de la norme — presque en opposition. Sa conception de la contestation passe par un grand sens de la perte, par une matérialisation de la fin de l'innocence que l'on retrouvera constamment dans ses films, de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Barbe-a-papa-de-Peter-Bogdanovich-1973"><ins>La Barbe à papa</ins></a> à <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Derniere-Seance-de-Peter-Bogdanovich-1971"><ins>La Dernière Séance</ins></a> en passant par <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Jack-le-Magnifique-de-Peter-Bogdanovich-1979"><ins>Jack le magnifique</ins></a>. Un regard vers le passé empreint d'une mélancolie toujours questionnante, qui se retrouve dans cette évocation de l'ancêtre du cinéma, le Nickelodeon (un type de petite salle de cinéma de quartier à laquelle on accédait en glissant une pièce dans un tourniquet), et des prémices de la production cinématographique dans les années 1910. Une période enfiévrée qui voyait les pionniers du cinéma expérimenter tous azimuts afin de contourner les nombreuses difficultés techniques de cet art balbutiant, à une époque où les studios monopolistiques mettaient des bâtons dans les roues des concurrents en créant brevet sur brevet. Et quand ce n'était pas suffisant, en recourant à l'intimidation et à la violence, voire à la destruction de matériel, comme tente de le faire le personnage de <strong>Burt Reynolds</strong> au début du film — avant d'être recruté par <strong>Ryan O'Neal </strong>sur le tournage. Comme dans <ins>La Barbe à papa</ins>, sa fille <strong>Tatum O'Neal </strong>occupe un rôle d'importance.</p>
<p><ins>Nickelodeon</ins> a en ce sens une légère fonction historique, en recréant de manière bien sûr très artificielle l'émulation et l'effervescence de l'époque, et en égrainant une série d'anecdotes (à l'image de celle concernant la puanteur dans les premières salles de Nickelodeon) semées tout au long du film qui le colorent d'une teinte comique plutôt délicate. La trajectoire du protagoniste Leo Harrigan est en soi une comédie, avocat puis écrivain puis réalisateur presque malgré lui, au même titre que la relation qu'il entretien avec les vedettes (masculine et féminine) de son film. Les jeux de mots sont omniprésents et fonctionnent globalement très bien, à une époque où "picture" (un film) se confond avec "pitcher" (une carafe)... <strong>Bogdanovich </strong>se perd en revanche très régulièrement dans un sens du burlesque un peu abscons, avec des séquences bouffonnes qui parfois durent un peu trop longtemps. Ils ont dû beaucoup s'amuser sur le tournage, à repenser les cascades et à reproduire les conditions de travail : dommage que cela ne transparaisse pas toujours à l'écran, seules quelques loufoqueries fonctionnent bien.</p>
<p>L'époque, le début du XXe siècle, transparaît également à travers de nombreux détails qui charpentent l'atmosphère, des petits bouts d'histoires vraies que <strong>Bogdanovich </strong>a obtenu auprès de <strong>Raoul Walsh</strong> et <strong>Allan Dwan </strong>— le réalisateur de <ins>The Good Bad Man</ins> et <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Metis-de-Allan-Dwan-1916"><ins>The Half-Breed</ins></a>, film mentionné dans le film. <strong>Bogdanovich </strong>semble extrêmement désireux de rendre hommage à une ère révolue du cinéma, un peu comme <ins>The Last Picture Show</ins> pouvait faire penser à <strong>John Ford</strong>, sous certains aspects, ce qui le place dès le principe en opposition avec de nombreux jalons du Nouvel Hollywood. <strong>John Ford </strong>est d'ailleurs présent ici aussi, à travers l'anecdote du réalisateur à qui on reproche d'être en retard de 5 pages sur le script, et qui s'exclamera, après en avoir arraché 5 pages, "<em>Now we're on schedule again</em>". De même, lorsque les protagonistes sortent du cinéma dépités, pensant que le film qu'il venait de voir (<ins>Naissance d'une Nation</ins> de <strong>Griffith</strong>, alors encore diffusé sous le nom de "The Clansman") était tellement bien que jamais un autre film ne pourra l'égaler, difficile de ne pas voir le réalisateur s'exprimer à travers son personnage.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/nickelodeon/.acteurs_m.jpg" alt="acteurs.jpg, oct. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Nickelodeon-de-Peter-Bogdanovich-1976#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/839