Je m'attarde - Mot-clé - Californie le temps d'un souffle<br />2024-03-29T14:52:11+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLe Mythe de l'entrepreneur, de Anthony Galluzzo (2023)urn:md5:50f62d10a401b54e35843da6762579972023-03-22T15:29:00+01:002023-03-22T15:33:36+01:00RenaudLectureAnthony GalluzzoCalifornieCapitalismeEssaiEtats-UnisInformatiquePolitiqueSilicon ValleySteve JobsSteve WozniakTechnologie <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/mythe_de_l-entrepreneur/.mythe_de_l-entrepreneur_m.jpg" alt="mythe_de_l-entrepreneur.jpg, mars 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Redonner sa part au hasard</strong></ins></span>
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<p>Construction originale d’un essai qui semble d'abord chercher à définir les termes d'un sujet, explicites en apparence (tout le monde a déjà entendu parler de la notion d'entrepreneur, même si la distinction avec celle de patron n'est pas si claire a priori et nécessite des précisions) mais en apparence seulement. Les deux premiers chapitres s'attachent donc à exploiter une étude de cas avec l'histoire de <strong>Steve Jobs</strong>, un régal de décorticage de deux aspects du mythe, le côté créateur (le génie visionnaire sortant du néant, dans une conception schumpétérienne) avec en l'occurrence l'image assimilée par tout le monde des deux gamins, avec <strong>Steve Wozniak</strong>, dans leur garage et le côté héroïque du capitaine allant contre les idées reçues et contre les obstacles jetés sur son chemin pour illuminer les masses.</p>
<p>J'ai toujours été fasciné par ces talk-shows américains montrant ce genre de personnages sur une estrade qui annonce une "révolution" (dans une version parodique qu'on croirait pompée sur un sketch des Guignols), à quel point ils pouvaient avoir une influence immense sur des gens à travers le monde. C'est un peu la version tech de la messe, et le bouquin s'intéresse beaucoup à la contribution d'Apple à la réécriture de l'histoire, comme si <strong>Jobs </strong>avait inventé from scratch l'ordinateur personnel — avec une invisibilisation totale de tout ce qui permet la création et l'industrialisation de ce genre d'objets, à commencer par les développements précédents, nombreux, et la contribution de l'État, qui a largement participé à la subvention. Je n'avais pas ou peu conscience du récit autour du personnage (l'enfance, le génie, la chute, la renaissance, la mort), et <strong>Anthony Galluzzo </strong>s'est farci une quantité de biographies vomitives assez hallucinante pour en faire un tel compte-rendu, chapeau. L'aperçu donné des poncifs journalistiques est délicieux.</p>
<p>Ce que j'ai le plus apprécié je pense, c'est la suite : le travail sur la violence d'une telle industrie (avec l'exemple de Foxconn notamment, archétype parfait de la fausse innocence du capitalisme néo-libéral qui délocalise toutes les horreurs et qui nie toute connaissance du sort réservé aux travailleurs à l'autre bout du monde), l'histoire récente de la construction du mythe à deux grandes époques (en remontant à la fin du XIXe siècle avec les figures de grands industriels comme <strong>John D. Rockefeller </strong>ou <strong>Andrew Carnegie</strong>, avec notamment la grève et la fusillade marquantes de Homestead, et la différence entre entrepreneur supérieur et vil capitaliste), et la légitimation d'un ordre social (avec en particulier l'opposition entre <strong>Jobs </strong>et quelqu'un comme <strong>Bill Gates</strong>, le premier ne s'étant jamais préoccupé de travailler son image de philanthrope).</p>
<p>De <strong>Thomas Edison </strong>à <strong>Elon Musk</strong>, la vision d'ensemble donne quand même le vertige sur plus d'un siècle, à préciser comment tout cela est rendu possible et diffusé à travers le monde, d’autant que le bouquin ne laisse guère de place à l’optimisme (tout gourou est voué à être remplacé, peu importe les démonstrations concernant ses escroqueries type <strong>Elizabeth Holmes</strong>, et on se moquait déjà à l’époque de <strong>Carnegie </strong>par exemple). Tout le monde se fout complètement qu'on en vienne à tendre des filets autour des immeubles d'une usine chinoise pour limiter les suicides d'ouvriers fabriquant des composants à la source de 90% du matériel informatique mondial. Le sang des travailleurs se dilue dans l'eau des océans traversés par les porte-conteneurs, et on n'aura jamais de documentaire sur l'intérieur de ces entreprises où tout est effroyablement contrôlé. Le niveau de cynisme qui règne est inimaginable, allant chez certains de ces héros à affirmer que ce sont les plus pauvres les plus chanceux car ils auront vraiment le goût de la réussite conquise sur des conditions difficiles (des discours aussi passionnants que ceux de <strong>Reagan</strong>). Je n’avais pas du tout conscience de l’étendue de la puissance d’un tel mythe et <ins>Le Mythe de l'entrepreneur</ins> aura donc eu aussi cette vertu-là.</p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Mythe-de-l-entrepreneur-de-Anthony-Galluzzo-2023#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1145The Endless Summer, de Bruce Brown (1966)urn:md5:e946803a44714b3475e9aa099488b24d2021-07-27T19:46:00+02:002023-12-14T14:54:51+01:00RenaudCinémaAfriqueAfrique du SudAustralieCalifornieDocumentaireEtats-UnisHawaïNouvelle-ZélandeSurfTahiti <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/endless_summer/.endless_summer_m.jpg" alt="endless_summer.jpg, juil. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Carpe diem en surf<br /></strong></ins></span>
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<p>De <ins>The Endless Summer</ins>, je retiendrai avant tout les plans à la GoPro 40 ans avant l'invention de la GoPro, la caméra collée à l'avant de la planche, ainsi que l'ambiance terriblement envoûtante du milieu des années 1960, en compagnie de deux jeunes surfeurs californiens qui sillonnent la planète à la recherche des meilleurs spots de surf, dans une sorte d'été permanent, en passant par le Sénégal, le Ghana, l'Afrique du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, Tahiti et Hawaï. Pendant deux années entières. Sans être surfeur aquatique, cette recherche de la vague parfaite me parle énormément, et la tonalité de roman-photo qu'impose la voix off omniprésente de <strong>Bruce Brown </strong>(on n'entendra à aucun moment le son de la voix des deux principaux intéressés, et le narrateur pourra en énerver plus d'un), avec ses blagues potaches et ses élucubrations anthropomorphiques, confère à ce témoignage une forme extrêmement mélancolique d'insouciance, à une époque où les tropiques étaient perçus comme des paradis sans commune mesure avec notre perception contemporaine.</p>
<p>Ce documentaire, avec sa verve puissamment candide, pourrait autant envoûter qu'agacer, c'est certain. Si l'on parvient à adhérer à la capsule temporelle, il en ressort un portrait vraiment intéressant, sans aller jusqu'à parler d'une éventuelle consonance sociologique, focalisé sur les deux surfeurs <strong>Mike Hynson </strong>et <strong>Robert August </strong>qui incarnent très bien un idéal de la jeunesse américaine (côte ouest) téméraire des années 60. Dans le cas contraire, on se heurtera à la lourdeur des séquences abordant la drague ou les animaux, voire même celle des séquences de surf à proprement parler qui finissent par se répéter (au propre comme au figuré). On l'aura compris, on n'est pas vraiment chez <strong>Flaherty</strong>, l'ethnographie s'arrête au parfum d'aventure et aux préjugés de la carte-postale, avec notamment quelques remarques racistes (typiquement, "being good Africans, they threw a few rocks") dont je n'ai pas su doser le degré entre premier et second.</p>
<p><strong>Bruce Brown </strong>s'amuse beaucoup dans ce qui s'apparente à un carnet de voyage, un film emblématique de la culture surf mais aussi du frémissement de la contre-culture à venir. Le sérieux des documentaires traditionnels jusqu'alors vole en éclats, et le ton se fait éminemment personnel, humoristique (pour le meilleur comme pour le pire), sur fond de musique Surf — pas de <strong>Beach Boys </strong>toutefois, la bande originale est assurée par <strong>The Sandals</strong>. Un carnet de voyage avec ses élans lyriques, ses ventres mous, ses digressions. Au-delà des instants bouffons (avant de partir, les surfeurs lisent des ouvrages sur les requins, sur la malaria) et des instants gênants a posteriori (l'homme blanc à la rencontre de l'homme noir), il persiste l'excitation de ces jeunes à la découverte d'un inconnu. Et ces élans mélancoliques impromptus, face au soleil couchant.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/endless_summer/.surf_m.jpg" alt="surf.jpg, juil. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/endless_summer/.voiture_m.jpg" alt="voiture.jpg, juil. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/endless_summer/.soleil_m.jpg" alt="soleil.jpg, juil. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/The-Endless-Summer-de-Bruce-Brown-1966#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/995Below Sea Level, de Gianfranco Rosi (2008)urn:md5:66bafee5d5ac798348cdd65d5b9f30362021-05-30T21:37:00+02:002021-05-30T21:03:48+02:00RenaudCinémaCalifornieDocumentaireDésertEtats-UnisEthnologieMarginalitéSans-abris <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/below_sea_level/.below_sea_level_m.jpg" alt="below_sea_level.jpg, avr. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Un désert, des sans-abris, la Californie<br /></strong></ins></span></div>
<p>Sujet d'étude ethnologique en or : une communauté de marginaux californiens, perdue au milieu d'un désert au Sud de Los Angeles, à 40 mètres sous le niveau de la mer — un détail qui donne au film son titre. Mais pas n'importe quels marginaux, pas des hippies, pas des néo-ruraux illuminés, pas des naturopathes crudivores hygiénistes : des sans-abris le plus souvent exclus violemment de la société. Dans cette ancienne base militaire désaffectée, il suffit de regarder le visage extrêmement marqué de certains des protagonistes pour comprendre que la vie n'a pas été facile et clémente avec eux.</p>
<p><strong>Gianfranco Rosi</strong>, le réalisateur de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Fuocoammare-par-dela-Lampedusa-de-Gianfranco-Rosi-2016"><ins>Fuocoammare</ins></a> ou encore <ins>El Sicario, chambre 164</ins>, s'est intégré à la communauté sur le temps long (entre 3 et 5 ans, selon les sources) et ça se voit instantanément. Il côtoie très naturellement tous les individus qui peuplent ce microcosme, et donne l'occasion de brosser autant de portraits qui permettent de saisir la personnalité de chacun, avec beaucoup de respect mais sans manières, avec de la place pour l'émotion mais sans misérabilisme. Une chronique centrée sur des gens qui semblent tout droit sortis de la génération liée à la contre-culture du siècle dernier et qui en ont visiblement été expulsés avec violence — en dépit de toute la relativisation dont sont capables certains d'entre eux. Ces gens, perdus dans le sable du désert, entourés de ferraille, de vieux matelas et de morceaux de tôle, abrités dans de vieilles voitures rouillées, prennent des allures d'êtres irréels dans un cadre crépusculaire digne d'un scénario de post-apo. Le film <ins>Nomadland</ins> de <strong>Chloé Zhao</strong>, sur un sujet très proche, primé à l'international cette année, peut dégager par contraste un parfum d'artificialité et de tentative d'esthétisation vraiment hors de propos, presque révoltant en comparaison. Un contrepoint intéressant, a minima.</p>
<p>Leur vécu irradie à chacune de leurs interventions, aussi différentes soient-elles. Que ce soit un ancien GI ayant combattu au Vietnam qui a découvert sa féminité sur le tard, un philosophe anarchiste un peu idéaliste, un autre obsédé par les mouches, un autre qui s'occupe d'approvisionner tout le monde en eau ou une ex-docteur qui fait de l'acuponcture à son chien pour le soulager de sa tumeur, ce portrait de l'Amérique évite assez facilement les stéréotypes. Beaucoup de témoignages très émouvants. "Je veux bien vieillir, mais pas avoir l’air vieille… Je ne réalisais pas à quel point c’était facile de m’en sortir avec ce visage. C’est différent maintenant, ça va venir du dedans. Mais dedans, il n’y a rien, sauf ce que je porte sur mon visage : le feu, les brûlures, le vent qui hurle dans ma tête."</p>
<p>Un docu qui brille par son absence de jugement, par sa pudeur, sans pour autant éviter les complications — les effets de la crise économique, la détresse psychologique, les deuils traumatisants — auprès de ces gens qui ont été rejetés loin de l'espace public. Le film jumeau de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Hobo-de-John-T-Davis-1992">Hobo</a>, réalisé par <strong>John T. Davis</strong> en 1992, qui était consacré au symbole très américain des sans-abris vagabonds.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/below_sea_level/.pic1_m.jpg" alt="pic1.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/below_sea_level/.pic2_m.jpg" alt="pic2.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/below_sea_level/.pic3_m.jpg" alt="pic3.jpg, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/below_sea_level/.pic4_m.jpg" alt="pic4.jpg, avr. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Below-Sea-Level-de-Gianfranco-Rosi-2008#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/959Dans l'œil d'un tueur, de Werner Herzog (2009)urn:md5:3351c6b58b8e18fa2ad65421e9ff6fac2020-12-01T11:35:00+01:002020-12-01T11:35:00+01:00RenaudCinémaAssassinatBrad DourifCalifornieChloë SevignyDavid LynchFamilleMichael PeñaMichael ShannonSan DiegoThéâtreUdo KierWerner HerzogWillem Dafoe <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/dans_l-oeil_d-un_tueur/.dans_l-oeil_d-un_tueur_m.jpg" alt="dans_l-oeil_d-un_tueur.jpg, nov. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"What do you mean by birds? They're my eagles in drag!"<br /></strong></ins></span></div>
<p>L'exploration du territoire américain et de la culture des États-Unis par <strong>Werner Herzog </strong>a quelque chose de passionnant, et presque envoûtant pour un fanatique de mon espèce, quand bien même je ne connaîtrais qu'un tout petit bout de cette partie-là de sa filmographie — tout ce qui se situe après le gros morceau 1968 - 2003, de <ins>Signes de vie</ins> à <ins>Bruno S. - Estrangement is death</ins>, disons, ne m'est pas encore très familier. À quand le volume 4 du coffret Potemkine, d'ailleurs ? Ils doivent vraiment attendre qu'un malheur arrive pour décider s'il faudra en éditer encore un ou deux pour couvrir l'intégralité de son œuvre... Mais je m'égare.</p>
<p>Dans mon imaginaire herzogien, <ins>Dans l'oeil d'un tueur</ins> se rapproche étonnamment de <ins>Bad Lieutenant : Escale à la Nouvelle-Orléans</ins> dans son esthétique, dans son surréalisme discret, et dans l'interprétation hallucinée de son protagoniste. Il suffit presque de remplacer la vision étrange d'un crocodile par celle de deux flamands roses et la Louisiane par la région de Californie près de San Diego... Mais <strong>Nicolas Cage </strong>est irremplaçable, bien entendu. En tout état de cause, la présence de <strong>Michael Shannon </strong>donnerait envie de le rapprocher de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Salt-and-Fire-de-Werner-Herzog-2016"><ins>Salt and Fire</ins></a>, à tort car les tonalités des deux films n'ont vraiment pas grand-chose en commun. Une photographie irréelle de ces lieux, voire uniquement de cette portion de rue où s'est joué un drame inspiré d'un fait divers des années 70, avec ces ombres contrastées et ces lumières de plein jour atténuées, suffit à créer un environnement très bizarre : cette fois-ci, la frontière opaque entre réalité et fiction se situe à l'intérieur même du récit, dans le fait divers qui sert de base, puisque la pièce Oreste sera retranscrite au sein du foyer du tueur.</p>
<p>Et pour illustrer la folie mystique ésotérique d'un homme qui tua sa mère à coup de sabre, dans une répétition impromptue d'une tragédie grecque, qui mieux que <strong>Michael Shannon </strong>et son regard de psychopathe qu'il délivre sans forcer... Sans parler de la boîte de céréales avec une tête de quaker qu'il décrit comme la manifestation de dieu. Le flashback qui le transporte au Pérou (tiens donc), dans les moments qui ont précédé son pétage de plombs et sa révélation spirituelle, est immédiatement intelligible. Et toujours cet humour omniprésent, presque invisible si on n'y prête pas attention, disséminé dans tous les dialogues de cette histoire pourtant sordide. Une histoire pareille à la lisière du surnaturel sied finalement plutôt bien à une production signée <strong>David Lynch</strong>, inspirée de l'histoire réelle du parricide commis par Mark Yavorsky. Avec sa pléthore de têtes connues (<strong>Willem Dafoe</strong>, <strong>Chloë Sevigny</strong>, <strong>Udo Kier</strong>, <strong>Michael Peña</strong>, <strong>Brad Dourif</strong>, et même <strong>Dave Bautista</strong>), <strong>Herzog </strong>semble prendre un malin plaisir à verser dans la subversion et le détournement de codes du cinéma américain.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/dans_l-oeil_d-un_tueur/.repas_m.jpg" alt="repas.jpg, nov. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Dans-l-oeil-d-un-tueur-de-Werner-Herzog-2009#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/865Le Privé, de Robert Altman (1973)urn:md5:2ea8e87eb55cf856b0fd66278c8d69c32018-11-26T12:27:00+01:002018-11-26T12:27:00+01:00RenaudCinémaArnold SchwarzeneggerCalifornieChatDétective privéElliott GouldRobert AltmanVilmos Zsigmond <div id="centrage"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/prive/.prive_A_m.jpg" alt="prive_A.jpg" title="prive_A.jpg, nov. 2018" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/prive/.prive_B_m.jpg" alt="prive_B.jpg" title="prive_B.jpg, nov. 2018" /><br />
<span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"That's OK with me."<br /></strong></ins></span>
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<p>A-t-on déjà vu un film policier dans lequel l'enquête à proprement parler avait aussi peu d'importance dans le déroulement de l'intrigue ? J'ai rarement ressenti un tel degré de détachement entre le registre théorique et son application, en tous cas. <strong>Robert Altman</strong> s'intéresse au moins autant (sinon plus) à deux histoires indépendantes en apparence, dans lesquelles se perdra <strong>Elliott Gould</strong> aka Philip Marlowe, et à l'envers du décor, la toile de fond en guise de portrait de l'Amérique californienne dans les années 70. Il n'y a qu'à voir à quel point la séquence initiale, totalement dépourvu d'enjeux tangibles, s'étire en longueur : le détective est réveillé à 3 heures du matin par son chat, et après une série de commentaires désabusés nuancés par quelques borborygmes, se lance dans un long périple pour aller lui chercher de la nourriture dont il ne voudra au final même pas. Le ton mi-désinvolte mi-désenchanté est donné d'entrée de jeu.</p>
<p>Peut-être est-ce volontaire, on est en droit de le penser en cette période cinématographique à haute teneur de remise en question des codes établis, mais les trames narratives principales (l'ami de Malowe qui lui demande de l'accompagner à la frontière avant qu'on n'apprenne son "suicide", d'une part, et d'autre part une femme qui l'embauche pour aller chercher son mari enfermé dans une institution équivoque mêlant hôpital psychiatrique et centre de désintoxication) sont magnifiquement prévisibles et dépourvues de sens profond. On suit tout cela avec un léger désintéressement, de manière relativement agréable au demeurant, avec pour conséquence de se concentrer sur tous les à-côtés surprenants de ces pérégrinations attendues.</p>
<p>Le personnage interprété par <strong>Gould</strong> (Marlowe, un nom qui résonnera comme une référence vaguement familière, avant de retrouver dans les tréfonds d'une mémoire embrumée le lien avec le personnage de <strong>Humphrey Bogart</strong> chez <strong>Howard Hawks</strong>, dans <ins>Le Grand Sommeil</ins>), est excellent dans son registre de privé blasé, adepte d'un "<em>that's OK with me</em>" à répétition qui deviendra presque un slogan. Nonchalant sans être pédant, anachronique sans être tout à fait l'ouest, il trimballe sa bonhommie à travers le film. On flâne avec lui dans les rues et dans les appartements, et on découvre à ses côtés que derrière le luxe et l'apparente bonne humeur de façade se cachent violence, corruption, et trahisons.</p>
<p>Un portrait de solitaire endurci, voisin d'une troupe de hippies abonnées aux séances de méditation transcendantale topless et en plein air, sous l'emprise de substances diverses, pour lesquelles on ne sentira jamais l'ombre d'une attirance physique. Le film regorge de détails sympathiques, l'occasion de noter le travail remarquable de <strong>Vilmos Zsigmond</strong> : que ce soit sur la forme avec une narration parfois entièrement guidée par la technique (le zoom sur la plage à travers une fenêtre, depuis l'intérieur d'une maison, qui dévoile un personnage s'avançant dans les flots, à partir d'une discussion entre une femme et Marlowe), sur le fond avec le portrait quasi-sociologique de cette Amérique-là (on reconnaît très bien <strong>Altman</strong> dans cette perspective), ou sur des petites singularités mémorables comme la présence de <strong>Schwarzy </strong>en slip et en moustache dans le bureau d'un gros mafieux. </p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/prive/.gould_m.jpg" alt="gould.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="gould.jpg, nov. 2018" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Prive-de-Robert-Altman-1973#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/577Sam was here, de Christophe Deroo (2017)urn:md5:33e2c19ef4ca2143a9cdb4abbb229eb12017-03-10T09:18:00+01:002017-03-10T09:25:25+01:00RenaudCinémaCalifornieEtats-UnisIsolementRuralitéSolitudeSérie B <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/sam_was_here/.sam_was_here_m.jpg" alt="sam_was_here.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="sam_was_here.jpg, mar. 2017" />
<div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>La récitation<br /></strong></ins></span></p>
</div>
<p>Typiquement pour moi le genre de film (ou le film de genre, d'ailleurs) qui se croit plus fin et plus malin que ce qu'il est, et pas qu'un peu. Le concept est bon, ce n'est absolument pas le problème, mais la mise en œuvre du postulat de départ flirte dangereusement avec la catastrophe à de trop nombreuses reprises. À vrai dire, on n'est pas vraiment surpris d'apprendre que ces 75 minutes sont en réalité l'extension d'un court-métrage que <strong>Christophe Deroo </strong>avait réalisé quelques années auparavant, tant le remplissage (et ses conséquences) saute aux yeux.</p>
<p>Pourtant, l'introduction est très bien menée, suscitant des attentes conséquentes. Structuré à l'aide d'une photographie très lumineuse rappelant celle de <strong>Quentin Dupieux</strong>, charpenté autour d'une musique envoûtante rappelant celle de <strong>John Carpenter</strong>, le film suit les déambulations d'un représentant de commerce égaré dans les contrées rurales et reculées du sud de la Californie (alors qu'initialement, le film devait être tourné en France, avant qu'un producteur exécutif américain ne se manifeste...), en plein territoire redneck. Et mystérieusement vide. Maisons abandonnées garnies d'écrans de surveillance, portes closes assez peu accueillantes, déserts de sable et de caravanes délabrées : l'ambiance sordide a des arguments qui pèsent dans la balance. Le début de la montée en tension liée à une étrange émission de radio incitant à cracher sa haine, aussi.</p>
<p>Mais sans doute par excès de confiance (spéculation pure), <ins>Sam was here</ins> (ou "Nemesis" dans le circuit de distribution français) fait une magnifique sortie de route à mi-parcours, quand il s'agit de répondre aux multiples appels de la première partie par des choix de mise en scène concrets. Pour un film de genre lambda, on ne saurait pas vraiment reprocher ce genre de détails, mais comme les considérations esthétiques semblent être en l'occurrence au centre des enjeux, l'accumulation de faux raccords et de fautes de cohérence et/ou de crédibilité grignote petit à petit tout ce que le film s'était donné tant de mal à construire. Les bastons sont mal filmées et relativement ridicules (niveau action pure comme rebondissements), la chasse à l'homme tourne vite en rond, les présages menaçants s'enfoncent dans la maladresse poussive... Presque tout finit par sonner creux, même l'ambiance étrange et malsaine qui faisait tout le sel des premiers instants.</p>
<p>Quelque part, on peut se demander si <strong>Deroo </strong>n'a pas fini consumé par les références qui abreuvent son film, de <strong>Carpenter </strong>(musique) à <strong>Dupieux </strong>(lumière) en passant par <strong>Hitchcock </strong>(<ins>Psychose</ins>), <strong>Boorman </strong>(<ins>Délivrance</ins>), <strong>Hooper </strong>(<ins>Massacre à la tronçonneuse</ins>), etc. C'est une véritable récitation. L'ensemble est plutôt indigeste de ce point de vue-là, la sauce ne prend pas, les initiatives se retrouvent noyées dans les citations. Le film finit d'ailleurs dans une surenchère visuelle, narrative, mystérieuse et explicative vraiment misérable, enterrant définitivement l'espoir qu'il avait fait naître durant la première demi-heure. Et cette lumière rouge dans le ciel comme miroir aux alouettes...</p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Sam-was-here-de-Christophe-Deroo-2017#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/393