Je m'attarde - Mot-clé - Conquête de l Ouest le temps d'un souffle<br />2024-03-29T14:52:11+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearConvoi de femmes, de William A. Wellman (1951)urn:md5:d1789750cc79970e556844e29616cc182018-04-03T12:47:00+02:002018-04-03T12:46:29+02:00RenaudCinémaAmérindiensConquête de l OuestWesternWilliam A. Wellman <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.convoi_de_femmes_m.jpg" alt="convoi_de_femmes.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="convoi_de_femmes.jpg, avr. 2018" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>La deuxième vague de la conquête de l'Ouest</strong></ins></span>
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<p><ins>Westward the Women</ins> est un western qui pourrait être considéré comme l’œuvre duale de <ins>La Piste des géants</ins> (réalisé deux décennies plus tôt par <strong>Raoul Walsh</strong>), une sorte d’exploration de l’Ouest américain revisitée, dans une version que l'on serait tenté de qualifier de féministe (même si le terme ne devait pas avoir la même teneur à l'époque), se plaisant à manier les clichés du genre pour mieux les détourner. Sans nécessairement adhérer à l’ensemble de manière unilatérale, on peut toutefois trouver surprenant qu'un tel western ne dispose pas d’une visibilité autrement plus conséquente.</p>
<p><ins>Convoi de femmes</ins> est en tous cas un excellent point de vue sur la conquête de l'Ouest, au milieu du 19ème siècle. Ou, plus précisément, sur le deuxième temps de cette conquête : le convoi du titre, composé de 138 femmes et de quelques hommes pour les guider (en théorie), est envoyé depuis Chicago en direction de la Californie pour féminiser cet Ouest resté jusque-là très masculin, rendant difficile la fondation de foyers et la colonisation, naturellement. La première scène sur laquelle le film s'ouvre brutalement observe précisément le recrutement de ces femmes, par des hommes, un peu comme on sélectionnerait du bétail : on les juge sur des critères bien particuliers, presque eugénistes, à la lumière de leur capacité à remplir la mission fécondatrice qui leur sera confiée. La description du monde essentiellement masculin, empreint d’un machisme évident, laisse penser que le film va s'engager dans une direction très bien connue, celle des westerns dits classiques des années 30 à 50. Mais l'évocation de ces clichés ne constituera qu’un point d’entrée et non une ligne directrice, autant de poncifs qui n’appellent qu’à être brisés dans la suite des événements.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.douche_m.jpg" alt="douche.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="douche.jpg, avr. 2018" /></p>
<p>En réalité, les hommes du convoi auront tôt fait de se défausser, une fois le périple initié et les premières difficultés rencontrées, laissant les femmes prendre en charge la gestion de l’aventure. Devant la tournure des événements, <strong>Robert Taylor </strong>(pas des plus charismatiques il faut l’avouer, renforçant ainsi un contraste à l’avantage du propos du film) observera dans un premier temps une certaine circonspection, avant de se résoudre à embrasser le mouvement, convaincu par une telle abnégation. Mais les femmes restent des femmes, semble nous dire le film, elles n’ont aucunement besoin d’épouser les caractéristiques classiques de l’homme de l’époque pour mener à bien leur mission : elles sont coquettes, coriaces, un peu hystériques par moments, tout en faisant preuve d'un grand courage et d'une grande solidarité. Ces clichés sont évidemment à replacer dans le contexte de leur époque, et le portrait de groupe recèle une force et une originalité tout à fait remarquables dans ce cadre-là. Toutes les caricatures ne sont pas évitées, pas plus que certains aspects poussifs (la mort de l'enfant, notamment, aux accents dramatiques attendus), mais la progression constante de l'estime pour les femmes ainsi que pour les étrangers, à travers le personnage japonais initialement moqué et dévalorisé par sa taille et son inexpérience supposée, est remarquable. C’est la définition même du retournement du cliché.</p>
<p>À côté de ces considérations morales, il y a aussi un véritable intérêt dans la dimension purement narrative et descriptive du voyage et de ses péripéties. Les dangers jalonnent le périple chez <strong>Wellman</strong> comme chez <strong>Walsh </strong>: des pluies torrentielles emportant les chariots installés trop près de la rivière, une attaque d'Indiens confinée dans la bande son, des épisodes de sécheresse et même un accouchement nécessitant l’aide de toutes pour maintenir une charrette brinquebalante. Le passage le plus éprouvant est sans doute celui de la descente d'un ravin vertigineux, avec un palan et de nombreuses cordes : la tension est palpable lorsqu’on suit la lente et périlleuse descente des chariots. C'est d’ailleurs un trait d'ensemble : la joie côtoie le trépas, les moments les plus truculents côtoient les épisodes les plus durs. La mort est omniprésente, comme annoncé aux femmes lors de leur recrutement, au tout début, en guise d’avertissement. Et finalement, à l'arrivée, la vision du paradis peut enfin s'épanouir dans un festival de danses et de mariages salvateurs. Un film décidément hors des normes de son genre et de son époque.</p>
<div id="centrage"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.femme_m.jpg" alt="femme.jpeg" title="femme.jpeg, avr. 2018" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.etang_m.jpg" alt="etang.jpg" title="etang.jpg, avr. 2018" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Convoi-de-femmes-de-William-A-Wellman-1951#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/504Trois Sublimes Canailles, de John Ford (1926)urn:md5:0254d486612e1e4f28f100cf00f5670f2017-02-04T19:26:00+01:002017-02-04T19:40:25+01:00RenaudCinémaAmérindiensCinéma muetConquête de l OuestCourseJohn FordWestern <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/trois_sublimes_canailles/.trois_sublimes_canailles_m.jpg" alt="trois_sublimes_canailles.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="trois_sublimes_canailles.jpg, fév. 2017" />
<div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>The gold (and land) rush<br /></strong></ins></span></p>
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<p>Le regard que <strong>John Ford </strong>propose à travers <ins>Three Bad Men</ins> sur la célèbre conquête de l'Ouest américain est doté d'une particularité qui le différencie assez nettement de ce qui a pu être proposé par ailleurs, tout au long de l'âge d'or du western classique. De la fin du 19ème siècle au début du 20ème, entre l'époque avérée des faits relatés ici et celle du tournage du film, autrement dit de 1877 à 1926, il n'y a que 50 ans. La jonction entre le passé historique et le présent cinématographique est palpable. Mieux : les enfants d'alors, trimballés par leurs parents dans des chariots en furie lancés à toute vitesse en direction des grands espaces renfermant le minerai aussi précieux qu'hypothétique, symbole d'espoir (et d'avidité), sont devenus les acteurs du film. Il faudrait sans doute recenser tous les westerns pionniers du genre centrés sur la ruée vers l'or et la terre (gold and land rush) pour mesurer à quel point le film de <strong>Ford </strong>est novateur, mais l'authenticité qui se dégage de ces séquences indépendantes de la trame narrative principale (des gentils méchants et des méchants gentils, principalement) est impressionnante.</p>
<p>Le récit en lui-même n'est pas particulièrement marquant, toutes les histoires de romance et de rédemption qui le composent appartenant à des terrains extrêmement bien balisés, déjà, à la fin des années 30. Par contre, l'humour qui le parcourt est remarquable et ce notamment dans l'écriture des dialogues. Que ce soit dans la présentation de deux des trois canailles du titre, voleurs presque par mégarde ("<em>Mike Costigan and 'Spade' Allen weren't exactly thieves - but they had a habit of finding horses that nobody had lost</em>"), dans les ratés d'un hold-up chevalin où ils se font doubler par d'autres malfrats ("<em>Business is getting crowded</em>") ou encore dans l'imprécision toute relative de certains coups de feu ("<em>I must be goin' blind - fired three shots and only dropped two of 'em</em>"), la finesse des cartons et des répliques fait très souvent mouche.</p>
<p>C'est autour de l'incroyable séquence de course de chariots que le film semble tout entier s'articuler, avec ses centaines de figurants, son état d'euphorie générale parfaitement communicatives, son travelling latéral présentant les participant, ses accidents dignes d'un rallye moderne mouvementé et ses nombreuses anecdotes. Un bébé tombé d'une charrette en cours de route puis oublié par des parents un peu trop pressés, ramassé sans qu'ils ne s'arrêtent par d'autres prétendants à un avenir meilleur, un homme sur un vélo à grande roue tiré par un cheval, un journaliste à bord d'un chariot participant à la course imprimant les nouvelles à mesure que l'Histoire s'écrit : autant de faits que <strong>John Ford </strong>assure être bien réels. Une chose est sûre, la mise en scène de cette séquence historique est d'une impressionnante maîtrise et son souffle épique n'a pas grand-chose à envier aux productions ultérieures d'une plus grande envergure.</p>
<p>On ne sait jamais trop s'il s'agit d'une célébration de l'esprit pionnier constitutif de la mentalité de son pays ou bien d'une critique lucide de la cupidité et de l'aveuglement qu'il semble véhiculer. C'est quelque part un regard sur la fondation d'un pays qui repose autant sur la violence que sur l'aventure. Le fait que cette conquête se fasse au détriment des premiers habitants de cette terre n'est pas complètement éludé, les Indiens étant très rapidement introduits, de manière presque implicite, à la faveur de quelques plans calmes en marge de la fureur provoquée par l'homme blanc. Quelques éléments circonscrivant le cadre de la saisie de ces terres qui appartenaient aux Sioux, peu après le massacre de Custer et de son régiment lors de la bataille de Little Bighorn (1876) n'auraient toutefois pas été de trop. Mais l'absence de manichéisme, si l'on excepte les figures incontournables comme celle du méchant shérif qui fait sa loi et le couple amoureux enfin réuni faisant perdurer la tradition, est sans doute l'une des clés de la réussite d'une tel film. D'un côté les pionniers au cœur d'une conquête moralement incertaine, de l'autre des hors-la-loi qui courent inévitablement après leur mort. Leur quête de rédemption et le sacrifice presque obligatoire qui l'accompagne a beau manquer de naturel et de surprise, le plan sur lequel se clôt le film, avec la sublime silhouette de ces trois canailles fantomatiques se dessinant à l'horizon sur la ligne de crête d'une falaise crépusculaire en contre-jour, reste d'une efficacité sans faille.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/trois_sublimes_canailles/.silhouettes_m.jpg" alt="silhouettes.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="silhouettes.jpg, fév. 2017" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Trois-Sublimes-Canailles-de-John-Ford-1926#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/385