Je m'attarde - Mot-clé - Jack Clayton le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLes Chemins de la haute ville, de Jack Clayton (1959)urn:md5:34d63ca2aad5662c8e47741bfd0379d22020-02-18T22:27:00+01:002020-02-18T22:29:24+01:00RenaudCinémaAngleterreClasses socialesDrameJack ClaytonSimone Signoret <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chemins_de_la_haute_ville/.chemins_de_la_haute_ville_m.jpg" alt="chemins_de_la_haute_ville.jpg, fév. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" /><div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Darling, you're crying! I believe you really are sentimental after all."</strong></ins></span>
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<p>De ce côté-ci de l'Atlantique, on ne peut pas dire qu'une censure similaire au code Hays américain s'appliquait sur la production cinématographique britannique à la fin des années 50... Pour son premier film, le réalisateur des <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Innocents-de-Jack-Clayton-1961">Innocents</a></ins> (dans un registre fantastique très différent) <strong>Jack Clayton </strong>s'adonnait à un commentaire cinglant sur l'antagonisme de classes, en prenant pour décor la société anglaise d'après-guerre et pour thème la condition d'un homme originaire d'une petite ville industrielle du Yorkshire tiraillé entre la réussite sociale et les sentiments amoureux.</p>
<p>L'acteur <strong>Laurence Harvey </strong>peut paraître quelque peu monolithique, obsédé par la réussite, qui plus est emprisonné non seulement dans sa classe sociale modeste mais aussi dans un personnage qui n'aura de cesse d'évoluer selon plusieurs directions, plusieurs pôles amoureux et professionnels. Ces mouvements de va-et-vient ne sont pas toujours retranscrits avec une immense souplesse, donnant l'impression de le voir faire constamment marche arrière pendant deux heures, à chaque fois que son cœur ou son appétit sexuel se heurte à un mur, à chaque fois que ses aspirations sociales se trouvent contrariées par la rigidité de quelque code moral.</p>
<p>Pourtant, au-delà de son caractère programmatique, <ins>Les Chemins de la haute ville</ins> reste très intéressant, de par la violence et la mélancolie qu'il parvient à distiller au cœur de cette ascension sociale très périlleuse. Il y a les décors très bruts d'un bastion industriel encore détruit par les bombes allemandes de la Seconde Guerre mondiale pour figurer la destruction émotionnelle du protagoniste, balloté entre la fille d'un riche industriel qui semble inaccessible (de par sa situation sociale et les nombreux bâtons que sa famille lui met dans les roues) et une actrice française (<strong>Simone Signoret</strong>, très bien dans ce rôle) prisonnière de son vieux mari. C'est simple, quand l'une disparaît, l'autre réapparaît.</p>
<p>On peut être gêné par l'académisme qui affleure dans le discours beaucoup trop explicite sur le dialogue impossible entre classes sociales, ainsi que dans la composition de nombreux plans trop ouvertement travaillés (dans la lumière, dans le cadre). Pourtant, au-delà des dilemmes moraux qui hanteront le protagoniste du début à la fin, en marge de ce questionnement existentiel, la vigueur avec laquelle <strong>Jack Clayton </strong>met en scène la désolation du Nord industriel de l'Angleterre et la frontalité avec laquelle il aborde la thématique du sexe font de <ins>Room at the Top</ins> un jalon important du cinéma britannique. Et la séquence finale, conférant à un mariage l'allure d'un enterrement et inscrivant l'élévation sociale dans la douleur, avec cette fameuse larme équivoque, vaut à elle seule le détour.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chemins_de_la_haute_ville/.couple1_m.jpg" alt="couple1.jpg, fév. 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chemins_de_la_haute_ville/.couple2_m.jpg" alt="couple2.jpg, fév. 2020" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Chemins-de-la-haute-ville-de-Jack-Clayton-1959#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/740Les Innocents, de Jack Clayton (1961)urn:md5:316642a96489ed7883c7c31ddf0ae4792017-05-22T14:15:00+02:002017-05-22T13:17:17+02:00RenaudCinémaEnfanceFantastiqueFantômesJack ClaytonMaison hantée <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/innocents/.innocents_m.jpg" alt="innocents.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="innocents.jpg, mai 2017" /><div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>Fantastique psychologique<br /></strong></ins></span></p>
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<p>En règle générale, je mesure la qualité d'un film appartenant au registre élargi du fantastique à sa capacité à me surprendre. Surprendre par exemple par la minutie de sa description, comme <ins>La Maison du diable</ins> de <strong>Robert Wise </strong>(1963), ou bien par la richesse de ses thématiques au sein de contraintes propres à la série B comme <ins>Le Carnaval des âmes</ins> de <strong>Herk Harvey </strong>(1962). Dans le cas présent, les réussites émergent à plusieurs niveaux.</p>
<p>L'ambiance, tout d'abord, qui règne à l'intérieur de la maison et dans les alentours, dans les jardins et au bord de l'étang. La photographie extrêmement soignée capture quelque chose d'à la fois délicat et menaçant, de manière très diffuse, distillant son charme vénéneux avec parcimonie. Les jeux de lumière, le travail de composition et de cadrage sont autant d'aspects qui se savourent facilement. Quelques plans retiennent étrangement l'attention, avec ces très faibles ouvertures en longue focale capturant une grande profondeur de champ et provoquant un sentiment incertain, avec deux personnages évoluant dans le cadre de droite à gauche et du premier au second plan sans que l'on ne sache où placer le centre de l'action. Le noir et blanc contribue par ailleurs à dépeindre un univers à la frontière du réel, aidé en cela par une gestion de l'environnement sonore saisissante dès qu'une apparition se manifeste.</p>
<p>La description du mal, ensuite, d'une remarquable ambivalence. Au cœur de la dynamique narrative, un glissement sous forme de retournement de perspective fait passer notre regard d'une dimension purement fantastique à quelque chose de beaucoup plus réel et psychologique. De la véracité des apparitions aperçues ci et là, on passe à un questionnement tout autre sur la santé mentale de la protagoniste. L'effrayant et le dérangeant tous deux saisis dans un même mouvement, très bien cadencé.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/innocents/.lit_m.jpg" alt="lit.jpeg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="lit.jpeg, mai 2017" /></p>
<p>Le propre d'un tel film, c'est sans doute de poser une série de questions qui évoluent au cours du temps. On commence par l'énigme des supposés fantômes (des apparitions aussi énigmatiques que glaçantes, notamment celle lors de la partie de cache-cache), un peu classique, pour petit à petit douter du caractère irréprochable de Miss Giddens et remettre en question sa position. Après le passage nocturne où les réminiscences des ébats passés de Quint et Miss Jessel résonnent dans les couloirs de la maison, on n'est plus sûr de rien. Cette sexualité semble la surprendre et la déranger profondément (elle est fille de pasteur), et son image de protectrice vis-à-vis des deux jeunes enfants s'efface progressivement au profit d'une forme d'emprise insoupçonnée. Les fantômes sont-ils issus du fantastique en prenant possession des enfants, pour éventuellement continuer leur histoire d'amour brutalement interrompue, ou bien ne seraient-ils pas tout simplement la projection de la frustration de Miss Giddens ?</p>
<p>La beauté du film réside dans sa capacité (et sa volonté) à maintenir le doute jusqu'à la fin, à entretenir les possibilités d'interprétation (jusqu'à l'irruption finale du fantastique alors que l'hypothèse psychologique avait gagné du terrain) sans qu'aucune piste ne contredise fondamentalement l'autre. Et quelle que soit la piste retenue, le monde des enfants semble inexorablement contaminé par celui des adultes.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/innocents/.apparition_m.jpg" alt="apparition.jpeg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="apparition.jpeg, mai 2017" /></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Innocents-de-Jack-Clayton-1961#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/408