Je m'attarde - Mot-clé - Jalousie le temps d'un souffle<br />2024-03-29T14:52:11+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLa Jeune fille et les paysans (Chlopi), de Dorota Kobiela et Hugh Welchman (2023)urn:md5:0f0db5d4035845ce95f38951bacf42162024-03-25T09:38:00+01:002024-03-25T10:36:28+01:00RenaudCinémaAdultèreEmancipationFilm d animationJalousiePaysanPeinturePologneRotoscopieRuralité <div id="centrage">
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg" title="jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.jeune_fille_et_les_paysans_A_m.jpg" alt="jeune_fille_et_les_paysans_A.jpg, mars 2024" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg" title="jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.jeune_fille_et_les_paysans_B_m.jpg" alt="jeune_fille_et_les_paysans_B.jpg, mars 2024" /></a>
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<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Destins animés</strong></ins></span></div>
<p>La formule présente dans <ins>La Passion Van Gogh</ins> est répétée en partie par <strong>Dorota Kobiela </strong>et <strong>Hugh Welchman </strong>: c'est par rotoscopie que les images de <ins>La Jeune fille et les paysans</ins> sont générées et animées, dans un second temps, après un premier tournage en décors et en acteurs réels. Le résultat visuel est époustouflant, on passe un bon moment au début à simplement contempler les tableaux s'animer sous nos yeux tout en songeant à la technique utilisée pour atteindre un tel résultat. On atteint presque la limite du procédé ici — avec lequel personne ne peut vraiment être parfaitement familier il me semble, les longs-métrages réalisés de la sorte se comptant probablement sur les doigts d'une main : en plus des deux déjà cités, seuls deux autres me viennent à l'esprit, <ins>A Scanner Darkly</ins> de <strong>Richard Linklater</strong> et <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Teheran-Tabou-d-Ali-Soozandeh-2017"><ins>Téhéran Tabou</ins></a> de <strong>Ali Soozandeh</strong> — en ce qui me concerne, car à de très nombreuses reprises, sur la durée, c'est presque comme si on voyait les images réelles derrière les peintures, avec un filtre très réaliste appliqué par-dessus. L'effet de surprise produit n'est pas du tout désagréable, bien au contraire, mais à la longue on en vient à se questionner sur l'intérêt profond d'une telle méthode et, de la sorte, on quitte de temps en temps le récit.</p>
<p>Là où <ins>La Passion Van Gogh</ins> avait un petit côté enquête documentaire, ce second film est quant à lui adapté d'un roman polonais (<strong>Władysław Reymont </strong>reçut le Prix Nobel de littérature au début du XIXe siècle à cet effet) qui plonge dans un village de campagne en pleine ébullition autour d'une femme prénommée Jagna. Elle est amoureuse d'un jeune paysan, lui-même déjà marié, mais c'est au père de ce dernier, riche propriétaire terrien, qu'elle sera contrainte de se marier, mettant en place les conditions pour un double adultère. C'était un roman assez avant-gardiste en matière d'émancipation féminine et de rejet des traditions locales, et il faut reconnaître que l'esthétique du film épouse admirablement bien l'évolution des émotions, au gré des saisons qui rythment l'effusion des sentiments.</p>
<p>Quelques scènes sont incroyablement hypnotisantes, comme par exemple celle des danses traditionnelles le jour du mariage qui interpelle vigoureusement autant par la menace qui enfle soudainement autour de la jeune femme que par la dimension esthétique captivante qui illustre le travail des quelque 150 artistes (chaque image est peinte à la main, il faut tout de même un peu de temps pour l'intégrer) qui ont travaillé sur le projet. Ces tableaux accompagnent agréablement la tragédie vaguement shakespearienne qui se noue dans un coin de campagne paysanne polonaise, à mesure que la jalousie et la haine des uns et des autres se développent, comme inéluctablement, avec pour point de chute une séquence finale particulièrement difficile. Très belle ultime image, à ce titre, d'un corps nu sali par le regard des malveillants et lavé par la pluie au milieu des champs.</p>
<p><em><ins>N.B.</ins> : On peut penser aux travaux de <strong>Rino Stefano Tagliafierro</strong> en matière de court-métrage animé, avec <ins>Beauty</ins> et <ins>Peep Show</ins>, dans lesquels il introduisait de légers mouvements au sein de grands tableaux.</em></p>
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<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/img1.jpg" title="img1.jpg, mars 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/2024/jeune_fille_et_les_paysans/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, mars 2024" /></a>
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Jeune-fille-et-les-paysans-de-Dorota-Kobiela-et-Hugh-Welchman-2023#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1367Lenny, de Bob Fosse (1974)urn:md5:7027f2fff557ccae310c2f210273d7642023-11-29T14:44:00+01:002023-11-29T14:44:00+01:00RenaudCinémaBiopicBob FosseComédieContre-cultureDrogueDustin HoffmanEtats-UnisHypocrisieJalousieLenny BrucePolitiqueProcèsSatireStrip-teaseSubversionValerie Perrine <a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/lenny.jpg" title="lenny.jpg, nov. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/.lenny_m.jpg" alt="lenny.jpg, nov. 2023" class="media-center" /></a>
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Good thing we nailed him."</strong></ins></span>
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<p>Impossible de ne pas penser à l'autre célèbre film américain racontant les pérégrinations d'un comique subversif largement incompris en son temps qui acquit une notoriété conséquente à la fin de sa vie : <ins>Man on the Moon</ins>, de <strong>Miloš Forman</strong>, consacrée à la vie d'<strong>Andy Kaufman</strong>. J'avais jugé sans doute un peu trop vite <strong>Bob Fosse </strong>sur la base d'un <ins>Cabaret</ins> englué dans la fadeur d'une comédie dramatique arborant un académisme ronflant (avis extrêmement minoritaire, les tomates pourries sont juste-là), car il montre une facette radicalement différente avec ce biopic sur <strong>Lenny Bruce</strong>, un comique très controversé des années 60. Du bienfait du surpassement des préjugés...</p>
<p>En réalité, même si les thèmes des deux films cités sont très proches, la structure et le contenu diffèrent sensiblement. Là où <strong>Forman </strong>narrait tout le contexte, la vie en marge des numéros de <strong>Kaufman </strong>pour illustrer à quel point les deux se nourrissaient mutuellement, <strong>Fosse </strong>adopte une narration en flashbacks post-mortem, avec une mise en scène sous la forme d'un faux documentaire interviewant une poignée de proches (sa femme, sa mère, et son manager) pour tisser des passerelles avec des épisodes passés montés de manière pas toujours chronologiques, <ins>Lenny</ins> s'autorisant quelques allers-retours entre plusieurs époques.</p>
<p>Le contexte est même sans doute un peu plus fertile ici : le cadre posé est celui de l'Amérique puritaine du début des années 1960, c'est-à-dire les 50s encore mal dégrossies qui pèsent de tout leur poids sur la norme morale d'alors — qui n'a pas fondamentalement changé depuis, en ce qui concerne les mécanismes de l'hypocrisie en matière d'obscénités admissibles à la télévision en direct— et qui interdisent l'utilisation de mots comme "cocksucking" sous peine de poursuites pénales. L'occasion de scènes très drôles d'ailleurs, lorsque d'une part Lenny essaie de faire dire le mot interdit au président du tribunal en première instance, et d'autre part lorsque les témoins se trouvent obligés de les prononcer pour faire leur récit des événements (avec en prime une répétition par le greffier). En creux, le film de <strong>Bob Fosse </strong>entend montrer à quel point l'attention se sera portée sur la forme, le recours à des termes grossiers, tout en oubliant largement le fond des critiques portées par les discours très satiriques de Lenny.</p>
<p><ins>Lenny</ins> est rythmé par les punchlines, sans doute un peu trop même si on peut allègrement puiser dans les dialogues pour trouver son bonheur (une facile mais efficace, au sujet de la religion chrétienne et de la responsabilité de la mort de Jésus "Good thing we nailed him when we did, because if we had done it within the last 50 years, we'd have to contend with generations of parochial schoolkids with little electric chairs hanging around their necks"). Y figurent le <strong>Dustin Hoffman </strong>des grands jours, c'est-à-dire plutôt celui de <ins>The Graduate</ins> que celui de <ins>Tootsie</ins>, ainsi que la très convaincante <strong>Valerie Perrine </strong>dans le rôle de sa femme strip-teaseuse, à l'origine d'un matériau conséquent en matière d'analyse du couple, de la jalousie, et de l'émancipation à deux. C'est un film intéressant aussi parce qu'il n'hésite pas un instant à montrer les contradictions à l'œuvre qui sous-tendent tous ses numéros, et qui ose mettre en scène un long show raté de Lenny en intégralité, vers la fin de sa carrière, avant sa mort par overdose de morphine. Évocation d'une figure de la contre-culture qui pourrait être à l'origine du stand-up, qui se fait parfois un peu trop poussive dans ses logorrhées acides répétées, mais qui évite soigneusement les écueils classiques de l'hagiographie pour esquisser un portrait partiel, pluriel, féroce et stimulant.</p>
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<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/img1.jpg" title="img1.jpg, nov. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, nov. 2023" /></a>
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<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/img4.jpg" title="img4.jpg, nov. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/lenny/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, nov. 2023" /></a>
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Lenny-de-Bob-Fosse-1974#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1293La Résidence (La Residencia), de Narciso Ibáñez Serrador (1969)urn:md5:4053d83041cfce67ff392d79468e17952023-09-11T11:52:00+02:002023-09-11T15:56:07+02:00RenaudCinémaEspagneGothiqueHorreurHumiliationJalousiePensionnatThriller <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/residence/.residence_m.jpg" alt="residence.jpg, août 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Amarillo, ou le giallo espagnol</strong></ins></span>
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<p>Très surprenante découverte que ce film d'épouvante situé dans un internat pour jeunes filles, à l'atmosphère étrange puis inquiétante, qui se transforme petit en petit coupe-gorge pour filer tout droit vers sa conclusion au sommet de l'horreur... Et non, il ne s'agit pas de <ins>Suspiria</ins>, il ne s'agit pas même d'un giallo italien mais d'un thriller espagnol (avec une actrice allemande au casting, <strong>Lilli Palmer</strong>) dépourvu de fantastique réalisé à la fin des années 60, près d'une décennie avant le grand classique de <strong>Dario Argento</strong>. Autant dire qu'il est presque impossible de ne pas établir des passerelles entre les deux œuvres tout au long du visionnage.</p>
<p>Avec le recul le scénario autant que la progression de la dramaturgie sont littéralement transparents : une fois la scène d'exposition posée et les principaux personnages établis, on voit quasiment tous les fils narratifs apparents. On voit très bien les relations malsaines par-ci et les fausses pistes montrées outrageusement par-là. Il n'empêche que <ins>La Residencia</ins> développe sa toile horrifique dans un cadre saisissant, au sein de ce pensionnat gorgé de couloirs, de portes fermées à clés, de murs en pierre, et de passages labyrinthiques. C'est sans doute plus dû au hasard mais plusieurs aspects évoquent le <ins>Carrie</ins> de <strong>Brian De Palma </strong>et la scène des douches en introduction pourrait même être une évocation directe de celle présente ici.</p>
<p>On peut apprécier en outre la pondération dans la présentation de la relation entre la directrice et son fils, dangereusement incestueuse, qui ne s'interdit pas pour autant quelques séquences hautement symboliques et mises en scènes plutôt adroitement — surtout pour une réalisation qui remonte à 1969. Il se dégage une atmosphère de frustration intense au sein du groupe de jeunes filles (la scène où une fille parvient à s'accorder un moment de plaisir dans la grange tandis que toutes les autres sont "prisonnières" en classe est redoutable), qui se mélange à la tension horrifique sourde et grandissante dans cet environnement oppressant. Les jalousies et les humiliations trouvent dans ce cadre presque gothique un terreau de choix pour s'exprimer tragiquement.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/residence/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/residence/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/residence/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/residence/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, août 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Residence-de-Narciso-Ibanez-Serrador-1969#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1223Casier judiciaire, de Fritz Lang (1938)urn:md5:1406a40b1548644d5f2c82f2d65adcc72023-05-29T12:05:00+02:002023-05-29T12:05:00+02:00RenaudCinémaCrimesFritz LangGeorge RaftInfidélitéJalousieSylvia SidneyTravail <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.casier_judiciaire_m.jpg" alt="casier_judiciaire.jpg, avr. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"The big shots aren't little crooks like you. They're politicians."</strong></ins></span>
</div>
<p>En 1936, 1937 et 1938 <strong>Fritz Lang </strong>enchaîne les productions américaines et <ins>Casier judiciaire</ins> (aka You and Me) s'inscrit dans une continuité claire, au sein d'une filmographie à dominante allemande par ailleurs, avec <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Furie-de-Fritz-Lang-1936">Furie</a></ins> et <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/J-ai-le-droit-de-vivre-de-Fritz-Lang-1937">You Only Live Once</a></ins>, deux excellents films qui lui font fatalement beaucoup d'ombre. Mais tout de même, voir <strong>Lang </strong>s'essayer à la comédie romantique, c'est quelque chose d'assez surprenant en soit pour légitimer le visionnage de cette œuvre dont on ne conservera probablement pas un souvenir mémorable. Ici le thème structurant est tout à fait connu chez <strong>Lang </strong>: l’impossible intégration du criminel au sein de la société.</p>
<p>Le récit centré sur deux personnages travaillant dans un même magasin joue sur une asymétrie particulière : il s'agit de deux condamnés libérés sur parole recrutés par un patron qui œuvre à la réinsertion, mais seul <strong>George Raft </strong>(un peu fade) avouera les raisons de son recrutement à <strong>Sylvia Sidney</strong> (très attachante). La raison pour laquelle elle ne fait pas de même est communiquée au spectateur, de manière indirecte : elle ne veut pas le lui révéler car leur liaison ne pourrait pas pour le moment se concrétiser par un mariage à cause de la période de probation chez eux deux. Mais l'homme, lui, l'ignore. Point de départ d'une série d'imbroglios un peu artificiels qui alimentent des tourments divers chez <strong>Raft</strong>, s'imaginant le pire : elle doit le tromper avec quelqu'un d'autre ! Bien sûr, il interprétera mal la signification des mots d'une amie à elle, il confondra des papiers judiciaires avec des lettres d'amour, c'est-à-dire autant de points d'entrée pour une jalousie maladive et une déception injustifiée.</p>
<p>Le code Hays se fait ressentir non pas dans la dimension sexualisée de leur rapport (elle tombe enceinte tout de même, malgré la situation peu conforme selon le code vu qu'ils ne sont pas mariés) mais dans la leçon donnée par <strong>Sidney </strong>à la fin, une leçon à prendre au sens le plus littéral qui soit. Tandis que <strong>Raft </strong>et sa bande se sont décidés à cambrioler le magasin dans lequel ils travaillaient, elle anticipe le forfait (grâce à une coup de téléphone d'un acolyte peu malin) et vient sur place les en empêcher avec le patron himself. Ni une ni deux, une craie et un tableau noir, et voilà qu'elle leur démontre par a+b que non, le crime ne paie pas. En prenant en compte toutes les dépenses, le faible montant du butin et tout le toutim, il ne restera à chacun des voleurs que 100 dollars. Conclusion : il vaut mieux se satisfaire d'une bonne petite vie d'employé. Au passage, petit tacle : "<em>The big shots aren't little crooks like you. They're politicians.</em>" Ce final très moral avec happy end vertueux gâche une bonne part du plaisir de voir cette femme tenir tête aux malfrats.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.img1_m.png" alt="img1.png, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.img2_m.png" alt="img2.png, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.img3_m.png" alt="img3.png, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.img4_m.png" alt="img4.png, avr. 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/casier_judiciaire/.img5_m.png" alt="img5.png, avr. 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Casier-judiciaire-de-Fritz-Lang-1938#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1154Infidèlement vôtre, de Preston Sturges (1948)urn:md5:0f8f637372b19b423daa2837e9be15762023-05-11T10:11:00+02:002023-05-11T10:11:00+02:00RenaudCinémaBurlesqueChef d orchestreComédieFantasmeHonneurJalousieMusicienMusique classiquePreston SturgesRex Harrison <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.infidelement_votre_m.jpg" alt="infidelement_votre.jpg, mars 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Well, it's better to do it in public than not to do it at all!"</strong></ins></span></div>
<p>Comédie sophistiquée américaine (utilisant d'ailleurs le potentiel comique du contraste avec les airs très british de <strong>Rex Harrison</strong>) assez particulière appartenant au sous-registre des farces qui explorent les aspects fantasmatiques des turpitudes humaines — en l'occurrence, la jalousie d'un chef d'orchestre qui se fait des films au sujet de son épouse qui la tromperait avec son secrétaire. Les territoires sondés sont donc très éloignés de ceux que le très bon <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Tar-de-Todd-Field-2022">Tár</a></ins> sillonnait récemment. <ins>Unfaithfully Yours</ins> se découpe de son côté assez ouvertement en trois parties : une première un peu longuette qui pose le cadre et explique en quoi les germes de la jalousie ont conduit Sir Alfred a être persuadé de l'infidélité de sa jeune femme, une seconde plutôt détonnante figurant les fantasmes tour à tour morbides et magnanimes en plein concert, et une dernière complètement axée sur le burlesque lorsqu'il s'agit de mettre en œuvre ces plans qui paraissaient si parfaits dans les pensées, mais dans une exécution au comble de la maladresse.</p>
<p>Les parties introductive et conclusive sont malheureusement un peu poussives et pénibles par leur durée exagérée, semant la petite graine d'ennui qui peut éventuellement faire rater le coche de l'embrayage sur la folie de la partie centrale. Même si la mise en scène déploie des outils alimentant un raffinement assez typique de ce cinéma américain des années 1950 et 1960, c'est bien une fois la folie établie dans le cerveau malade de <strong>Harrison </strong>que les choses dégénèrent avec malice.</p>
<p>En trois grands temps au sein d'un concert mené par le chef d'orchestre, Rossini, Wagner et Tchaïkovski se font successivement les supports de trois types de conclusion pour laver un honneur perdu, croit-il. D'abord, le plan le plus machiavélique, avec l'acte jouissif et libératoire de l'assassinat de sa femme en faisant accuser son secrétaire ; puis le sens du sacrifice à travers le pardon et la signature d'un gros chèque pour la laisser partir ; enfin la tragédie d'une résolution par suicide à la roulette russe (à ne pas confondre avec la russian bank, autrement appelée crapetten, une jeu de mots parmi les centaines que compte le film, plus ou moins lourdingues :"For me, there's nobody handle Handel like you handle Handel! And your Delius – delirious!"). Portrait d'une jalousie ouvertement pathologique donc, qui se fait franchement crue et frontale dans l'exécution du premier fantasme — quand le mari lacère sa femme à coups de rasoir, on se demande si on est bien dans un rêve quand même ! Malgré tout, le concept s'épuise très vite et le burlesque de la dernière partie vire à l'enchaînement stérile de petits gags inoffensifs.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img1_m.png" alt="img1.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img2_m.png" alt="img2.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img3_m.png" alt="img3.png, mars 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/infidelement_votre/.img4_m.png" alt="img4.png, mars 2023" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Infidelement-votre-de-Preston-Sturges-1948#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1150Comme une épouse et comme une femme, de Mikio Naruse (1961)urn:md5:1ed931a00eda0fe6c1dedcfb7cb9f3b42022-04-18T15:55:00+02:002022-04-18T15:55:00+02:00RenaudCinémaFemmeHideko TakamineInfidélitéJalousieJaponLâchetéMikio NaruseRésignationSacrifice <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/comme_une_epouse_et_comme_une_femme/comme_une_epouse_et_comme_une_femme.jpg" alt="comme_une_epouse_et_comme_une_femme.jpg, févr. 2022" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Jalousie, résignation et sacrifice<br /></strong></ins></span>
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<p>Difficile de trouver plus sensible et percutant que <strong>Mikio Naruse </strong>pour décrire la condition féminine dans le Japon du milieu du XXe siècle. Diptyque intéressant formé par <ins>Comme une épouse et comme une femme</ins> et le précédent film vu <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Delit-de-fuite-de-Mikio-Naruse-1966"><ins>Délit de fuite</ins></a> (1966), unis par la présence remarquable de <strong>Hideko Takamine </strong>et surtout pour le conflit entre deux femmes qui prend son temps pour enfler et exploser à la gueule de tout son microcosme. Dans le film de 1966, c'était suite à un accident mortel et à un mensonge honteux de la part d'une femme appartenant aux hautes sphères de la société que <strong>Takamine </strong>se lançait dans une quête vengeresse, aussi lente que douloureuse. Ici, c'est le fruit d'une situation relevant du supplice sur de longues années qui la pousse à une prise de conscience dramatique au sujet de sa propre existence. Un passif très lourd : elle est la mère de deux enfants élevés par une autre femme stérile et l'homme lâche coincé entre son statut de mari et d'amant. Toute sa vie elle s'est démenée pour travailler dans le bar tenu par la femme propriétaire, en taisant consciencieusement le secret biologique, et c'est au bout d'un long chemin que la situation lui explose dans les mains, privée de ses enfants, d'un emploi stable, d'un salaire décent.</p>
<p>Le tableau du sacrifice par <strong>Naruse </strong>est d'une beauté saillante, une tragédie familiale hautement émouvante comme le cinéma japonais sait en produire. La noirceur du propos est assez terrible pour décrire la situation de femmes soumises aux traditions, aux codes imposés, aux non-dits, aux hommes. <strong>Naruse </strong>prend le temps poser avec soin le cadre initial, jovial en apparence, et le faire évoluer vers la situation finale inextricable. Le récit est aussi complexe que la situation dépeinte, avec des injustices croisées et des maux insoutenables. On appréciera l'absence de manichéisme dans l'écriture des personnages qui ont tous des choses à se reprocher (certains plus que d'autres, certes), ce qui donnera lieu à des vidages de sac mémorables sur la fin entre les deux femmes, toutes les deux particulièrement malheureuses. L'infidélité assumée est posée comme une part notable du problème, lorsqu'elle se transforme comme ici en un symbole aussi acéré de lâcheté chez l'homme et de résignation chez la femme. L'affrontement entre les deux femmes défendant leur point de vue, vers la fin, lorsque les masques tombent, est d'une tension mélodramatique intense. Finalement, ce seront les enfants qui trancheront en gagnant leur indépendance.</p>
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