Je m'attarde - Mot-clé - Jean-Paul Belmondo le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLa Chasse à l'homme, de Édouard Molinaro (1964)urn:md5:b0e0de96ef5c12226618ab6b9396baa22022-12-10T15:15:00+01:002022-12-10T15:22:05+01:00RenaudCinémaAthènesBernard BlierCatherine DeneuveClaude RichComédieFrancis BlancheFrançoise DorléacGrèceJean-Claude BrialyJean-Paul BelmondoMarie DuboisMarie LaforêtMichel AudiardMichel SerraultVoyage <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chasse_a_l-homme/.chasse_a_l-homme_m.jpg" alt="chasse_a_l-homme.jpg, nov. 2022" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Détournement de mariage<br /></strong></ins></span>
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<p>On a sans doute là ce que la comédie française pré-Nouvelle Vague (bien que réalisée en 1964) peut produire de plus anticonformiste et de sophistiqué. Le fait que <ins>La Chasse à l'homme</ins> soit une sorte de film à sketches déguisé en une unité ne m'a pas du tout dérangé car on peut très bien se conter du fil rouge ténu qui unit les différentes parties, notamment grâce aux étincelles produites par les différents atouts de la distribution. J'ai littéralement passé 1h30 à bader la jeunesse étincelante et vibrionnante de cette pléthore d'acteurs et actrices à la fois un peu à l'étroit dans un exercice de style très balisé et dans le même temps incroyablement libre de leurs mouvements. <strong>Jean-Claude Brialy</strong>, <strong>Claude Rich</strong> et <strong>Jean-Paul Belmondo </strong>d'abord, côté masculin. Puis <strong>Marie Laforêt</strong>, <strong>Marie Dubois</strong>, <strong>Catherine Deneuve</strong>, <strong>Françoise Dorléac </strong>pour la réponse féminine. Avec dans les interstices libres <strong>Hélène Duc</strong>, <strong>Michel Serrault</strong>, <strong>Bernard Blier</strong>, <strong>Francis Blanche</strong>, et pas mal de dialogues d'<strong>Audiard </strong>qui font monter la sauce du liant — quand bien même il y aurait pas mal de <ins>Tontons flingueurs</ins> réchauffé.</p>
<p>Mais alors, la fraîcheur de <strong>Brialy</strong>, le raffinage de <strong>Rich</strong>, la désinvolture contenue de <strong>Belmondo</strong>... Et la beauté magique de <strong>Deneuve </strong>au début de ses 20 ans, elle ne tient pas une place majeure dans le film (à la différence de sa sœur, <strong>Dorléac</strong>, dans la seconde partie, un peu poussive malheureusement) mais elle l'irradie intensément.</p>
<p>Le reste est presque accessoire, au final on ne s'intéresse que très peu aux pérégrinations de l'homme sur le point de se marier dissuadé par ses copains : on est plutôt concentré sur le job de proxénète de l'un des deux et sur la croisière en Grèce dans laquelle l'homme presque marié s'engage. On s'accroche à quelques répliques d'<strong>Audiard </strong>(au sujet de <strong>Dorléac</strong>, on lui dit que si elle posait nue ce serait un Renoir, mais que si elle s'était cassée la gueule en escaladant l'hôtel, ce serait un Picasso, en substance), on suit de loin le jeu du chat et de la souris entre <strong>Brialy </strong>et <strong>Dorléac </strong>à Athènes, et au final on se satisfait beaucoup de rester en haut de la vague de la comédie vivace que faisait tourner avec vigueur une jolie bande de jeunes (futures) stars. Avec un brin de nostalgie au coin des yeux. On est à des années-lumières du policier glaçant <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-Temoin-dans-la-ville-de-Edouard-Molinaro-1959"><ins>Un témoin dans la ville</ins></a> sorti 5 ans avant, un style que <strong>Molinaro</strong> ne reproduira jamais dans sa carrière, mais qu'importe.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chasse_a_l-homme/.img1_m.png" alt="img1.png, nov. 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chasse_a_l-homme/.img2_m.png" alt="img2.png, nov. 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chasse_a_l-homme/.img3_m.png" alt="img3.png, nov. 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chasse_a_l-homme/.img4_m.png" alt="img4.png, nov. 2022" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Chasse-a-l-homme-de-Edouard-Molinaro-1964#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1085Le Mauvais Chemin, de Mauro Bolognini (1961)urn:md5:5b0def7d7820b5a184999219022b39322019-07-13T22:22:00+02:002019-07-13T21:28:27+02:00RenaudCinémaClaudia CardinaleFamilleItalieJean-Paul BelmondoMauro BologniniMélodrameProstitutionRuralitéVille <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/mauvais_chemin/.mauvais_chemin_m.jpg" alt="mauvais_chemin.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="mauvais_chemin.jpg, juil. 2019" /><div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Oppositions</strong></ins></span>
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<p>Je ne connais pas bien <strong>Mauro Bolognini </strong>mais cette plongée dans l'Italie de la fin du 19ème siècle donne sérieusement envie de découvrir un peu plus en détails sa filmographie. Même si le mélodrame n'est jamais très loin, c'est principalement le contexte social qui entoure la relation de <strong>Jean-Paul Belmondo </strong>et <strong>Claudia Cardinale </strong>qui vaut le détour, capté au creux d'une très belle photographie. Un jeu d'oppositions quasiment constant entre ville et campagne, riches bourgeois et pauvres paysans, l'amour et la famille, hommes et femmes, présent et passé : autant d'antagonismes qui auront raison de leurs sentiments — pourtant déjà compliqués à la base.</p>
<p>Il y a d'un côté <strong>Belmondo </strong>le mutique, dont le mutisme est sans doute renforcé par la nature de la coproduction, lui le Français au milieu d'une troupe italienne. Son personnage est parfois un peu désagréable dans son retrait permanent, plus proche du non-jeu que de l'intériorisation volontaire : ses accès de colère et ses aléas sentimentaux n'en sont que plus incompréhensibles par moments. Et puis il y a la très jeune <strong>Cardinale</strong>, d'une incroyable beauté, prostituée dans une maison close, pour qui <strong>Belmondo </strong>volera son propre oncle et causera sa perte. Son charme rayonne très intensément, au point qu'on pardonne certaines lignes de dialogue complètement stupides (le "j'ai parfois besoin qu'on me montre quelle salope je suis" m'est resté en travers de la gorge).</p>
<p>Les thématiques de l'amour et de la jalousie n'enferment pas le film dans la case exigüe du mélodrame romantique précisément parce que l'envers du décor est placé à une hauteur équivalente : le monde paysan en souffrance y est opposé à celui des notables citadins qui ont une emprise terrible sur le patrimoine et la destinée des plus pauvres à travers le fermage. L'Italie semble alors partagée en deux entités, avec la société passée ancrée dans le travail des champs à la campagne et la société urbaine nourrissant une avidité absolue (la prostitution n'est à ce titre jamais présentée comme source de vice ou d'abjection morale). Ces deux aspects, mélodrame et cadre social, s'enrichissent mutuellement et forment le portrait d'une déchéance double, celle d'un homme dont la famille finira atomisée et celle de la société italienne au tournant du siècle dernier.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/mauvais_chemin/.belmondo_m.jpg" alt="belmondo.jpg" title="belmondo.jpg, juil. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/mauvais_chemin/.cardinale_m.jpg" alt="cardinale.jpg" title="cardinale.jpg, juil. 2019" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Mauvais-Chemin-de-Mauro-Bolognini-1961#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/691Le Voleur, de Louis Malle (1967)urn:md5:4c47c90de7214a8e5b5bb9d18d69ce752019-01-28T17:34:00+01:002019-01-28T17:35:06+01:00RenaudCinémaBernadette LafontCambriolageCharles DennerClasses socialesJean-Paul BelmondoJulien GuiomarLouis MalleNihilismeSolitude <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/voleur/.voleur_m.jpg" alt="voleur.jpeg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="voleur.jpeg, janv. 2019" /><div id="centrage">
<span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Parfois j’ai envie de tout faire sauter. Tout... Au lieu de donner des coups d’épingles."<br /></strong></ins></span>
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<p>Encore une belle surprise du côté de chez <strong>Belmondo</strong>, encore une fois là où je ne m'y attendais pas, après <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-homme-qui-me-plait-de-Claude-Lelouch-1969">Un homme qui me plaît</a></ins>. Bien au-delà du simple portrait d'un gentleman-cambrioleur, en l'occurrence particulièrement friand des intérieurs bien garnis de la haute société bourgeoise française à la fin du 19ème siècle (avec des coffres-forts, des armoires, des vitrines, des bureaux, formant un décorum très bien reconstitué : on pourrait presque y humer l'odeur du vieux bois), <ins>Le Voleur</ins> est aussi le portrait d'une solitude. Le personnage de <strong>Jean-Paul Belmondo </strong>évolue à travers une société en plein tumulte, gangrenée par un ordre bourgeois réactionnaire, corrompue par les rapports d'argent plus ou moins visibles. Sur ce terreau politique de choix, fatalement, la révolte fourmille dans les bas-fonds et l'anarchisme trace sa route. Le ton légèrement amer pour rendre compte de tout cela a quelque chose de très séduisant.</p>
<p>Autour du protagoniste, une flopée de seconds rôles impressionnante : chez les hommes, avec notamment <strong>Julien Guiomar </strong>dans le rôle délicieux de l'abbé Félix La Margelle et le voleur qui se cache sous la soutane, ainsi que <strong>Charles Denner </strong>dans celui de l'anarchiste Cannonier pour les plus marquants. Mais ce sont surtout des femmes, aux interprétations soignées, qui fourmillent : <strong>Geneviève Bujold</strong>, <strong>Marie Dubois</strong>, <strong>Françoise Fabian</strong>, la fugace <strong>Bernadette Lafont</strong> (vue dans <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Fiancee-du-pirate-de-Nelly-Kaplan-1969"><ins>La Fiancée du pirate</ins></a>), ainsi que <strong>Marlène Jobert</strong>. Toutes sont exquises et participent à la création d'une toile de fond politico-sentimentale de qualité.</p>
<p>On aurait pu imaginer un <strong>Robert Bresson </strong>sur le même thème, mais <strong>Louis Malle </strong>opte pour une démarche opposée à tout ce qui pourrait avoir trait à la Nouvelle Vague. C'est discret, économe, sans emphase, sans longs monologues, assez littéraire, parfois un peu trop pesant dans ses archétypes, mais sans que ce ne soit vraiment gênant. En filigrane, les conflits de classe de cette époque ressortent doucement, sur lesquels <strong>Belmondo </strong>surfe délicatement, sans se mouiller, en bon solitaire, presque nihiliste. Comme il le dira en expliquant sa méthode, "<em>Il y a des voleurs qui prennent mille précautions pour ne pas abîmer les meubles, moi pas. Il y en a d’autres qui remettent tout en place après leur visite, moi jamais. Je fais un sale métier, mais j’ai une excuse. Je le fais salement.</em>" Dans ce monde-là, les voleurs sont partout, plus ou moins avoués, plus ou moins dissimulés. Les séquences de cambriolage, mi-fétichistes mi-érotiques, exaltant tout le mépris du personnage pour la bourgeoisie, constituent une délicieuse cerise sur le gâteau d'une France capturée dans un magnifique élan mélancolique.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/voleur/.guiomar_m.jpg" alt="guiomar.jpg" title="guiomar.jpg, janv. 2019" /> <br />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/voleur/.lafont_m.jpg" alt="lafont.jpg" title="lafont.jpg, janv. 2019" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Voleur-de-Louis-Malle-1967#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/609Un homme qui me plaît, de Claude Lelouch (1969)urn:md5:77b2a99357272f35c0fbc9be51ed004c2019-01-24T15:19:00+01:002019-01-27T20:59:12+01:00RenaudCinémaAnnie GirardotClaude LelouchEtats-UnisJean-Paul BelmondoRomance <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/homme_qui_me_plait/.homme_qui_me_plait_m.jpg" alt="homme_qui_me_plait.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="homme_qui_me_plait.jpg, janv. 2019" /><div id="centrage">
<span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Les amants américains<br /></strong></ins></span>
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<p>La vertu de la persévérance... Ou, avec un peu moins de grandiloquence dans le ton, les surprises qui peuvent émailler des parcours plutôt masochistes. La filmographie de <strong>Claude Lelouch</strong> ne m'avait jamais particulièrement interpelé jusqu'à présent, à une exception près avec <strong>Lino Ventura</strong> au début des années 70 (<ins>La Bonne Année</ins>), et voilà une histoire romantique toute bête qui m'a cueilli sans crier gare, par la seule alchimie des deux protagonistes <strong>Belmondo </strong>/ <strong>Girardot</strong>. Un sentiment troublant, chez le cinéphile endurci au cœur de pierre, qui se fait rare. De plus en plus rare.</p>
<p>En marge d'un tournage hollywoodien, après avoir décrit de manière indépendante et très évasive les deux profils, deux personnages ponctuellement isolés se retrouvent et se rapprochent. Un compositeur, une actrice. Le scénario peut sur le papier faire penser à un autre film de <strong>Lelouch</strong>, <ins>Un homme et une femme</ins>, mais il ne m'avait à aucun moment séduit. Ici, la passion que semble vivre le couple se communique avec douceur et vigueur, avec un sens du naturel qui m'a impressionné, et avec une note d'amertume vivace bien que légèrement forcée sur la toute fin. Leur idylle à travers les États-Unis, avec quelques passages onirico-surréalistes (dont celui où des Indiens les pourchassent lors d'une virée en voiture), traîne en longueur de la même façon que ces rencontres que l'on voudrait ne jamais voir se terminer. À mi-chemin entre les amants et les touristes, partagé entre les mensonges aux conjoints, la soif de découverte et l'attirance grandissante, une alchimie à ses balbutiements naît sous nos yeux.</p>
<p>Dans le cadre de cet Ouest américain si connu, la mélancolie des relations a priori impossibles tisse le fil des complications sentimentales et adultères avec autant d'artificialité que de sincérité. Alors qu'ils semblent un peu paumés entre la peur et le désir, dans une retenue très appréciable, le naturel se fait peu à peu une place confortable. Un naturel vraiment étonnant chez les deux acteurs pour rendre compte de leur relation condamnée à l'échec avec une justesse très surprenante dans la peinture de cet état d'esprit, une sorte de fragilité au hasard des rencontres, perdue au milieu de décors de cartes postales.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/homme_qui_me_plait/.duo_m.jpg" alt="duo.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="duo.jpg, janv. 2019" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-homme-qui-me-plait-de-Claude-Lelouch-1969#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/608Voyage à travers le cinéma français, de Bertrand Tavernier (2016)urn:md5:66b55e36caf356bf7161867598e52cd92016-10-14T17:01:00+02:002016-10-14T17:19:33+02:00RenaudCinémaBertrand TavernierClaude ChabrolClaude SautetDocumentaireJacques BeckerJean GabinJean RenoirJean-Luc GodardJean-Paul BelmondoJean-Pierre MelvilleMarcel CarnéPierre Schoendoerffer <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/voyage_a_travers_le_cinema_francais/.voyage_a_travers_le_cinema_francais_m.jpg" alt="voyage_a_travers_le_cinema_francais.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="voyage_a_travers_le_cinema_francais.jpg, oct. 2016" /><div id="centrage"><p><span style="font-size: 18pt;"> <ins><strong>Le cinéma (français) retrouvé<br /></strong></ins></span></p>
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<p><strong>Bertrand Tavernier </strong>a vraiment beaucoup de talent pour parler du cinéma (français, en l'occurrence) qu'il affectionne. On pouvait déjà en avoir une petite idée, au détour d'une présentation de film dans laquelle il intervenait l'espace de quelques minutes, mais c'est une chose acquise suite à ce documentaire de plus de trois heures (qu'on ne voit pas passer). En évoquant son histoire du cinéma français, colorée par sa vision mais aussi ses conditions de visionnage, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il dresse presque autant son propre portrait que celui de quelques grands réalisateurs, acteurs, directeurs de la photo, scénaristes et autres compositeurs.</p>
<p>Le projet, qui n'en est qu'à son premier volet, ne s'adresse cependant pas à n'importe qui : avec ses 3h15, ses centaines d'extraits d'une centaine de films, et en circonscrivant son propos au cadre des années 30 à 70, il faut avoir un minimum de curiosité pour se lancer dans cette histoire. Mais à partir du moment où l'on est suffisamment curieux ou connaisseur (les deux approches sont possibles, différentes), le discours de <strong>Tavernier</strong>, peut-être plus cinéphile que cinéaste ici, s'emplit d'un enthousiasme très largement communicatif. Le voyage est bien sûr subjectif, bien mené, au fil de ses souvenirs et de ses premiers émois cinéphiles.</p>
<p>Du point de vue du cinéphile, on voyage à travers les filmographies de <strong>Jacques Becker</strong>, <strong>Jean Renoir</strong>, <strong>Marcel Carné</strong>, <strong>Jean Gabin</strong>, <strong>Claude Sautet</strong>, et celle des compositeurs <strong>Maurice Jaubert </strong>et <strong>Joseph Kosma </strong>comme autant de madeleines savoureuses. Il évoque plus rapidement certains autres noms (<strong>Claude Chabrol</strong>, <strong>Jean-Luc Godard</strong>), et parvient à susciter un intérêt immense pour des personnalités que l'on ne connaissait absolument pas (<strong>Eddie Constantine</strong>, pour ma part). L'ensemble est assez bien balancé entre contenu formel et anecdotes, entre l'enthousiasme pour certains films et le dégoût pour d'autres (de manière ponctuelle, forcément) : l'entendre raconter la réaction de <strong>Gabin </strong>à propos de <strong>Renoir </strong>est plutôt savoureux ("<em><strong>Renoir</strong>, comme metteur en scène : un génie. Comme homme : une pute</em>").</p>
<p>Du point de vue du cinéaste, Tavernier évoque ses débuts en tant qu'assistant de <strong>Jean-Pierre Melville</strong>, avant de devenir attaché de presse sur ses conseils. On s'amuse des querelles entre fortes personnalités (scénaristes, acteurs, réalisateurs, critiques), comme le scénariste <strong>Henri Jeanson </strong>qui fait semblant d'oublier le nom de <strong>Marcel Carné </strong>ou encore <strong>Jean-Paul Belmondo </strong>engueulant copieusement <strong>Melville </strong>au sujet de son manque de respect vis-à-vis du reste de l’équipe de tournage. Les anecdotes ne sont bien sûr par une fin en soi, mais elles éclairent parfois certaines personnalités, entre une leçon de mise en scène et une déclaration d’amour. Il évoque aussi des relations plus contrastées, comme celle qu’il entretint avec <strong>Pierre Schoendoerffer</strong>, et derrière laquelle on sent poindre de légères mais solides divergences de point de vue enveloppées dans un profond respect mutuel.</p>
<p>L’ensemble n’est pas irréprochable, mais l’enthousiasme et la gourmandise avec lesquels <strong>Tavernier </strong>nous invite à voyager se suffisent presque à eux seuls. On sort de ces trois heures avec une furieuse envie de découvrir de nombreux films et de nombreuses personnes : mission réussie.</p>
<br /><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/voyage_a_travers_le_cinema_francais/.tavernier_m.jpg" alt="tavernier.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="tavernier.jpg, oct. 2016" /><br />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Voyage-a-travers-le-cin%C3%A9ma-francais-de-Bertrand-Tavernier-2016#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/359