Je m'attarde - Mot-clé - Journalisme le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearJe n'oublie pas cette nuit, de Kōzaburō Yoshimura (1962)urn:md5:ad851a8f16bb3d1a2eaeaaf985a41fce2023-08-16T10:21:00+02:002023-08-16T10:21:00+02:00RenaudCinémaAyako WakaoBombe atomiqueHiroshimaJaponJournalismeRomanceTraumatisme <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_night_to_remember/.a_night_to_remember_m.jpg" alt="a_night_to_remember.jpg, juil. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Cicatrices et tragédies enfouies </strong></ins></span>
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<p>Il y a des films qui ne valent presque que pour une scène, pour un détail, pour une particularité, et <ins>Sono yo wa wasurenai</ins> est de ceux-là pour moi, même si ses qualités dépassent largement ce petit ilot émotionnel. Une séquence située à la fin de l'avant-dernière partie se matérialise comme une explosion atomique, au sens propre (ce qui est montré à l'écran) comme au sens figuré (ce que ressent le protagoniste), tandis que <strong>Ayako Wakao </strong>révèle un secret intime enfoui à un journaliste rencontré alors qu'il enquêtait péniblement sur les effets de la bombe larguée sur Hiroshima 17 ans auparavant. Cette scène, cette image, persistera longtemps après le visionnage, aux côtés de quelques autres du même niveau de suggestion explosive.</p>
<p>C'est sans conviction que l'intrigue démarre, en 1962, avec le reportage que doit réaliser un journaliste sur les lieux de l'explosion nucléaire, en prévision d'une célébration annuelle du bombardement du 6 août 1945. Il arpente les rues et les commerces non sans un certain désespoir : tous les habitants semblent s'être parfaitement adaptés, et la vie a repris son cours normal. Les rencontres qu'il fait avec quelques personnes ayant des séquelles physiques visibles sur le visage et manifestant un sentiment de résignation joyeuse le poussent à penser que le sujet est particulièrement mal choisi. Ici on travaille, on danse, on s'amuse comme n'importe quelle ville japonaise. On en viendrait presque à penser que le traumatisme relève de la science-fiction, qu'il ne s'est rien passé ou que les traces du passé ont été soigneusement effacées.</p>
<p>Et puis il y a cette rencontre avec <strong>Ayako Wakao</strong>, une femme qui était présente à Hiroshima en 1945 et qui ne paraît pas différente des autres dans son comportement. Une relation se noue, une romance naît, mais quelque chose semble la retenir.</p>
<p>Sans réelle surprise, le charme de l'actrice et la pudeur de son élégance servent admirablement le propos du film, faisant d'elle une allégorie vivante de l'horreur nucléaire passée et de la ville dans son ensemble — elle aussi essaie de dissimuler les cicatrices du passé en embrassant pleinement une nouvelle vie. Très loin des approches comme <ins>Pluie noire</ins> de <strong>Shôhei Imamura</strong> que l'on pourrait qualifier de brutales, la mort est dissimulée autant que possible, reléguée dans des souvenirs à oublier et sous les tissus des kimonos. Le contraste entre l'apparente quiétude générale et les drames personnels souterrains explosera lors de la scène centrale, et il suffira d'entrouvrir le kimono d'une femme pour laisser exploser tout le potentiel mélodramatique du film, à la faveur d'une surimpression monumentale.</p>
<p>L'épilogue ne sera pas en reste de ce point de vue-là, avec le symbole des pierres qui s'effritent, rappelant l'horreur des corps sublimés. L'image est déchirante autant qu'obsédante, révélatrice d'une myriade de tragédies enfouies.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_night_to_remember/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, juil. 2023" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_night_to_remember/.img6_m.jpg" alt="img6.jpg, juil. 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Je-n-oublie-pas-cette-nuit-de-Kozaburo-Yoshimura-1962#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1212The Laughing Man, de Walter Heynowski et Gerhard Scheumann (1966)urn:md5:2fd3e3db053854f0d5278037029776402023-08-13T00:15:00+02:002023-08-13T00:15:00+02:00RenaudCinémaAllemagneCongoDocumentaireJournalismeMilitaireNazismeSeconde Guerre mondiale <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/laughing_man/.laughing_man_m.jpg" alt="laughing_man.jpg, juil. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Müller au Congo : "for liberté, fraternité and all that, you know these sayings..."</strong></ins></span>
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<p>Le format du docu est on ne peut plus simple : <strong>Walter Heynowski </strong>et <strong>Gerhard Scheumann</strong>, deux journalistes en RDA, se font passer pour une chaîne télé ouest-allemande et interviewent à cette occupation <strong>Siegfried Müller</strong>, également connu sous le nom Kongo Müller — un officier allemand, ancien nazi ayant combattu dans la Wehrmacht pendant la Seconde Guerre mondiale, puis comme chef d'un groupe de mercenaires engagé dans la guerre civile du Congo dans les années 60.</p>
<p>Le résultat est tout aussi clair : une heure durant, l'alcool aidant, l'homme raconte sans trop de retenue son parcours militaire et sa conception de la géopolitique du milieu du XXe siècle. Et c'est glaçant, car cet homme qui rit est un de ces personnages illustrant à merveille ces fois où la fiction dépasse allègrement la réalité, un militaire parfaitement à l'aise, suscitant presque une certaine sympathie si on n'écoute pas ce qu'il raconte et tous ses mensonges qui cachent péniblement des horreurs atroces — des inserts photos et des témoignages externes rajoutés au montage sont là pour établir cette triste vérité.</p>
<p>On est dans la droite lignée de ces films documentaires qui regardent en face ceux qui ont donné la mort, dans un style certes beaucoup moins élaboré (il s'agit d'un entretien très classique) : <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/The-Act-of-Killing-de-Joshua-Oppenheimer-2013"><ins>The Act of Killing</ins></a> de <strong>Joshua Oppenheimer </strong>en 2013 sur un massacre indonésien et <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-armee-de-l-empereur-s-avance-de-Kazuo-Hara-1987">L'armée de l'empereur s'avance</a></ins> de <ins>Kazuo Hara </ins>en 1988 sur un incident macabre en Nouvelle-Guinée y sont étroitement liés. Fringant, posé, en toute décontraction, mis à l'aise par le procédé utilisé par <strong>Heynowski </strong>et <strong>Scheumann </strong>(dont la finalité m'échappe un peu je dois l'avouer), <strong>Müller </strong>nous narre tranquillement et jovialement ses faits d'armes. De manière non-chronologique, il évoque ses pérégrinations (comprendre : exactions) au Congo, son aspiration à un impérialisme occidental qu'il exprime comme la défense d'un système de valeurs (raciste, en l'occurrence, sur fond d'anti-communisme) partagé via l'OTAN, son soutien au régime d'apartheid sud-africain ("for liberté, fraternité and all that, you know these sayings...") et bien sûr sa carrière à travers les âges dans l'Allemagne nazie. À ce titre <ins>The Laughing Man</ins> offre une vision assez troublante de la continuité, jamais nommée ici, entre le nazisme déclinant et l'impérialisme occidental en expansion en Afrique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.</p>
<p>Le visage de cet homme en tenue de l'armée congolaise, arborant la croix de fer qu'il a obtenue en 1945, parlant avec beaucoup d'affection de son camarade qu'on peut voir fièrement poser pour la photo avec des crânes, est vraiment terrible. D'autant que loin de se vanter des atrocités commises, il avance dissimulé derrière le voile mensonger d'actions prétendument pacifiques. Comme une excroissance émanant de l'échec de la dénazification, on n'est pas étonné qu'il fasse le lapsus Troisième Reich / RFA.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/laughing_man/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, juil. 2023" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/laughing_man/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, juil. 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/The-Laughing-Man-de-Walter-Heynowski-et-Gerhard-Scheumann-1966#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1211Une vie difficile, de Dino Risi (1961)urn:md5:ecab0f32298fcf12bb5eb6b087a877bd2023-06-21T12:20:00+02:002023-06-21T11:25:46+02:00RenaudCinémaAlberto SordiCompromissionComédieDino RisiDésillusionFamilleGuerreIdéalismeItalieJournalismeLea MassariPolitiquePrisonRésistanceSeconde Guerre mondialeVittorio Gassman <div id="centrage"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/une_vie_difficile/.une_vie_difficile_m.jpg" alt="une_vie_difficileB, juin 2023" title="une_vie_difficileB" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/une_vie_difficile/.une_vie_difficileB_m.png" alt="une_vie_difficileB.png, juin 2023" /></div>
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Sordi galère</strong></ins></span>
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<p>Le duo <strong>Dino Risi </strong>/ <strong>Alberto Sordi </strong>trouve un équilibre assez fascinant à mes yeux au sein de la comédie italienne de la grande époque, que ce soit dans les tonalités adoptées (comédie, drame, guerre, historique, critique sociale), dans la diversité des coups portés (médiocrité intellectuelle des uns, arrivisme des autres, sur fond de chronique nationale très caustique) et dans la finesse de l'écrin qui encapsule l'ensemble (photographie impeccable, nombreuses séquences marquantes par leur bouffonnerie ou leur dimension tragique). Dans <ins>Une vie difficile</ins>, le personnage principal parcourt un bout d'histoire italienne du milieu de la Seconde Guerre mondiale jusqu'aux années 60 (le film sort en 1961) en endossant les costumes de résistant antifasciste ou de rédacteur dans un journal clandestin, constamment sous le regard d'une jeune femme qui le renverra systématiquement à ses compromissions.</p>
<p>C'est clairement la dynamique de leurs rapports qui irrigue en secret le récit, oscillant sans cesse entre des phases d'attirance et de répulsion. À chaque compromission, à chaque manifestation de sa veulerie passagère, un regard foudroyant de <strong>Lea Massari </strong>vient le rappeler à l'ordre, et le voilà reparti sur des rails, pendant un certain temps du moins. <strong>Risi </strong>s'applique à montrer comment l'intégrité de <strong>Sordi </strong>se solde systématiquement par des mésaventures (professionnelles ou financières, pauvreté ou prison), de manière certes un peu systématique, mais toujours avec un pied dans la comédie pour huiler la mécanique. Les scènes mémorables sont assez nombreuses, celle où complètement bourré il crache sur les voitures des riches touristes, celle où dans un moment de misère il se faufile dans une maison bourgeoise et monarchiste avec sa femme pour se remplir la panse grassement (pendant le référendum qui installera la république), ou encore cette claque finale pour mettre un terme à une énième humiliation de la part de son employeur, un riche homme d'affaires. Mais <strong>Risi </strong>reste très lucide : le happy end n'en est pas du tout un, on sait très bien qu'il ne s'agit que d'une phase "positive" avant la prochaine rechute.</p>
<p>Dans cette optique <strong>Alberto Sordi </strong>compose un rôle vraiment attachant, un enthousiaste de son époque participant à toutes les luttes et baignant dans un idéalisme à géométrie variable, mais dans le fond très honnête. Parfois pathétique, parfois vertueux, parfois minable. Juste très maladroit et à ce titre victime des aléas caractéristiques de la société italienne d'après-guerre : libération, élections, renouveau économique (drôle d'apparition de <strong>Vittorio Gassman </strong>dans un péplum), et diverses déceptions politiques sur fond d'opposition nord / sud entre les différentes régions. La dynamique de la narration maîtrise la rupture de tons avec malice, alternant entre gravité (on frôle l'exécution pendant la guerre) et situations plus ironiques ou émouvantes. L'histoire d'un homme doté d'idéaux, mais soumis à une pression extrême de la part des secteurs économiques, familiaux et politiques qui le conduira d'échec en échec, en essayant de ne jamais perdre la face. Du néoréalisme classique gonflé à la comédie burlesque et aux désillusions tenaces, en un sens.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/une_vie_difficile/.img1_m.png" alt="img1.png, juin 2023" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/une_vie_difficile/.img4_m.png" alt="img4.png, juin 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Une-vie-difficile-de-Dino-Risi-1961#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1170Les Vampires, de Louis Feuillade (1915)urn:md5:3c38ae7da6605d5e6fbc94ca41c645ad2023-05-22T09:51:00+02:002023-05-22T09:05:32+02:00RenaudCinémaEnlèvementEvasionJournalismeLouis FeuilladeMeurtreParisSérial <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/vampires/.vampires_m.jpg" alt="vampires.jpg, mai 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Voltige, poison et gros canon</strong></ins></span>
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<p>On n'aborde pas l'immersion dans des aventures rocambolesques (pour l'époque) de près de huit heures issues du début du siècle dernier comme beaucoup d'autres films, il faut le reconnaître. Pourtant, chose très étonnante, les 10 épisodes qui constituent <ins>Les Vampires</ins> défilent avec une fluidité notable, quand bien même on noterait une hétérogénéité évidente en matière de qualité et de dynamique. Les sentiments sont très contrastés au cours de ce long visionnage, et en ce qui me concerne ils ont été largement dominés par un plaisir constant devant ces innombrables péripéties produites au milieu des années 1910. L'expérience étant très singulière et le format muet courant sur de longues heures, on peut affirmer sans trop prendre de risques que tout le monde n'y trouvera pas son compte...</p>
<p>Il y a vraiment de tout dans ce sérial, comme peuvent le laisser présager les titres de certains épisodes : "La Tête coupée", "La Bague qui tue", "Le Cryptogramme rouge", "L'Homme des poisons" ou encore "Les Noces sanglantes". Les agissements d'une société secrète connue sous le nom des vampires éponymes constituent un prétexte à l'exploration de Paris dans les années 1910, à mesure que les meurtres et les enlèvements se multiplient aux quatre coins de la ville qu'on parcourt à pied, à vélo ou en voiture (et plutôt deux fois qu'une, à partir d'un moment ces déplacements deviennent presque des running gags, malheureusement un peu lourds car trop longs). La police est à l'ouest et c'est essentiellement l'enquête menée par le journaliste Guérande qui fait tout le sel de l'histoire, aidé en cela par un ex-vampire prénommé Mazamette — lui aussi plutôt lourd dans la multiplicité de ses clins d'œil caméra pour indiquer au spectateur que bon, on la lui fait pas à lui, hein.</p>
<p>L'occasion de se plonger aussi dans une esthétique qui nourrit un onirisme poétique parfois totalement délirant, avec tout un pan que l'on pourrait relier à l'expressionnisme allemand de <strong>Lang </strong>(au travers de ses films faisant intervenir le personnage machiavélique du Docteur Mabuse notamment) et d'autres aspects sidérants soit par leur violence, avec des mises à mort brutales, soit par leur ampleur, à l'instar de la grande fête bourgeoise bouleversée par les vampires qui asphyxient tout le monde pour détrousser tout ce beau monde — magnifique plan où deux portes s'ouvrent dans l'arrière-plan une fois que tous ont perdu connaissance, pour laisser passer des silhouettes inquiétantes. L'intervention finale de la police, digne d'un assaut du GIGN, est assez marquante également : pas de quartier, la violence est sèche et préméditée.</p>
<p>Bon, il ne faut pas être regardant sur la cohérence de l'intrigue, tant le scénario est perforé de toutes parts au gré des comportements improbables d'à peu près toutes les parties prenantes. Le charme de <strong>Musidora </strong>en collants noirs moulants est assez discutable dans la peau d'Irma Vep, beaucoup de séquences dialoguées (oui oui, on est pourtant dans un muet) traînent de manière démesurée, mais il y a énormément de panache dans <ins>Les Vampires</ins>, beaucoup de bizarreries d'un autre temps comme issues d'un autre monde (Satanas qui détruit des bâtiments et des bateaux avec son canon perso qu'il actionne de temps en temps par sa fenêtre, je n'en suis toujours pas revenu), beaucoup de séquences acrobatiques avec des voltigeurs en tous genres pour animer des évasions, des assassinats et autres coups de théâtre... Une curiosité historique passionnante pour peu qu'on ait la faiblesse d'y être sensible, qu'on ne soit pas rebuté par des questions formelles et qu'on ose s'y aventurer.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/vampires/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, mai 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/vampires/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, mai 2023" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/vampires/.img7_m.jpg" alt="img7.jpg, mai 2023" />
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Vampires-de-Louis-Feuillade-1915#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1159Plus dure sera la chute, de Mark Robson (1956)urn:md5:671770d43138fda8b2f12aff64e721352022-09-22T10:06:00+02:002022-09-22T09:28:32+02:00RenaudCinémaArgentineBoxeCompromissionCorruptionFilm noirHumphrey BogartJournalismeMark RobsonMensongeRod SteigerSport <div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.plus_dure_sera_la_chute_m.jpg" alt="plus_dure_sera_la_chute.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.plus_dure_sera_la_chuteB_m.jpg" alt="plus_dure_sera_la_chuteB.jpg, août 2022" />
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<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"The people sit in front of their little TVs with their bellies full of beer and fall asleep."<br /></strong></ins></span>
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<p>7 ans après <ins>Champion</ins>, <strong>Mark Robson</strong> remet le couvert de l'univers de la boxe et opère un changement de paradigme notable en se focalisant non plus sur le ring et le boxeur incarné par <strong>Kirk Douglas </strong>en 1949 mais sur l'envers du décor avec <strong>Humphrey Bogart </strong>en promoteur opportuniste d'un boxeur amateur. On le comprend très vite, on va naviguer dans des eaux plus que troubles, carrément dégueulasses, avec un ballet incessant de magouilles et de compromissions formant l'ossature d'un film noir très élégant.</p>
<p>Le parti pris est intéressant et efficace, car on pénètre dans cet univers aux côtés d'un personnage manifestement amoral, <strong>Bogart</strong>, présenté comme arriviste, un journaliste sportif appâté par le gain et par les beaux discours de <strong>Rod Steiger </strong>— parfait en manager véreux, généreux en apparence quand tout va bien et rapidement menaçant quand le vent tourne : "<em>The people, Eddie, the people! Don't tell me about the people, Eddie. The people sit in front of their little TVs with their bellies full of beer and fall asleep</em>". Pas de manichéisme ici, il est présenté dans toutes les teintes de sa personnalité et si l'on met de côté les magouilles évidentes et bien conscientes des matches truqués, on pourrait croire qu'il s'agit d'un ange gardien très maternel avec son jeune poulain de 2 mètres et 120 kilos en provenance d'Argentine. Le point névralgique : il ne sait pas boxer et en définitive <ins>The Harder They Fall</ins> est avant tout l'histoire d'un mensonge autour de cette montagne, champion de boxe qui n'a en réalité jamais fait ses preuves mais dont on est parvenu à rendre les capacités inquestionnables. Du beau business.</p>
<p>Le duo <strong>Steiger </strong>baragouineur et <strong>Bogart </strong>usé pour sa dernière apparition avant de mourir l'année suivante fonctionne très bien, et le film s'inscrit agréablement dans la veine des dénonciations de la décennie, ici sur les mécanismes de la corruption et les ravage des compromissions dans le milieu de la boxe (inspiré d'un véritable boxeur, italien, Primo Carnera). Tout le film peut se regarder sur un ton léger jusqu'à un point de non-retour assez effrayant, le combat de trop, l'affrontement final qui vire à la boucherie et qui transforme le visage du faux champion en champ de bataille ravagé par les coups de poing de son adverse. Il passe sous un rouleau compresseur et ce n'est pas beau à voir — à tel point que cela suscite un sursaut de conscience chez <strong>Bogart</strong>, on le comprend, alimentant ainsi un discours social sur le massacre des boxeurs qui finissent, au choix, à la morgue, exploités par leurs manageurs, ou clochards dans la rue.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/plus_dure_sera_la_chute/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, août 2022" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Plus-dure-sera-la-chute-de-Mark-Robson-1956#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1069La Machine, de Paul Vecchiali (1977)urn:md5:893ce62a8505400a03372693591e2d382021-03-25T10:11:00+01:002021-03-25T10:13:13+01:00RenaudCinémaEnfanceFranceJournalismeMeurtreMédiasPeine de mortTélévision <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/machine/.machine_m.jpg" alt="machine.jpg, fév. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Capsule temporelle<br /></strong></ins></span></div>
<p>Un film sale, sombre et glaçant, retraçant le parcours judiciaire d'un homme jugé pour le meurtre d'une enfant. La toile de fond est la France giscardienne des années 70, et le sujet qui émerge d'un bout à l'autre de <ins>La Machine</ins> est la peine de mort, à une époque où son abolition paraissait bien loin : c'est une des qualités importantes du film, qui immerge dans ce référentiel-là à l'aide de (faux) reportages télévisuels, d'articles de journaux, de vielles images de vieux téléviseurs, d'interviews d'inconnus et de personnages publics — bien qu'inspirés d'affaires contemporaines au film. Une bonne moitié du film est ainsi constituée de ces matériaux faisant l'effet d'une capsule temporelle, et l'autre moitié est consacrée au portrait du meurtrier Pierre Lentier, un ouvrier trentenaire que personne ne connaissait vraiment, et visiblement pas même son entourage. Dans un style très proche d'un <strong>Bresson</strong>, <strong>Paul Vacchiali</strong> s'engouffre dans une narration et dans une tonalité qui font largement exception dans le paysage du cinéma français, entre autres celui des 70s.</p>
<p>La laideur de la pellicule est à double tranchant, car elle isole le contenu dans une ambiance de téléfilm tout en ajoutant de l'intensité aux événements glauques qui sont rapportés. Très peu d'effets de suspense : on découvre très vite le cadavre d'une fille de huit ans, le principal suspect est clairement identifié malgré une introduction brouillant les pistes (l'enregistrement d'informations sur l'état civil d'un homme alors inconnu), et il avoue son crime. Mais il n'en donnera pas les raisons, ou du moins pas de manière claire. <ins>La Machine</ins> dresse le tableau d'une machine médiatique et judiciaire, met en scène la manipulation de l'opinion publique selon toutes les directions envisageables, mais se trouve quelque peu empêtré dans un style désuet et des intentions un peu maladroitement exécutées (notamment sur la mise en cause de la société). Il y a les juges, les psychologues, la famille, les représentants d'associations, les passants anonymes, et tous ont un avis. Un malaise se distille tout le long du film et file tout droit vers le plan-séquence final, étrange écho à celui de <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Monsieur-Verdoux-de-Charlie-Chaplin-1947"><ins>Monsieur Verdoux</ins></a>, d'une sécheresse glaçante.</p>
<p>Maladroit, vieillot, approximatif, mais une curiosité intéressante d'un point de vue historico-cinématographique.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/machine/.reconstitution_m.jpg" alt="reconstitution.jpg, fév. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/machine/.tele_m.jpg" alt="tele.jpg, fév. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Machine-de-Paul-Vecchiali-1977#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/922À cause d'un assassinat, de Alan J. Pakula (1974)urn:md5:f3d14f8f7385830ef54763c4d1df15712020-04-30T15:59:00+02:002020-05-03T17:50:25+02:00RenaudCinémaAssassinatComplotJean-Baptiste ThoretJournalismeMeurtreWarren Beatty <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_cause_d-un_assassinat/.a_cause_d-un_assassinat_m.jpg" alt="a_cause_d-un_assassinat.jpg, avr. 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" /><div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"There is no evidence of a conspiracy. Those are our findings. There will be no questions."</strong></ins></span>
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<p>Dans sa dimension kaléidoscopique de film paranoïaque, <ins>À cause d'un assassinat</ins> est un excellent représentant de toute une frange du cinéma américain des années 70, de son époque, de son climat, de ses angoisses, de ses lubies. Quand on fait référence aux 70s américaines et aux lubies cinéphiles, difficile de ne pas penser au chantre du Nouvel Hollywood en France qu'est <strong>Jean-Baptiste Thoret </strong>et au torrent de films qui abreuve le sillon du complot, de <ins>Conversation secrète</ins> à <ins>Les Trois Jours du Condor</ins> en passant par <ins>Les Hommes du président</ins>, <ins>Marathon Man</ins>, et pourquoi pas <ins>L'Invasion des profanateurs</ins>, avec les pendants européens que sont <ins>Z</ins> et <ins>I... comme Icare</ins>. On pourrait l'écouter pendant des heures (et c'est possible : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=6k-P2p2mC9Y">https://www.youtube.com/watch?v=6k-P2p2mC9Y</a>) théoriser sur le façonnage d'un pan entier du cinéma américain par seulement quelques photogrammes d'un film amateur qui captèrent de manière involontaire l'assassinat d'un président en 1963 — avec tout ce qui suivit, l'assassinat de son assassin Lee Harvey Oswald, l'assassinat de son frère Robert Kennedy, etc.</p>
<p>De fait, il suffit de se replonger un minimum dans ces événements (et dans ces images) pour combler les 50 ans qui nous séparent de l'époque du film et constater une évidence : cette imagerie populaire contemporaine aux années 70 irrigue une grande partie du film, à commencer par la séquence introductive et ses innombrables ressemblances, symboles et références, en lien avec les meurtres des frères Kennedy. En découle ainsi, infusé dans le tissu de la fiction, un climat parfaitement paranoïaque qui ira bien au-delà du simple film politique. Il serait toutefois biaisé de ne pas prendre en considération le contexte national très lourd de 1974, en plein séisme du Watergate et dans un pays déchiré par la guerre du Vietnam. Mais la trajectoire du film, tant au niveau thématique qu'esthétique, donne envie de creuser encore un peu plus.</p>
<p>On peut d'ailleurs s'attarder un instant sur les titres français et anglais, qui mettent l'accent sur deux aspects totalement différents : là où la formule "à cause d'un assassinat" renvoie à l'enchaînement presque fataliste des événements qui structurent et articulent le scénario du thriller, la formulation presque mystérieuse "the parallax view" renvoie à un autre niveau de lecture en soulignant la plurivocité presque constitutive de ces événements, selon le point de vue qu'on adopte, selon la connaissance et l'effet de cette parallaxe, précisément. Quelle que soit la position retenue, le film surprend d'abord par cette dissonance progressive qui s'installe durablement, et fortement, en se répandant dans toutes les strates du récit, dans l'attitude du protagoniste incarné par <strong>Warren Beatty </strong>(dont l'inexpression curieuse joue en faveur de son rôle ici) et dans la mise en scène. Cette dernière trouvera son apogée dans l'ultime séquence du film, remarquable de suggestions et de sensations, avec son célèbre cadrage extrêmement large dans une salle de convention qui confine les hommes au statut de petites fourmis quasiment invisibles dans le plan, s'affairant autour d'un politicien assassiné, mais aussi cette façon de filmer l'action en hauteur, sur des passerelles supérieures plongées dans une pénombre presque complète, stylisée à l'extrême, versant presque dans le giallo et le fantastique.</p>
<p>La thématique de l'invisible, entre imperceptible et insaisissable, est à ce titre largement présente, non pas au travers d'une institution classique de type CIA mais dans les agissements d'une mystérieuse organisation alimentant un réseau de tueurs. On ignorera son fonctionnement et ses motivations dans les grandes largeurs, seulement perceptibles dans le résultat des assassinats et dans le spectre de la surveillance (autre motif classique du cinéma américain contestataire des 70s) qu'elle fait planer. Le dérèglement au centre de <ins>À cause d'un assassinat</ins>, orchestré soigneusement si l'on excepte quelques éléments bizarroïdes et invraisemblables de scénario, semble converger vers la scène centrale de la "reprogrammation" du protagoniste, alors qu'il enquête sur cette organisation. 5 longues minutes exclusivement à destination du spectateur, digne du lavage de cerveau d'Alex dans la thérapie révolutionnaire qu'il subit dans <ins>Orange Mécanique</ins>, au cours desquelles une série d'images-concepts viendra construire pour mieux déconstruire ensuite une série de grandes valeurs, l'amour, le père et la mère, le bonheur et l'ennemi, dieu et la nation, avec des références directes à la Maison blanche, le Ku Klux Klan, et même l'assassinat de Lee Harvey Oswald. À partir de ce moment-là, <strong>Warren Beatty </strong>disparaîtra peu à peu de l'écran, absorbé par sa tâche comme par la pellicule, laissant la séquence finale sans explication unilatérale (une programmation de type <ins>The Manchurian Candidate</ins> de <strong>Frankenheimer </strong>reste envisageable). Une scène hypnotisante et hautement symbolique, au même titre que ces deux séquences qui entrent en résonance, dans lesquelles un semblant de justice est rendu, au début et à la fin du film, en travelling avant puis arrière, mais qui ne font qu'alimenter le doute et le complot.</p>
<p>L'angoisse latente de ce qui peut s'apparenter à un exercice de style, au-delà de tous ses défauts, est aussi intrigante qu'éprouvante et passionnante.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_cause_d-un_assassinat/.toit_m.jpg" alt="toit.jpg, avr. 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_cause_d-un_assassinat/.convention_m.jpg" alt="convention.jpg, avr. 2020" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/a_cause_d-un_assassinat/.justice_m.jpg" alt="justice.jpg, avr. 2020" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/A-cause-d-un-assassinat-de-Alan-J-Pakula-1974#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/769