Je m'attarde - Mot-clé - Robert Wiene le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearKrysar, le joueur de flûte (Krysař), de Jiří Barta (1986)urn:md5:d0e3ae4b2f71108a628e99c42749ec992023-09-22T17:26:00+02:002023-09-22T16:27:15+02:00RenaudCinémaAllemagneAnimationArgentBoisCupiditéFlûteGothiqueJan ŠvankmajerMaladieMensongeMoyen ÂgeMéprisRatRobert WieneRépublique tchèqueStop-motionSymbolismeVengeance <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.krysar_le_joueur_de_flute_m.jpg" alt="krysar_le_joueur_de_flute.jpg, août 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Du bois gothique</strong></ins></span>
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<p><strong>Jiri Barta </strong>a très probablement vu beaucoup de films d'animation de <strong>Jan Švankmajer </strong>avant de réaliser <ins>Krysař</ins>, une adaptation en stop-motion de la légende médiévale allemande du <ins>Joueur de flûte de Hamelin</ins>. Cela ne l'empêche absolument pas de parvenir à créer une bulle d'originalité qui lui est propre, à l'intérieur du cinéma d'animation tchécoslovaque de la deuxième moitié du XXe siècle. L'histoire est connue, celle d'un mystérieux joueur de flûte à qui l'on promet une forte somme d'argent en échange de son aide pour débarrasser la ville de la horde de rats qui l'infeste, mais que les notables traitent avec mépris une fois la tâche ingrate accomplie. Et il se vengera... En sachant que la nature de la vengeance varie selon les versions, mais quoi qu'il en soit la fin n'est pas heureuse et entérine froidement la tonalité macabre qui s'est installée durant tout le récit.</p>
<p><ins>Krysar, le joueur de flûte</ins> trouve sa singularité dans la composition même de son support physique pour le stop-motion, presque entièrement déterminée par le choix du matériau : les personnages et une partie des décors sont taillés dans le bois, leur conférant des formes anguleuses qui s'accordent particulièrement bien avec la nature du récit. Pour figurer l'ambiance dans la ville de Hamelin au XIIIe siècle, une multitude d'accessoires vient compléter les poupées de bois et les demeures des différents personnages pour illustrer certains partis pris en lien avec l'atmosphère sombre qui y règne. La majeure partie des habitants est ainsi représentée comme cupide, brutale et névrosée, avec un festival de séquences les montrant en train de ripailler salement, de se comporter comme des animaux sur la place du village, ou encore de manifester tous les signes apparents d'avarice en cachant toutes leurs richesses dans des contenants divers fermés à clés. L'atmosphère est très cohérente et réussie de ce point de vue-là, sans que l'animation n'atteigne des sommets comme <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Mad-God-de-Phil-Tippett-2021">Mad God</a></ins> de <strong>Phil Tippett</strong> (sorti 35 ans plus tard tout de même, la comparaison a ses limites).</p>
<p>De temps en temps la concentration en stéréotypes devient un peu excessive, au-delà de ce que ce format tolère à mes yeux, à l'image des dialogues entre les personnages figurés par des écus qui sortent de leur bouche — il n'y a pas de "vrais" dialogues, parlés, dans ce film. Bien sûr la symbolique des rats (avec quelques inserts de vrais animaux) qui envahissent la ville est très forte, mais elle complète assez bien l'ambiance gothique médiévale des ruelles étroites et des arches gothiques menaçantes, et permet de refermer l'histoire sur un mouvement franchement sordide. L'ambiance générale, avec ses couleurs et ses lumières, constitue ainsi quelque chose de vraiment saisissant, inspirée par l'univers de <strong>Robert Wiene </strong>(<ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Cabinet-du-docteur-Caligari-de-Robert-Wiene-1920">Le Cabinet du Docteur Caligari</a></ins> est une référence directe, citée par le réalisateur).</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, août 2023" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, août 2023" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/krysar_le_joueur_de_flute/.img6_m.jpg" alt="img6.jpg, août 2023" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Krysar-le-joueur-de-flute-de-Jiri-Barta-1986#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1237Le Cabinet du docteur Caligari, de Robert Wiene (1920)urn:md5:3f4f0b13491e6e33895c6b4a7db98c8b2020-05-19T19:43:00+02:002020-05-19T19:43:00+02:00RenaudCinémaAllemagneAsileExpressionnismeFolieHorreurRobert Wiene <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/cabinet_du_docteur_caligari/.cabinet_du_docteur_caligari_m.jpg" alt="cabinet_du_docteur_caligari.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="cabinet_du_docteur_caligari.jpg, juil. 2019" /><div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"La faute qui consiste à photographier platement des décors excentriques."</strong></ins></span>
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<p>Le bon côté d'entretenir des lacunes dans le temps, c'est qu'on se réserve la possibilité de prendre de jolies claques en dépit de l'épaisseur de la carapace que l'on se construit inexorablement. De telles épiphanies après tant d'années de boulimie cinéphile, c'est aussi inattendu que rassurant. [À noter que cette remarque reste valable encore un an après son écriture...]</p>
<p>Un siècle plus tard, le jeu des récits encastrés fonctionne encore. Je ne sais pas s'il s'agit du premier film raconté à la première personne, au sens où l'univers qui nous est décrit est profondément déformé par la subjectivité du narrateur (un fou, qui plus est), ni s'il s'agit du premier twist de l'histoire du cinéma, mais le résultat est le même : on est totalement aspiré dans cette spirale expressionniste qui emporte tout sur son passage. On en revient d'ailleurs à la définition même de l’expressionnisme, la retranscription d'une réalité altérée par l'expression d'une subjectivité, et à la matrice du genre horrifique, avec des thématiques, des expressions, et des graphismes qui hanteront les cent années de cinéma à venir. Ce n'est pas tous les jours qu'on tombe sur de telles pépites, c'est un peu comme assister à une naissance, ou à la naissance d'une révolution.</p>
<p>Une fois passées les cinq premières minutes du prologue lançant l'essentiel du film à travers un flashback, on pénètre dans un univers complètement cinglé, composé en grande partie de décors particulièrement oppressants signés <strong>Hermann Warm</strong>. Du sol au plafond, les surfaces sont barbouillées d'inscriptions étranges, les murs obliques offrent des perspectives abstraites et saillantes (les angles sont incroyablement aigus) évoquant une forme de cubisme dégénéré, les proportions semblent parfaitement irrationnelles... Décors que l'on peut d'ailleurs voir sous toutes leurs coutures à l'occasion de quelques entretiens avec <strong>Henri Langlois</strong>, mis en ligne par la Cinémathèque à la faveur du confinement. Cette ville en carton-pâte pourrait être d'un mauvais goût absolu, et pourtant l'ambiance angoissante tourne à plein régime. Une certaine vision de l'horreur, donc, un délire généré par un cerveau malade, ou du moins présenté comme tel : Francis, on l'apprendra plus tard, est résident d'un asile psychiatrique. Sauf que le directeur de l'établissement a les traits du docteur Caligari, le marionnettiste aux plans machiavéliques contrôlant un pauvre somnambule dans son histoire, et l'intérieur de l'asile présente les mêmes aberrations géométriques que dans son cauchemar. Cesare, la "créature" (cf <ins>Frankenstein</ins>, <ins>Nosferatu</ins>, etc.) effrayante contrôlée par Caligari, n'est en réalité qu'un simple résident discret de l'asile comme Francis. La scène où il ouvre les yeux pour la première fois a quelque chose de radicalement effrayant.</p>
<p>Histoire de fou racontée par un fou total ou bien par un fou dont la conscience se serait réveillée, on ne saura pas. On pourrait même y voir un simple exercice de style, pour peu qu'on ne soit pas hypnotisé par cet univers horrifique. <strong>Robert Wiene </strong>ne faisait pas l'unanimité à l'époque : <strong>Jean Cocteau </strong>dira que "<em>Caligari est le premier pas vers une faute qui consiste à photographier platement des décors excentriques, au lieu d'obtenir des surprises par l'appareil de prise de vues</em>". On reconnaît là le réalisateur d'<ins>Orphée</ins>, œuvre relativement peu accessible qui peut susciter une fascination similaire, bien que très différente (beaucoup moins morbide) dans son approche de l'onirisme. Mais on peut très difficilement contester au <ins>Cabinet du docteur Caligari</ins> son importance historique à l'échelle du cinéma (expressionniste, d'épouvante, et tout le reste). Et cette phrase presque finale résonne encore longtemps après que le film soit terminé : "<em>ne le laissez pas prévenir l’avenir ou vous mourrez !</em>".</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/cabinet_du_docteur_caligari/.angles_m.jpg" alt="angles.jpg" title="angles.jpg, juil. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/cabinet_du_docteur_caligari/.cercueil_m.jpg" alt="Das Kabinett des Doktor Caligari" title="Das Kabinett des Doktor Caligari, juil. 2019" /> <br />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/cabinet_du_docteur_caligari/.vampire_m.jpg" alt="vampire.jpg" title="vampire.jpg, juil. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/cabinet_du_docteur_caligari/.ombre_m.jpg" alt="ombre.jpg" title="ombre.jpg, juil. 2019" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Cabinet-du-docteur-Caligari-de-Robert-Wiene-1920#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/689