Je m'attarde - Mot-clé - Thaïlande le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearUn an à vélo, d'Amsterdam à Singapour, de Martijn Doolaard (2017)urn:md5:0e10685c274c0ca00f5f21c66a3429a42019-03-08T10:36:00+01:002019-03-08T10:39:10+01:00RenaudLectureEuropeExplorationIndeIranKirghizistanMalaisieOuzbékistanPhotographieSingapourTadjikistanThaïlandeTurquieVoyageVélo <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.un_an_a_velo_m.jpg" alt="un_an_a_velo.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="un_an_a_velo.jpg, fév. 2019" /><div id="centrage">
<span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Plus on voyage, plus on se rend compte de l'immensité de ce qu'il nous reste à voir." <br /></strong></ins></span>
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<p>Ça lui a pris comme ça, <strong>Martijn Doolaard</strong>, un photographe et graphiste néerlandais : un jour, il a décidé de se poser. Mais pas n'importe quelle pause. Pas la pause de milieu de journée qui s'étale, pas la pause hebdomadaire du weekend, pas même la pause de plusieurs jours ou semaines pour aller se balader ou crapahuter en hauteur. Plutôt le genre de pause qui commence comme une idée de projet aussi vague que folle, et qui se termine par un périple de plus de 16 000 kilomètres d'Amsterdam à Singapour avec pour seul compagnon de voyage un vélo.</p>
<p>Mais <strong>Martijn </strong>n'avait pas du tout prévu ça. Son idée, à l'origine, c'était tout simplement de prendre le large, de quitter son cocon hollandais. Enfourcher son vélo sans autre direction que l'horizon à l'Est. Rouler vers l'Orient, rien de plus, rien de moins. Il savait qu'il s'embarquait dans un long voyage, il n'est pas pour autant parti sans s'équiper, se préparer, se renseigner un minimum ne serait-ce que pour les questions de visas qui se poseront de manière régulière tout au long de son parcours, à chaque frontière rencontrée au-delà de l'Union Européenne. Mais malgré cela, l'improvisation semble avoir toujours été le maître-mot de son voyage.</p>
<p>Rien ne l'avait préparé à la traversée des immenses plateaux sauvages à l'autre bout de l'Europe, à l'ascension des très hauts cols dans les montagnes du Moyen-Orient, aux aléas administratifs en Inde et dans les pays d'Asie du Sud-Est. Il n'avait pas prévu de de camper au beau milieu de la jungle parsemée de temples birmans incroyables, de parcourir des immenses lacs de sel à l'instar du Salar d'Uyuni, de croiser et recroiser autant de gens sur sa route. Au-delà des paysages renversants de diversité auquel le livre fait honneur (le format et la qualité des photos sont excellents), les rencontres rythment aussi son périple, entre les voyageurs perdus dans leur odyssée personnelle comme <strong>Martijn </strong>qui feront un bout de chemin ensemble, les marques d'hospitalité régulières, et même les aventures amoureuses qui font presque vaciller le projet, racontées de manière aussi sobre et pudique qu'intense et parfaitement intelligible. Un peu comme <strong>Bernard Ollivier</strong> dans sa <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Longue-Marche-de-Bernard-Ollivier-2000-2001-et-2003">Longue Marche</a></ins>, entre Istanbul et l'ancienne capitale chinoise Xi'an (distance de 12 000 kilomètres qu'il parcourut à pied en 4 ans, à raison de 3 ou 4 mois par an), l'histoire n'est jamais évoquée sous l'angle de l'exploit personnel.</p>
<p>Tout n'aura pas été rose, évidemment, on ressent à de nombreuses reprises des coups de mou, des doutes, des hésitations, des difficultés, voire même des dégoûts. Le livre se lit autant comme un récit photographique que comme un journal de bord, communiquant autant sur l'état d'esprit du voyageur, avec ses buts et ses faiblesses, que sur les surprises qui jalonnent inévitablement un tel parcours. On en aurait presque oublié la dimension renversante de l'épreuve. "<em>Plus on voyage, plus on se rend compte de l'immensité de ce qu'il nous reste à voir</em>" (<strong>Gunther W. Holtorf</strong>, célèbre voyageur allemand) : voilà un constat que l'on peut facilement partager, pour un récit qui donne férocement envie de foutre le camp. <strong>Martijn</strong>, depuis la parution de ce livre, a d'ailleurs déjà récidivé : il a cédé à <a href="https://www.espiritu-libre.com/" title="https://www.espiritu-libre.com/">de nouvelles pérégrinations</a>, toujours à vélo, et se trouve actuellement au Pérou, pour une expédition traversant tout le continent Américain, de Vancouver jusqu'en Patagonie.</p>
<p>Quelques caractéristiques techniques du voyage :
</p>
<ul>
<li>Distance totale parcourue à vélo : 16 032 km.</li>
<li>Distance maximale parcourue à vélo à partir d'un point fixe : 1136 km.</li>
<li>Dénivelé cumulé : 90 417 m.</li>
<li>Journées passées en selle : 212.</li>
<li>Vitesse maximale : 73 km/h.</li>
<li>Vitesse moyenne : 17 km/h.</li>
<li>Distance maximale parcourue en une journée : 154 km.</li>
<li>Point culminant : 3615 m (au Kirghizistan).</li>
<li>Altitude la plus basse : -22 m (mer Caspienne en Iran).</li>
<li>Poids de Martijn au départ : 80 kg.</li>
<li>Poids à l'arrivée : 68 kg.</li>
<li>Poids maximal du vélo : 62 kg.</li>
<li>Nombre de crevaisons : 7.</li>
<li>Nombre de changements de pneus : 2.</li>
<li>Nombre de chutes : 0.</li>
</ul>
<blockquote><p><br />Le monde s’endort<br />
Dans une chaude lumière.<br />
Là, tout n’est qu’ordre et beauté,<br />
Luxe, calme et volupté. <br /><br />
<strong>Charles Baudelaire</strong>, extrait de <em>L'Invitation au voyage</em>, issu des <ins>Fleurs du mal</ins> (1857). </p>
</blockquote>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/map.jpg" alt="map.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="map.jpg, fév. 2019" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/matos.jpg" alt="matos.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="matos.jpg, fév. 2019" />
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.bagan_m.jpg" alt="bagan.jpg" title="bagan.jpg, fév. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.neige_m.jpg" alt="neige.jpg" title="neige.jpg, fév. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.velo_m.jpg" alt="velo.jpg" title="velo.jpg, fév. 2019" /><br />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.lac_m.jpg" alt="lac.jpg" title="lac.jpg, fév. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.plage_m.jpg" alt="plage.jpg" title="plage.jpg, fév. 2019" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/an-a-velo_d_amsterdam_a_singapour/.contrejour_m.jpg" alt="contrejour.jpg" title="contrejour.jpg, fév. 2019" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-an-a-velo-d-Amsterdam-a-Singapour-de-Martijn-Doolaard-2017#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/619Bangkok Nites, de Katsuya Tomita (2017)urn:md5:69ab351cd0430777aaf71e72991c918a2018-02-07T18:57:00+01:002018-02-07T19:20:43+01:00RenaudCinémaExilImmigrationJaponProstitutionThaïlande <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bangkok_nites/.bangkok_nites_m.jpg" alt="bangkok_nites.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="bangkok_nites.jpg, fév. 2018" /><div id="centrage"> <span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Portraits croisés sur l'e</strong></ins></span><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong><span style="font-size: 18pt;"><strong>xil et la prostitution</strong></span><br /></strong></ins></span>
</div>
<p>On plonge dans <ins>Bangkok Nites</ins> comme les protagonistes du film plongent dans la nuit de la capitale thaïlandaise. En suivant le parcours de quelques âmes errantes, une cohorte essentiellement constituée de prostituées et de leurs clients exclusivement japonais, on découvre de l'intérieur la vie dans les quartiers rouges de la grande ville avant de s'éloigner dans l'arrière pays, dans un second temps, comme un retour aux sources à la frontière avec le Laos. La terre y est déchirée par les trous d'obus du siècle dernier, et la jungle peuplée de fantômes du passé. La dernière heure, comme le dernier de trois actes, opèrera une sorte de synthèse opposant le "paradis" de la capitale, avec tout ce qu'elle compte de marchandisations et de crises existentielles, et la misère rurale où les cicatrices du passé, liées à la guerre et à la colonisation, refont sans cesse surface.</p>
<p>Le premier plan pourrait en rappeler un autre, celui du bouleversant <ins>Yi Yi</ins> (<a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Yi-Yi-d-Edward-Yang-2000">lire le billet</a>) d'<strong>Edward Yang</strong> : un personnage filmé à travers son reflet dans une vitre, avec la ville dans son activité nocturne en toile de fond. On y aperçoit la protagoniste, Luck, alors qu'elle laisse échapper un "Bangkok… Shit!" très expressif : venue ici dans l'espoir d'amasser un pécule significatif (initialement pour aider sa famille restée à la campagne), elle personnifie une sorte de duel avec la ville qui durera près de trois heures.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bangkok_nites/.defile_m.jpg" alt="defile.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="defile.jpg, fév. 2018" /></p>
<p>Si <ins>Bangkok Nites</ins> se concentre dans un premier temps sur les activités mouvementées d'un bordel, il évite étonnamment l'outrance et la sur-signification. Aucune nudité, aucune position dégradante (en tous cas, pas explicitée comme telle) filmée de face. <strong>Katsuya Tomita </strong>semble plutôt s'intéresser dans cette partie au groupe de filles travaillant là, il les filme souvent ensemble lorsqu'elles attendent de nouveaux clients, dans cette pièce éclairée de néons flashy qui font penser à une boîte remplie de poupées. La violence des échanges humains traîne bien évidemment par-là, mais ce n'est pas le point focal du film qui se dirige plutôt vers un portrait de la société contemporaine, comme résultat direct de son passé. La guerre, avec la présence des armées françaises et américaines dans la région, ainsi que les relents de colonisation japonaise, prendront une importance capitale dans ce tableau.</p>
<p>C'est une drôle de dérive, car si l'on part de la prostitution sans jamais vraiment quitter son univers, le film ne s'en servira que comme une toile de fond filmée avec une pudeur et une retenue éloquentes. Non pas que <ins>Bangkok Nites</ins> soit parfait dans sa mise en œuvre : on pourrait par exemple lui reprocher une certaine incapacité à distiller efficacement son discours dans ces trois heures, rendant certains passages un peu trop longs. Mais les portraits qu'il dessine, de manière frontale comme le duo de personnages Luck / Ozawa (<strong>Subenja Pongkorn</strong>, une prostituée qui travaille réellement dans le bordel pour touristes japonais, et le réalisateur <strong>Katsuya Tomita </strong>lui-même dans un rôle qui prendrait ainsi presque des accents autobiographiques) ou de manière plus détournée, avec les différente trajectoires à la dimension allégorique (les allers-retours des Japonais en quête de sens, l'instinct de survie des jeunes issues des régions rurales), sont une vraie réussite. <ins>Bangkok Nites</ins> brille par son ton, pur, dénué de complaisance sans pour autant s'inscrire dans le jugement, et par ses trajectoires en pointillés, sans point final. Les deux protagonistes, le Japonais et la Thaïlandaise, offrent deux portraits de choix qui s'assembleront peu à peu, dans toutes leurs aspérités, pour former une peinture de l'exil d'une sensibilité délicate et émouvante.</p>
<div id="centrage"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bangkok_nites/.bordel_m.jpg" alt="bordel.jpg" title="bordel.jpg, fév. 2018" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bangkok_nites/.reflet_m.jpg" alt="reflet.jpg" title="reflet.jpg, fév. 2018" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Bangkok-Nites-de-Katsuya-Tomita-2017#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/487