Je m'attarde - Mot-clé - Tony Curtis le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLe Grand Chantage, d'Alexander Mackendrick (1957)urn:md5:67e307a533197be4bd5200f68ccdc1832018-07-05T12:25:00+02:002018-07-05T12:12:48+02:00RenaudCinémaAlexander MackendrickBurt LancasterJournalismeNew YorkPolitiqueTony Curtis <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/grand_chantage/.grand_chantage_m.jpg" alt="grand_chantage.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="grand_chantage.jpg, juil. 2018" /><div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"He's got the scruples of a guinea pig and the morals of a gangster."</strong></ins></span>
</div><p>Pour son premier film américain, loin des délires écossais délicieusement alcoolisés de <ins>Whisky à gogo !</ins> (Whisky Galore, 1949) et loin de la définition de l'aventure à venir dans <ins>Un Cyclone à la Jamaïque</ins> (A High Wind in Jamaica, 1969), <strong>Alexander Mackendrick </strong>plonge dans un environnement urbain et explore les affres de l'empire éditorial new-yorkais des années 50. À la tête de cette faune bigarrée composée de politiciens, d'avocats, de journalistes, de flics pourris et autres célébrités ou aspirants aux dents longues et bien aiguisées, deux figures s'imposent, écrasantes : <strong>Burt Lancaster </strong>dans le rôle de l’éditorialiste J. J. Hunsecker, et <strong>Tony Curtis </strong>dans celui du publiciste Sidney Falco.</p>
<p><strong>Lancaster</strong>, fort de sa stature intimidante, incarne un personnage à la froideur et à la conviction dévastatrices, parfaitement impassible, mâchoire serrée, pétri de mépris et d'assurance, et obsédé par une quête de pouvoir qui semble sans borne. Son personnage est glaçant. <strong>Curtis</strong>, dans un registre bien différent mais tout aussi abject, bien loin des comédies légères de l'époque auxquelles on pouvait être habitué, se révèle exquis dans ce contre-emploi d'arriviste à l'appétit insatiable. Ils constituent les deux pôles autour desquels gravite tout le film et se développe une série de rapports de force implacables, donnant une image relativement violente de cet univers médiatique bâti sur l'humiliation et la domination. Le trait est féroce, c'est une certitude.</p>
<p><strong>Mackendrick </strong>et surtout son chef opérateur <strong>James Wong Howe</strong> parcourent les rues de New York avec une dextérité stimulante, à l'origine d'un sentiment d'immersion très prenant. On est dans le film noir par excellence, très élégant dans sa photographie soignée et dans ses clairs-obscurs. Mais on s'éloigne tout de même de la trame classique du genre pour dériver vers une satire acerbe du journalisme américain, et les portraits à charge ne manquent pas quand il s'agit d'illustrer la tyrannie des uns et la bassesse des autres. Corruption et arrivisme y font très bon ménage.</p>
<p>Le personnage de <strong>Tony Curtis </strong>rappelle celui de <strong>Richard Widmark </strong>dans <ins>Les Forbans de la nuit</ins> (<strong>Jules Dassin</strong>, 1950), et la description de la ville en décors aussi authentiques fait écho à un autre film du même réalisateur, <ins>La Cité sans voiles</ins> (1948). Des êtres manipulés, pourvus d'une ambition démesurée et complètement aveuglés par leur désir de réussite financière et sociale. La ville est un océan peuplé de requins prêts à s'entre-dévorer. "<em>I'd hate to take a bite outta you. You're a cookie full of arsenic</em>", "<em>he's got the scruples of a guinea pig and the morals of a gangster</em>" (ou l'inverse): les joutes verbales acides sont aussi nombreuses que délectables.</p>
<p><ins>Sweet Smell of Success</ins> dessine au final une étude très noire de l'univers des éditoriaux. New York y apparait comme un repère de voyous plus ou moins institutionnels, une ville parsemée de pièges, de contraintes et de manipulations. Une jungle meurtrière, plongée dans la nuit, rythmée par la mégalomanie de quelques gros poissons et les pressions multiples qui en découle sur toutes les strates de la société. <strong>Tony Curtis </strong>et <strong>Burt Lancaster </strong>forment un duo de belles pourritures, tout à fait mémorable.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/grand_chantage/.telephone_m.jpg" alt="telephone.jpg" title="telephone.jpg, juil. 2018" /> <br /><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/grand_chantage/.lovers_m.jpg" alt="lovers.jpg" title="lovers.jpg, juil. 2018" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Grand-Chantage-d-Alexander-Mackendrick-1957#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/525La Chaîne, de Stanley Kramer (1958)urn:md5:cc07a50d69c083761d00362dc99056b32016-01-17T16:18:00+01:002016-01-17T16:26:27+01:00RenaudCinémaEtats-UnisRacismeSidney PoitierStanley KramerSégrégationTony Curtis <p><img title="chaine.jpg, janv. 2016" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="chaine.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chaine/.chaine_m.jpg" /></p>
<p>En lisant le pitch d'un tel film, on peut craindre principalement une chose : un traitement trop prévisible dans sa métaphore de l'opposition entre Blancs et Noirs. Mais ce serait sans compter sur la surprenante écriture de <ins>The Defiant Ones</ins> (titre original) et l'excellent duo formé par <strong>Tony Curtis </strong>et <strong>Sidney Poitier </strong>qui prouve, très vite, qu'il n'en est rien en laissant pleinement s'exprimer l'originalité et la subtilité du scénario.</p>
<p><img title="enchaines.jpg, janv. 2016" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="enchaines.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chaine/.enchaines_m.jpg" /></p>
<p>Scénario qui tient en une phrase (un Blanc et un Noir prisonniers enchaînés l'un à l'autre sont en fuite dans l'Amérique rurale des États du Sud) mais qui s'avèrera être d'une étonnante efficacité sur au moins deux tableaux.</p>
<p>D'une part, le clivage Blanc / Noir est très rapidement dépassé. Face à l'épreuve d'une fuite dans une telle configuration, les deux buddies réalisent vite qu'ils ont tout intérêt à coopérer. Se nourrir et fuir la police qui est à leurs trousses nécessite de fait une certaine entente et concourt à des discussions aussi imposées que fructueuses. Cette collaboration naissante se voit également renforcée de manière plutôt originale par une solidarité inattendue, puisqu'ils prendront conscience d'un dénominateur commun supplémentaire (au-delà de leur condition de prisonniers en fuite) : Noir comme Blanc, ils n'étaient que des employés de seconde zone. Le premier comme homme de ménage condamné à rentrer dans les hôtels par la porte de derrière, et le second comme voiturier devenu esclave de son pourboire et de formules de politesse comme "Thank you Sir" devenues obligatoires.<br />
Le film casse d'ailleurs cette opposition raciale très vite en montrant les deux compagnons dans une posture vraiment très étonnante (imaginons un instant la scène en 1958 !) : assoupis au terme d'une dure journée à courir dans la nature, on retrouve <strong>Poitier </strong>dans les bras de <strong>Curtis</strong>, sous un arbre les abritant de la pluie, tous deux profondément endormis. Une image doublement "choc" (deux hommes, deux couleurs de peau) du meilleur effet.</p>
<p><img title="amitie.jpg, janv. 2016" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="amitie.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chaine/.amitie_m.jpg" /></p>
<p>D'autre part, <ins>The Defiant Ones</ins> prend le soin de cultiver une certaine diversité de genre, en alternant les séquences centrées sur les deux prisonniers et celles consacrées aux recherches effectuées par la police, avec des officiers uniformément Blancs mais finalement bien différents dans leurs psychologies et leurs méthodes de travail. Le leitmotiv musical (tout comme celui lié aux chiens) avec ces morceaux rock 'n' roll crachés par un transistor, agaçant les uns et ravissant les autres, confère à ces séquences une dimension définitivement comique.<br />
Mieux, le "truc" du scénario (qui sera récompensé par un Oscar en 1959, en dépit des foudres du maccarthysme qui s'étaient abattues sur leurs auteurs, <strong>Nedrick Young </strong>et Harold <strong>Jacob Smith</strong>), le fait que deux hommes a priori si différents se retrouvent enchaînés et en cavale, ne se repose pas sur son statut de "bonne idée" et enchaîne les péripéties vraiment réussies : sortir d'un puits d'argile sous une pluie battante, se bastonner d'une main suite à un différend, ou encore se sortir d'un village guère plus accueillant qu'une prison. Toute ces aventures pour terminer sur une réponse pleine d'espoir et de tendresse à la question essentielle qui sous-tend le film : que faire une fois la chaîne brisée ? Maintenant que l'on a appris à vivre ensemble et à s'apprécier, on continue sur cette voie, bien entendu.</p>
<p><img title="table.jpg, janv. 2016" style="margin: 0 auto; display: block;" alt="table.jpg" src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/chaine/.table_m.jpg" /></p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Chaine-de-Stanley-Kramer-1958#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/299