Je m'attarde - Mot-clé - William A. Wellman le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearAmis américains, de Bertrand Tavernier (1993)urn:md5:10e5a0d0d9b57c0752ef27375a6020a92024-01-11T11:43:00+01:002024-01-11T15:38:26+01:00RenaudLectureAlexander PayneAndré De TothBertrand TavernierBudd BoetticherCensureDalton TrumboDelmer DavesEdgar G. UlmerEdward DmytrykElia KazanEntretiensHenry HathawayHerbert J. BibermanJoe DanteJohn FordJohn HustonMartin RittQuentin TarantinoRaoul WalshRobert AltmanRobert ParrishRoger CormanStanley DonenSérie BTay GarnettTex AveryWesternWilliam A. Wellman <a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/2024/amis_americains/amis_americains.jpg" title="amis_americains.jpg, janv. 2024"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/LECTURE/2024/amis_americains/.amis_americains_m.jpg" alt="amis_americains.jpg, janv. 2024" class="media-center" /></a>
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Tavernier le cinéphile</strong></ins></span>
</div>
<p>Quelle que soit la version lue, quand on parle de ce livre de <strong>Bertrand Tavernier</strong>, la première chose qui émerge a souvent trait au volume de l'objet, du haut de ses 1000 pages et de ses nombreux kilos (on est vraiment à la limite du manipulable et du transportable). La seconde porte sur le nombre d'années nécessaires pour venir à bout du colosse.</p>
<p>Une chose essentielle ressort à la lecture de ces <ins>Amis américains</ins> : il ne s'agit pas du tout d'un recueil d'entretiens au sens communément admis, du type d'échanges entre journalistes ciné et réalisateurs de passage pour assurer la promotion du film du moment. Le format est résolument autre, avec ses côtés positifs et ses aspects plus problématiques : il s'agit avant tout de l'agrégation de travaux de <strong>Tavernier </strong>l'attaché de presse dans les années 60-70, devenu au fil du temps cinéaste et dont la passion cinéphile grandissante (ainsi que l'accointance avec les personnes interrogées) a pris des proportions immenses au fil des décennies pour atteindre le degré d'enthousiasme communicatif qu'on lui connaissait jusqu'à sa mort en 2021. Des retranscriptions d'échanges plus ou moins éclairés, sur des thèmes et des hommes (pas l'ombre d'une femme dans les grande slignes) qu'il connaît plus ou moins bien, avec souvent des éléments introductifs pour présenter le contexte ou préciser a posteriori son point de vue.</p>
<p>Le plus drôle sans doute, en lisant cette édition augmentée de 2019, au-delà de la multiplicité des points d'entrée sur la subjectivité de <strong>Tavernier</strong>, c'est de voir à quel point les avis sont parfois volatiles, et comment en seulement quelques mots, on passe d'une opinion extrêmement négative à une appréciation sans borne — c'est souvent dans ce sens-là. Comme <strong>Tavernier </strong>a vu (et revu) des dizaines de milliers de films et qu'il choisit de n'évoquer longuement que ceux qui lui ont plu chez chacune des personnes rencontrées, il y a un côté un peu étouffant et indigeste dans cette accumulation de louanges qui tournent souvent aux panégyriques.</p>
<p>Il restera cette flamme, cette accumulation d'anecdotes, ce désir ardent de rencontrer ces réalisateurs, formant un tout très hétérogène notamment à cause du niveau de connaissance variable et des tempéraments assez éloignés. Très intéressant d'entendre ces cinéastes parler d'autres cinéastes aussi, de ressentir les tendances humbles ou plus irascibles. Et les borgnes, aussi : après <strong>John Ford </strong>sont évoqués <strong>Raoul Walsh</strong>, <strong>André De Toth</strong>, et pour la forme <strong>Tex Avery </strong>(<strong>Fritz Lang </strong>et <strong>Nicholas Ray </strong>ne sont pas mentionnés de mémoire). Ce genre de recueil est une mine d'informations sur l'ancien monde, et montre quand même très vite des limites tant l'évolution du cinéma se fait à grande vitesse (la première édition remonte à 1993) : beaucoup de considérations paraissent particulièrement datées et désuètes avec les 30 années qui nous séparent. </p>
<p>Sans surprise, <strong>Tavernier </strong>considère <strong>John Ford </strong>comme l'alpha et l'oméga du cinéma, le parrain de nous tous. Il est beaucoup plus à l'aise avec <strong>John Huston </strong>et <strong>Tay Garnett</strong>, des gens comme <strong>Henry Hathaway </strong>et <strong>William A. Wellman</strong>, notamment sur le segment western (qui ne me passionne pas, rendant énormément d'échanges insipides à titre personnel, <strong>Budd Boetticher </strong>[même s'il était à l'époque très mal connu], <strong>Delmer Daves</strong>, <strong>Robert Parrish</strong>) qu'avec par exemple <strong>Edgar G. Ulmer </strong>qu'il semble moins bien connaître. Des échanges surprenants subsistent, avec <strong>Stanley Donen </strong>(premier contact houleux mais qui s'est amélioré par la suite) ou <strong>Elia Kazan </strong>(sous l'angle de sa contribution aux dénonciations maccarthystes). Certains sujets étonnent, comme sa conception de la série B au travers du producteur-réalisateur <strong>Roger Corman </strong>ou encore la place accordée à <strong>Robert Altman</strong>. Le chapitre le plus intéressant de mon point de vue est probablement celui dédié à la liste noire, les célèbres Hollywood Ten qui avaient subi les foudres de la censure américaine et qui cherchaient désespérément des prête-noms (autant côté réalisation que côté scénario) pour pouvoir continuer à travailler : ceux-là, parmi lesquels figure notamment <strong>Herbert J. Biberman </strong>et auxquels s'ajoutent <strong>Dalton Trumbo</strong>, <strong>Edward Dmytryk</strong>, ou encore <strong>Martin Ritt</strong>, confèrent à cette partie du livre une matière conséquente que l'on ne retrouve pas souvent ailleurs. Le final de la version réactualisée, avec le trio étrange <strong>Payne </strong>/ <strong>Dante </strong>/ <strong>Tarantino</strong>, détonne franchement avec le reste et n'apparaît pas comme incroyablement nécessaire, probablement un ajout tentant de moderniser maladroitement le propos ayant décliné en termes de pertinence plus vite que le reste.</p>
<p><ins><em>N.B.</em></ins> : C'est la trombine de <strong>Huston</strong>, cigarillo aux lèvres, qui figure sur la couverture.</p>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Amis-americains-de-Bertrand-Tavernier-1993#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1324Les Forçats de la gloire (The Story of G.I. Joe), de William A. Wellman (1945)urn:md5:7731cb0605afbe52ead650511914e9a42023-12-15T10:41:00+01:002023-12-15T10:50:15+01:00RenaudCinémaAfriqueBurgess MeredithEtats-UnisFolieGuerreItalieRobert MitchumSamuel FullerSeconde Guerre mondialeWilliam A. Wellman <div id="centrage">
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/forcats_de_la_gloire_A.jpg" title="forcats_de_la_gloire_A.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.forcats_de_la_gloire_A_m.jpg" alt="forcats_de_la_gloire_A.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/forcats_de_la_gloire_B.jpg" title="forcats_de_la_gloire_B.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.forcats_de_la_gloire_B_m.jpg" alt="forcats_de_la_gloire_B.jpg, déc. 2023" /></a>
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<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"It's a world the other world will never know. Even the Air Force. Up there, they approach death differently. When they die, they're clean-shaven, well fed, if that's any comfort. But the G.I., well, he lives so miserably and he dies so miserably."</strong></ins></span>
</div>
<p><strong>Samuel Fuller </strong>disait de <ins>The Story of G.I. Joe</ins> qu'il s'agissait selon lui du film produit sur la Seconde Guerre mondiale par les États-Unis le plus adulte et le plus authentique. On pourrait compléter en rajoutant que <strong>William A. Wellman </strong>réalise ce film en 1944, à une époque où son pays est très fortement impliqué dans le conflit (ce qui pourrait conduire à l'assimiler à de la propagande), en faisant jouer beaucoup de soldats américains rescapés du front européen en permission, aux côtés de quelques acteurs dont un tout jeune <strong>Robert Mitchum</strong>, alors qu'un grand nombre mourra quelques mois plus tard dans le Pacifique. Au même titre que le correspondant de guerre <strong>Ernie Pyle </strong>interprété par <strong>Burgess Meredith</strong>, tué peu de temps après la sortie du film et après avoir reçu le prix Pulitzer, lors de la bataille d'Okinawa au Japon. Le plus marquant dans tout ça, c'est l'incroyable maturité de <strong>Wellman </strong>et l'incroyable recul dont il fait preuve pour mettre en scène la progression d'une unité d'infanterie, dans un premier temps en Afrique du Nord, puis du côté de l'Italie avec la célèbre bataille de Monte Cassino.</p>
<p>En adoptant le point de vue de <strong>Pyle</strong>, la guerre est retranscrite comme un témoignage qui aurait collecté différents points de vue sur le terrain, au plus près des soldats. De manière très étonnante pour l'époque, on s'éloigne de tous les canons propagandistes pour rester dans une captation particulièrement terre-à-terre, en alternant entre les phases de déplacement loin des combats et les épisodes de combats — que ce soit en territoires urbains, avec notamment cette évolution dans les décors d'une cathédrale en ruine évoquant certains passages de la fin de <ins>Full Metal Jacket</ins>, ou sur des terrains plus conventionnels, avec sollicitation de l'artillerie et expositions de conditions intenses. Dans sa description éloignée des clichés diabolisant l'ennemi et dans sa tonalité désabusée d'un regard froid sur la guerre, <ins>Les Forçats de la gloire</ins> se rapproche d'un autre film de <strong>Wellman </strong>qui sortira quelques années plus tard, <ins><a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Bastogne-de-William-A-Wellman-1949">Bastogne</a></ins>.</p>
<p>Aucune trace d'antimilitarisme bien sûr, et sans aller jusqu'à parler d'une approche documentaire, le film frappe par son haut degré de réalisme que ce soit pour évoquer l'attente pénible des hommes (en se focalisant sur quelques points, la faim, le manque de nourriture digne de ce nom, l'absence de femmes, et quelques lubies à l'image du tourne-disque qu'un soldat tente inlassablement de réparer pour écouter un enregistrement envoyé par son épouse avant de sombrer dans la folie) ou pour illustrer la pénibilité des avancées en territoires ennemis. Très étonnant de voir <strong>Wellman</strong>, ambulancier puis aviateur, dédier son film à l'infanterie en montrant le quotidien douloureux des sans-grades piégés dans la boue, un élément important du dernier segment du film, avec quelques références au luxe des membres de l'US Air Force qui eux meurent en restant propres. Un film dépourvu de lyrisme, constamment pragmatique, pudique dans l'émotion et la douleur, jamais complaisant avec la violence qu'il met en scène, avec quelques très belles scènes — parmi les plus marquantes, celles où la radio nazie tente de séduire les jeunes soldats américains avec une voix suave féminine les invitant à déserter et celle où le lieutenant incarné par <strong>Mitchum </strong>revient d'un paysage désolé, son corps ramené à dos d'âne.</p>
<div id="centrage">
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img1.jpg" title="img1.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img2.jpg" title="img2.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img3.jpg" title="img3.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img3_m.jpg" alt="img3.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img4.jpg" title="img4.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img5.jpg" title="img5.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img5_m.jpg" alt="img5.jpg, déc. 2023" /></a>
<a href="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/img6.jpg" title="img6.jpg, déc. 2023"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/forcats_de_la_gloire/.img6_m.jpg" alt="img6.jpg, déc. 2023" /></a>
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Forcats-de-la-gloire-de-William-A-Wellman-1945#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1306Bastogne, de William A. Wellman (1949)urn:md5:5223b33e11530d9a4a79997dd32b9b282021-07-12T23:30:00+02:002021-07-14T23:07:46+02:00RenaudCinémaArdennesGuerreHiverMortNeigeSeconde Guerre mondialeWilliam A. Wellman <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.bastogne_m.jpg" alt="bastogne.jpg, juin 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Les soldats oubliés<br /></strong></ins></span>
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<p><ins>Bastogne</ins> est l'un des films de guerre prenant pour support quasi-matriciel la Seconde Guerre mondiale le plus prototypique que j'aie vu jusqu'à présent, dans son genre, c'est-à-dire le film de guerre désabusé sans être antimilitariste (la guerre du Vietnam n'est pas encore passée par-là) qui montre la guerre dans toute sa laideur. On est seulement en 1949 et <strong>Wellman</strong>, déjà, délaisse le spectaculaire des scènes de combats — même s'il y a bien quelques fusillades et autres lancers de grenades — pour se concentrer exclusivement sur le moral des troupes pendant la bataille des Ardennes, pendant l'hiver 1944. Un hiver brumeux, neigeux, glacial, pendant lequel la principale qualité requise reste le moral des deux côtés du front. <strong>Wellman </strong>s'intéresse plus particulièrement à un petit groupe de soldats américains cerné par les Allemands, refusant de se rendre, tandis que les stocks de munitions et de nourriture s'amenuisent.</p>
<p>C'est un film incroyablement dépourvu d'héroïsme individuel, les soldats étant presque des anonymes — et en ce sens interprétés par des acteurs très modérément connus. Un film sur la peur de mourir, sur l'horreur grandissante des escarmouches, avec la particularité de l'ennemi qui franchit les lignes alliées en se déguisant, inspirée d'une histoire vraie. En plus de la lutte contre le froid et la faim, en plus de la pénurie d'essence et de munition, les soldats doivent en plus se livrer à de fréquents contrôles qui deviennent presque comiques (à la lisière de la tragédie, tout de même) lorsqu'en plus des traditionnels mots de passe il faut également questionner la culture nationale pour s'assurer de l'identité des soldats qui passent : des questions sur le baseball, notamment, manquent de coûter la vie à un soldat américain pas très informé sur le sujet.</p>
<p>Pas mal de moments mémorables : les soldats qui se réveillent recouverts de neige, les doutes constants qui font qu'on croit que les Allemands déguisés sont partout, les raids aériens pour distribuer des tracts déstabilisants, jusque dans des détails comme la pénurie de morphine, le gel des grenades. Quelques éclairs de tension s'entremêlent avec le désespoir ambiant, que la scène finale de la permission enfin accordée ne peut effacer. La volonté d'appuyer sur la blessure psychologique est notable, avec des séquences presque oniriques lorsque les ombres se découpent tout juste à travers la brume et la neige. On est à la limite du survival ici, face à l'ennemi et les éléments, sans que les codes classiques du film de guerre (tactique, héroïsme, action) ne soient abordés. La confusion règne en maître et à tous les niveaux, jusque dans le hors champ.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.combats_m.jpg" alt="combats.jpg, juin 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.tombe_m.jpg" alt="tombe.jpg, juin 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.soldats_m.jpg" alt="soldats.jpg, juin 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.neige_m.jpg" alt="neige.jpg, juin 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bastogne/.fin_m.jpg" alt="fin.jpg, juin 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Bastogne-de-William-A-Wellman-1949#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/982L'Ange blanc, de William A. Wellman (1931)urn:md5:c395aa331cc7a69d7a7c536b91e1b8642021-04-25T14:59:00+02:002021-04-25T14:59:00+02:00RenaudCinémaAlcoolCinéma Pré-CodeClark GableComédieFilm noirHôpitalInfirmièreViolenceWilliam A. Wellman <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ange_blanc/.ange_blanc_m.jpg" alt="ange_blanc.jpg, avr. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Aren't there any ethics about letting poor little babies be murdered?"<br /></strong></ins></span></div>
<p>Délicieuse époque que celle du Pré-Code, avec des films comme L<ins>'Ange blanc</ins> (Night Nurse) qui sans être sensationnels et parfaitement intègres 90 ans plus tard, délivrent néanmoins le parfum très singulier de cette licence, quelques années avant que tout comportement jugé amoral ne devienne interdit. Et ici, on peut dire que <strong>William A. Wellman </strong>ne tarde pas à montrer les infirmières en petites tenues, certes toujours de manière un minimum justifiée, mais on y va gaiment : on s'habille, on se déshabille, on rentre tard de soirée, on picole, on bastonne hommes et femmes indifféremment, etc. Symbole parfait d'une époque avec ses codes bien particuliers, l'espace de quelques années au début des 40s américaines.</p>
<p><ins>Night Nurse</ins> recèle toutefois d'autres points de singularité, notamment dans les ruptures de ton qu'il entretient constamment en naviguant entre mélodrame, film noir et comédie, avec une certaine cohérence. La première partie est la plus légère, elle épouse une tonalité résolument humoristique pour décrire l'hôpital américain avec tous ses soucis d'organisation et ses rapports hiérarchiques. L'occasion de présenter le point de repère du film, <strong>Barbara Stanwyck </strong>et son personnage fondamentalement bon, bienveillant et intègre qui révèlera une affaire sordide. Dans sa seconde partie, le film change radicalement de ton pour suivre le microcosme bourgeois de quelques dépravés, alcoolisme par-ci et machisme violent par-là. On voit débarquer <strong>Clark Gable </strong>(à l'époque où il n'arborait pas encore sa célèbre moustache !) d'abord par ses pieds, avec un cadre volontairement tronqué qui fait comprendre la distribution de mandales en cours. Dans le temps suivant, il n'hésitera pas à cogner l'héroïne sous prétexte de non-coopération, séquence assez étonnante et choquante dans sa violence (qu'on ne voit plus trop au cinéma aujourd'hui non plus, d'un point de vue purement factuel). Un groupe sous l'emprise d'un manipulateur macho et violent, qui laissera progressivement apercevoir ses plans machiavéliques pour mettre la main sur un gros magot.</p>
<p> Sorti la même année que <ins>L'Ennemi public</ins>, le film est intéressant pour la place de la femme qu'il renvoie de la société de l'époque, perdue entre condescendance et brutalité, ainsi que quelques dispositions qui paraissent vraiment bizarres même avec un œil contemporain — en témoigne notamment le traitement réservé à <strong>Gable </strong>en toute fin, un happy end macabre qui se réjouit de la mise à mort d'un méchant. Le cas sordide de la malnutrition des enfants, entre une mère alcoolique, un chauffeur manipulateur et un médecin charlatan, ajoute encore une touche originale au tableau contrasté, fait de drames hospitaliers, de complots, d'escroqueries, et de moments comiques.</p>
<div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ange_blanc/.papier_m.png" alt="papier.png, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ange_blanc/.lit_m.png" alt="lit.png, avr. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ange_blanc/.gable_m.png" alt="gable.png, avr. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Ange-blanc-de-William-A-Wellman-1931#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/945Convoi de femmes, de William A. Wellman (1951)urn:md5:d1789750cc79970e556844e29616cc182018-04-03T12:47:00+02:002018-04-03T12:46:29+02:00RenaudCinémaAmérindiensConquête de l OuestWesternWilliam A. Wellman <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.convoi_de_femmes_m.jpg" alt="convoi_de_femmes.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="convoi_de_femmes.jpg, avr. 2018" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>La deuxième vague de la conquête de l'Ouest</strong></ins></span>
</div>
<p><ins>Westward the Women</ins> est un western qui pourrait être considéré comme l’œuvre duale de <ins>La Piste des géants</ins> (réalisé deux décennies plus tôt par <strong>Raoul Walsh</strong>), une sorte d’exploration de l’Ouest américain revisitée, dans une version que l'on serait tenté de qualifier de féministe (même si le terme ne devait pas avoir la même teneur à l'époque), se plaisant à manier les clichés du genre pour mieux les détourner. Sans nécessairement adhérer à l’ensemble de manière unilatérale, on peut toutefois trouver surprenant qu'un tel western ne dispose pas d’une visibilité autrement plus conséquente.</p>
<p><ins>Convoi de femmes</ins> est en tous cas un excellent point de vue sur la conquête de l'Ouest, au milieu du 19ème siècle. Ou, plus précisément, sur le deuxième temps de cette conquête : le convoi du titre, composé de 138 femmes et de quelques hommes pour les guider (en théorie), est envoyé depuis Chicago en direction de la Californie pour féminiser cet Ouest resté jusque-là très masculin, rendant difficile la fondation de foyers et la colonisation, naturellement. La première scène sur laquelle le film s'ouvre brutalement observe précisément le recrutement de ces femmes, par des hommes, un peu comme on sélectionnerait du bétail : on les juge sur des critères bien particuliers, presque eugénistes, à la lumière de leur capacité à remplir la mission fécondatrice qui leur sera confiée. La description du monde essentiellement masculin, empreint d’un machisme évident, laisse penser que le film va s'engager dans une direction très bien connue, celle des westerns dits classiques des années 30 à 50. Mais l'évocation de ces clichés ne constituera qu’un point d’entrée et non une ligne directrice, autant de poncifs qui n’appellent qu’à être brisés dans la suite des événements.</p>
<p><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.douche_m.jpg" alt="douche.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="douche.jpg, avr. 2018" /></p>
<p>En réalité, les hommes du convoi auront tôt fait de se défausser, une fois le périple initié et les premières difficultés rencontrées, laissant les femmes prendre en charge la gestion de l’aventure. Devant la tournure des événements, <strong>Robert Taylor </strong>(pas des plus charismatiques il faut l’avouer, renforçant ainsi un contraste à l’avantage du propos du film) observera dans un premier temps une certaine circonspection, avant de se résoudre à embrasser le mouvement, convaincu par une telle abnégation. Mais les femmes restent des femmes, semble nous dire le film, elles n’ont aucunement besoin d’épouser les caractéristiques classiques de l’homme de l’époque pour mener à bien leur mission : elles sont coquettes, coriaces, un peu hystériques par moments, tout en faisant preuve d'un grand courage et d'une grande solidarité. Ces clichés sont évidemment à replacer dans le contexte de leur époque, et le portrait de groupe recèle une force et une originalité tout à fait remarquables dans ce cadre-là. Toutes les caricatures ne sont pas évitées, pas plus que certains aspects poussifs (la mort de l'enfant, notamment, aux accents dramatiques attendus), mais la progression constante de l'estime pour les femmes ainsi que pour les étrangers, à travers le personnage japonais initialement moqué et dévalorisé par sa taille et son inexpérience supposée, est remarquable. C’est la définition même du retournement du cliché.</p>
<p>À côté de ces considérations morales, il y a aussi un véritable intérêt dans la dimension purement narrative et descriptive du voyage et de ses péripéties. Les dangers jalonnent le périple chez <strong>Wellman</strong> comme chez <strong>Walsh </strong>: des pluies torrentielles emportant les chariots installés trop près de la rivière, une attaque d'Indiens confinée dans la bande son, des épisodes de sécheresse et même un accouchement nécessitant l’aide de toutes pour maintenir une charrette brinquebalante. Le passage le plus éprouvant est sans doute celui de la descente d'un ravin vertigineux, avec un palan et de nombreuses cordes : la tension est palpable lorsqu’on suit la lente et périlleuse descente des chariots. C'est d’ailleurs un trait d'ensemble : la joie côtoie le trépas, les moments les plus truculents côtoient les épisodes les plus durs. La mort est omniprésente, comme annoncé aux femmes lors de leur recrutement, au tout début, en guise d’avertissement. Et finalement, à l'arrivée, la vision du paradis peut enfin s'épanouir dans un festival de danses et de mariages salvateurs. Un film décidément hors des normes de son genre et de son époque.</p>
<div id="centrage"><img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.femme_m.jpg" alt="femme.jpeg" title="femme.jpeg, avr. 2018" /> <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/convoi_de_femmes/.etang_m.jpg" alt="etang.jpg" title="etang.jpg, avr. 2018" /></div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Convoi-de-femmes-de-William-A-Wellman-1951#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/504