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Jeux d'été

Impossible (ou du moins très difficile) de ne pas considérer Elle n'a dansé qu'un seul été, du réalisateur suédois Arne Mattsson, à l'aune de deux particularités.

La première, c'est la scène où les deux jeunes amoureux se retrouvent dénudés au cours d'une baignade qui fut à l'époque jugée sulfureuse, à tel point que le film fut interdit dans certains pays et sortit avec des années de retard aux États-Unis. Quand on voit la scène en question aujourd'hui, qui expose notamment la poitrine d'Ulla Jacobsson mais qui en outre capte un très beau moment sensuel dans un étang bordé de roseaux, on peut s'amuser en observant l'évolution des normes institutionnelles en matière de suggestion maximale tolérée. D'autres éléments au-delà du scandale et de cette partie-là de la renommée du film, heureusement, ont résisté à l'épreuve du temps.

La seconde, c'est la parenté avec le premier segment de la filmographie d'un autre cinéaste suédois, Ingmar Bergman, qui réalisait la même année Jeux d'été. On ne peut que constater la multitude de points communs dans la façon d'appréhender la romance et les contraintes comme autant d'obstacles à l'émancipation des jeunes adultes. Le tragique et la légèreté entremêlés, avec un soupçon de mélancolie, mais aussi le personnage de Marie qui disait aussi, chez Bergman, "je ne crois pas que Dieu existe, et s'il existe, je le haïrai toujours... S'il était devant moi, je lui cracherais au visage".

L'histoire de Goran (comme un Gérard Philipe suédois) et Kerstin, présentée à la faveur d'un flashback amorcé lors d'un enterrement en introduction, se résume à un amour impossible, condamné par les parents autant que par l'église. Ils se rencontrent lors des vacances d'été, mais les mœurs extrêmement puritaines alimentées par un pasteur rigoriste forment des contraintes sociales qui les empêcheront de s'épanouir. Le portrait qui est fait du pasteur peut paraître quelque peu forcé, dans sa façon d'invoquer la colère de dieu, à travers son rôle dans l'accident de moto auquel Kerstin ne survivra pas. Il concentre beaucoup de maux pour quelqu'un qui condamne aussi durement l'immoralité de ses agneaux, en opposition avec l'oncle Persson, beaucoup moins instruit, qui sera le seul à exprimer de la tendresse et de la tolérance pour la jeune disparue. Un charge anticléricale assez forte, une opposition nuancée entre mœurs citadines et campagnardes, et des moments de liberté parsèment le film, et rappellent eux aussi certains films de Bergman, à commencer par Monika.

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