lumiere_bleue.jpg, déc. 2022
Conte des montagnes

La Lumière bleue est le tout premier film réalisé par Leni Riefenstahl après avoir passé quelques années devant la caméra de grands noms du cinéma comme Arnold ou Pabst. Très loin de ce qu'elle pourra produire à la fin des années 30 (comme par exemple les magnifiques Dieux du stade), ce film de montagne niché dans les Dolomites italiennes prend la forme d'une sorte de conte à l'esthétique radicalement différente. Il flotte autour de cette montagne proche de la Suisse une ambiance vaguement fantastique, relevant presque de la magie, entièrement construite autour de la figure d'une jeune femme, Junta (interprétée par Riefenstahl elle-même), attirée par une étrange lueur bleue en haut de la montagne les nuits de pleine lune, entraînant derrière elle de nombreux hommes qui échouent à escalader, dévissent et périssent tragiquement. Les villageois, les femmes surtout, pensent à ce titre que c'est une sorcière et Junta échappera de peu à la lapidation grâce à l'intervention d'un peintre ayant récemment rejoint le village.

c'est sur la base de ce film qu'Hitler, impressionné par ses talents de formaliste, chargera la cinéaste allemande de faire les films de propagande du Troisième Reich. On est en droit de divaguer et de se demander ce que sa carrière aurait donné si elle n'avait pas pris ce tournant... On sent que 1932 est une époque charnière dans le cinéma allemand, au tout début d'un parlant encore bien maladroit dans ses codes pas tout à fait intégrés : le rythme est parfois aussi périlleux que l'escalade et fait se succéder des scènes de dialogue et des scènes d'ascension muettes sans trop de liant. Du bricolage qu'on peut très facilement excuser et oublier, à la faveur du rapport primitif, quasi mystique, qu'entretient la femme avec la montagne, ou encore la dimension tragique que revêt la dernière partie suite à la plus cruelle des trahisons.

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