Jean-Pierre Boudine, professeur de mathématiques français, fait sa première incursion dans la SF en écrivant en 2002 une première version de ce court roman. Treize ans après, en 2015, l'auteur a ajouté certains développements au récit qui sont directement inspirés de notre histoire récente (crise financière mondiale, insécurité sociale et écologique,...). Dans un contexte réaliste, il imagine les évènements qui mènent l'humanité à sa destruction par le fait d'une crise systémique qui débute dans la finance. 

Témoin ordinaire dans cette lente apocalypse, le narrateur, Robert Poinsot, entreprend de raconter de sa cache - une grotte dans les Alpes - l'enchainement inexorable de l'anéantissement de nos sociétés. Courtement chapitré, le récit est prenant. L'auteur va droit au but, évite toute longueur mais parvient à dresser un spectacle très convaincant du cataclysme sous les yeux désabusés de son personnage principal. La psychologie de Robert Poinsot s'esquisse lorsque celui-ci raconte son périple chaotique : de son exode avec un groupe d'amis lorsqu'il devint impossible de survivre dans les villes, jusqu'aux circonstances extrêmes le contraignant à la solitude dans sa grotte.

A l'instar d'un journal de bord, il nous raconte son quotidien et les tâches indispensables à sa survie dans les montagnes. Il cherche à faire le point sur sa solitude et son existence sur la Terre. Impossible pour moi de ne pas évoquer la description par Carl Sagan (en écoute et en lecture ici) de la célèbre photographie de la planète Terre prise par la sonde Voyager 1 en 1990 : un message d'une remarquable concision qui saisit à merveille la fragilité de la race humaine dans la vaste arène cosmique. 

L'acte d'écrire de Robert Poinsot est animé par la nécessité de formaliser les choses qu'il a vu, et qu'il a compris. Il s'atèle à retranscrire l'effondrement de la civilisation humaine dont la technicité a balayé les modes de vie les plus simples. C'est dans la dernière partie de ce récit à la fois introspectif et méditatif que Robert Poinsot tire une solution simple au célèbre paradoxe de Fermi qui donne son titre au roman. En témoin désabusé de l'auto-destruction de la race humaine, il apporte une réponse d'un pessimisme halluciné, mais originale, au problème posé par l'interrogation de Fermi sur l’existence de civilisations extraterrestres.