liquid_sky.jpg, sept. 2021
Trip graphique sous acide

Liquid Sky (du nom donné à l'héroïne) : un gros OFNI sur un tout petit OVNI. Il serait vraiment très tentant d'essayer de résumer l'intrigue de ce film réalisé aux États-Unis par le Russe Slava Tsukerman, mais l'idée même de se lancer dans une synthèse de cette bizarrerie extrême donne le vertige et est en soi particulièrement intimidante. Comment dire... Le cadre est celui des années 80 à New York, et l'introduction met en scène une soucoupe volante miniature de toute beauté se posant sur un gratte-ciel de Manhattan, face à l'Empire State Building. Mais pas n'importe quel OVNI, un à l'intérieur duquel se trouve un (ou plusieurs, on ne saura jamais) extra-terrestre drogué (potentiellement à l'héroïne, mais le spectre à l'air plus large) qui va trouver un substitut à ses substances de prédilection dans la molécule (on peut supposer de ocytocine ou endorphine) générée dans le cerveau des humains lorsque l'acte sexuel aboutit sur un orgasme. Ils va donc squatter au-dessus de chez Margaret, une mannequin à la vie sexuelle assez mouvementée (de manière consentie ou non d'ailleurs, il faut s'accrocher pour se farcir plusieurs séquences à ce sujet) qui elle, visiblement; ne jouit jamais. Lorsque ses partenaires atteignent le climax orgasmique, des effets visuels dignes d'une vision à la Prédator sous acides illustrent l'absorption de cette substance par le drogué du dessus — c'est du moins ce qu'on peut supposer tant ces images tendent vers l'abstraction.

Pour raconter cette histoire complètement cinglée et loufoque, le réalisateur et son chef opérateur ont mis les bouchées doubles en matière de graphismes sidérants et d'atmosphère insensée, et Liquid Sky peut clairement valoir le détour sur cette unique base. Ambiance Punk / New Wave follement 80s, scènes de danse frontalement datées, costumes extraordinaires à foison, maquillages impressionnants (on se souviendra longtemps du visage de l'actrice principale lors de cette scène où sa figure se dessine dans le noir à mesure qu'elle se la peint à l'aide de couleurs fluorescentes)... c'est l'explosion de motifs et de couleurs dans toutes les directions, et c'est vraiment scotchant. Mais en regard de ça, il faut tout de même le préciser car cela peut s'apparenter à une épreuve, on a droit à une direction d'acteur assez catastrophique — même si cela peut ajouter un certain charme en matière d'étrangeté — et à un montage totalement chaotique, avec des séquences alternées sans queue ni tête qui ne semblent être là que pour accentuer la dimension épileptique et perchée de la narration. Il faut s'accrocher avec vigueur pour suivre.

Soit donc cet extra-terrestre posé sur le toit qu'on ne verra jamais mais qui se gave de drogues sécrétées par le cerveau humain, entraînant à l'occasion la mort du sujet (une sublimation en quelque sorte, au terme de séquences en stop-motion faisant intervenir du papier aluminium, je n'en dirai pas plus). Beaucoup d'orgasmes et donc beaucoup de morts dans l'appartement de la protagoniste interprétée par l'hypnotisante Anne Carlisle (qui tient le double rôle de Margaret et Jimmy) qui finira par se faire un gros shoot d'héroïne pour attirer l'attention de l'alien et se faire embarquer on ne sait où. Un incroyable défilé vestimentaire et musical, très expérimental, représentatif de ce qui se faisait dans les années 1980, sur fond de compositions particulièrement dissonantes et de pseudo-explications scientifiques délivrées par un astrophysicien allemand qui ne cèdera pas aux avances de la voisine d'en face.

Cheap et kitsch, de la drogue et du sexe, des visuels phénoménaux, du glauque aussi, mais surtout beaucoup, vraiment beaucoup de LSD.

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