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Ah, le Gers. Son festival Jazz in Marciac, ses routes nationales vallonnées, ses paysages bucoliques, ses parcelles agroforestières, sa gastronomie gasconne à base de canard et de porc noir de Bigorre, ses grippes aviaires, son madiran, son pousse-rapière, sa vue imprenable sur la chaîne des Pyrénées du Pays basque jusqu'en Ariège... et son festival de Garage annuel à Montesquiou bien sûr. Cette onzième édition aura été beaucoup plus modeste et tranquille que la précédente qui avait vu de très grands groupes comme les Monsters ou les Magnetix sillonner ses ruelles, remplir ses grandes tablées et écluser ses bières locales. Mais bon, on n'a pas tous les jours 10 ans.

Cette année, le festival a plus que d'habitude mis l'accent sur des genres différents du Garage pur jus, avec tout de même 3 groupes (sur 6) clairement orientés Glam ou Surf. N'étant pas particulièrement amateur, je ne m'épancherai pas davantage sur ces groupes au-delà de ces quelques remarques : je n'ai jamais vraiment accroché à Giuda, le côté très lisse et aseptisé de leurs derniers albums m'ayant particulièrement agacé, et le délire des Zelators autour d'une sorte de Glam 80s revival m'indiffère au plus haut point. Un peu comme Capsula l'année dernière en réalité.

Mais il y avait beaucoup de belles choses à côté de ça, à commencer par le ciné club ambulant des Projectivers qui a lancé les hostilités samedi. Une petite heure de projections rétro en tous genres et en Super 8 : de bien obscurs dessins-animés, des muets vieux de cent ans, et toute une série de clips musicaux des années 50 et 60 vraiment délirants, anglais et français, mettant en scène des pin-ups d'ici et d'ailleurs, des personnalités plus ou moins connues, mais aussi des coiffures improbables, des maillots de bain à froufrous, des costumes en cuir étonnants, et surtout, surtout, des déhanchés twist de l'espace. De vieux enregistrements de Vince Taylor, par exemple : Peppermint Twist. Ou encore cette petite fête au bord d'une piscine, dans le clip de Stacy Adams and the Rockabily Boys : Pussycat A Go Go. Et la perle de Sylvie Vartan, dans une reprise à la française du morceau What'd I Say de Ray Charles : Est-ce que tu le sais (avec en guest star, danseur en arrière-plan, le sosie de Johnny Hallyday jeune). Et puis aussi Françoise Hardy avec Tous les garçons et les filles, Antoine et ses élucubrations, etc. Sacrée plongée dans l'époque du Scopitone...

Ce sont les parisiens de Chrome Reverse qui ont ouvert le bal (pour sa partie musicale), avec une ambiance rock'n'roll 60s très soignée et agrémentée ici ou là de passages surf plutôt bienvenus. Pour se faire une idée : They wanna fight. La guitariste-chanteuse Lili Zeller, avec ses faux airs de Poison Ivy (Kristy Marlana Wallace, guitariste des Cramps) et son chant éraillé, a assuré une bonne partie du show aux côtés d'un guitariste dont les grimaces hallucinantes (et volontaires) me hantent encore. Les petits problèmes de son (une enceinte défaillante) n'ont clairement pas entaché le spectacle. Les douze coups de minuit ont sonné l'arrivée de la (ma ?) tête d'affiche : le trio suisse des Jackets et leur garage énergique. Jackie Brutsche était en forme ce soir, elle sait très bien jouer de son personnage, avec ses lunettes de soleil cachant le temps de quelques morceaux son maquillage si caractéristique. Plus je les écoute et plus je suis convaincu de leur potentiel en live : c'est le genre de groupe parfait pour ce festival. Leur tube : Wasting my time.

La deuxième soirée a commencé par les sonorités gothico-psychédéliques d'un duo de frérots grenoblois, Moonrite. Une batterie et un orgue (avec un des deux claviers pour la basse, dans le style Manzareck, première comparaison venant à l'esprit) : c'est tout. La pochette de leur album (à mon sens très inégal) ne m'avait pas particulièrement inspiré, pas plus que leurs univers gothique à base de vêtements noirs et de gros médaillons, mais force est de constater que sur certains morceaux, ils parviennent à créer une atmosphère très originale, issue de plusieurs courants, au groove entraînant. Les passages que l'on pourrait qualifier de "dark pop" me plaisent par contre beaucoup moins. Deux morceaux caractéristiques de leur style : Time is fast running out et Let's start a fire. Et enfin, si l'on devait remettre la palme du groupe le plus enflammé et le plus enflammant, ce serait sans hésiter les Fuzillis qui la recevraient avec leur Surf Rock festif mitonné quelque part au Royaume-Uni. Leur show a beau sembler parfaitement millimétré, sans grande inventivité ou nouveauté d'un lieu à l'autre, d'un pays à l'autre, ils savent y faire. Entraînés par Monsieur Fuzilli (Frankie Sr de son prénom), leur répertoire compte beaucoup de morceaux instrumentaux (le chant n'est pas leur spécialité) de ce style : Fish Gumbo. À traverser la foule dans tous les sens et à la faire monter sur scène, quitte à ce qu'il y ait presque plus de monde dessus que devant (j'exagère un peu), l'implication du public est maximum.

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Tout ça pour dire que c'était sympa dans l'ensemble, cette année encore, le festival de Montesquiou. Les contacts sont faciles et naturels, l'ambiance est toujours la même, chaleureuse, conviviale, en comité restreint, comme une grande famille réunie au cœur d'un tout petit village perdu au milieu de la campagne gersoise. À l'année prochaine, en espérant que la proportion de Garage âpre et rugueux soit un peu plus importante !