vendredi 01 décembre 2023

Les Veilleurs, de Connie Willis (2015)

Ce best-of constitué par Connie Willis elle-même rassemble des nouvelles relativement longues auréolées de nombreux prix - Locus, Nebula, Hugo et j'en passe - dont les fins portent souvent leur lot de révélation ou une forme de dénouement. Chaque fin est agrémentée de courtes notes de l'auteure dans lesquelles elle revient sur un contexte d'écriture et des réflexions formant toujours d'intéressantes mises en perspectives des nouvelles choisies.

Les veilleurs du feu fait référence aux défenseurs de la cathédrale Saint-Paul à Londres sous le Blitz. Le narrateur est un voyageur du temps qui fait ses classes. C'est une nouvelle qui cristallise les deux lubies de l'auteure, le Blitz et la science-fiction. C'est un chef-d’œuvre à part entière au milieu d'autres nouvelles qui témoignent d’une grande maîtrise de la forme courte. Cela peut sembler amusant et paradoxal pour une auteure qui n'écrit pas des romans ciselés hormis peut-être Remake (1994) :

Parfois les éléments SF sont secondaires privilégiant un background historique prisé par l'auteure comme à nouveau dans les Vents de Marble Arch. D'autres fois son accointance avec le genre SF est évidente : les extraterrestres avec la nouvelle satirique Tous assis par terre que je place dans mon palmarès des récits de premier contact au côté de la nouvelle Déchiffrer la trame de Jean Claude Dunyach, de la novela L'Histoire de ta vie de Ted Chiang ou encore du court roman Points chauds de Laurent Genefort, tous les quatre dans des registres différents ; les inoxydables récits de fin du monde avec Une lettre des Cleary qui concentre l'espoir d'un enfant ou avec Le Dernier des Winnebagos qui vaut des ennuis à un photo-journaliste lors de son reportage en pleine épizootie*.

De l’intrusion dans le fantastique dans ce recueil, la nouvelle Morts sur le Nil est une exception où la mort est abordée sous une forme allégorique et dans une atmosphère empruntée à Agatha Christie. Même en prenant les histoires sous des angles humoristiques, Connie Willis ne ronge jamais les ressorts de ses intrigues. Elle aborde donc des sujets détonants avec un suspens entretenu. Je pense à ce vaudeville SF à Hollywood dans lequel une réceptionniste de l'hôtel Rialto crée un climat d'incertitude et d'indétermination dans un congrès annuel de scientifiques en physique quantique, ou encore à une leçon de zététique** dans la nouvelle Infiltration avec son formidable binôme de journalistes qui traquent les charlatans et se trouve dans une situation ubuesque où les shows d'une "canalisatrice" montante créent la confusion lorsqu’elle se met à proférer des insultes à son public et à lâcher des invectives toutes droites pompées à un célèbre sceptique défunt, ou enfin à une dystopie sur le thème des menstruations (!) dans Même sa majesté.

Connie Willis a plusieurs cordes à son arc d’écrivaine, elle s’amuse autant qu’elle bûche ses sujets hétéroclites, difficile alors de décrocher de ses histoires car elle y fait preuve de sérendipité***, c'est-à-dire l'art de découvrir ou d'inventer en prêtant attention à ce qui surprend et en imaginant une interprétation pertinente.  Elle touche donc les lecteurs de science-fiction qui seront davantage portés sur la prose et l’humain que sur un décorum futuriste avec des vaisseaux, des robots, des technos et d’autres trucs à gogos (même si ce n'est pas toujours antinomique).



* ** *** celui ou celle qui trouve lequel de ces trois mots est tiré d'une nouvelle du recueil, gagne un dictionnaire et mon exemplaire du recueil pour Noël

jeudi 30 novembre 2023

The Killer, de David Fincher (2023)

killer.jpg, nov. 2023

"Fate is a placebo. The only life path, the one behind you." Un Fincher majeur, ce n'est pas pour demain, il faudra s'y faire. Mais des films comme Gone Girl (2014) laissent malgré tout un peu d'espoir, on guette le coup d'éclat, encore. The Killer ne donne pas l'impression d'avoir des  […]

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mercredi 29 novembre 2023

Lenny, de Bob Fosse (1974)

lenny.jpg, nov. 2023

"Good thing we nailed him." Impossible de ne pas penser à l'autre célèbre film américain racontant les pérégrinations d'un comique subversif largement incompris en son temps qui acquit une notoriété conséquente à la fin de sa vie : Man on the Moon, de Miloš Forman, consacrée à la vie  […]

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mardi 28 novembre 2023

Le Serment rompu (破戒, Hakai), de Kon Ichikawa (1962)

serment_rompu_A.jpg, nov. 2023

Dilemme des burakumin C'est probablement le film de Kon Ichikawa dans lequel les vannes du mélodrame sont le plus grandement ouvertes, loin devant l'histoire d'un acteur de kabuki dans La Vengeance d'un acteur ou celle de la tyrannie d'une famille à travers les décennies développée dans Le Fils de  […]

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lundi 27 novembre 2023

Les Poupées du diable (The Devil-Doll), de Tod Browning (1936)

poupees_du_diable.jpg, nov. 2023

"If most men were reduced to the dimensions of their mentality, Marcel's plan wouldn't be necessary." C'est vraiment de l'ordre de la réaction chimique me concernant : il y a dans les films de Tod Browning un mélange d'ingrédients, de thématiques et d'atmosphères qui produit un précipité  […]

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dimanche 26 novembre 2023

Aboogi, de Imarhan (2022)

aboogi.jpg, oct. 2023

Le dernier album du groupe algérien Imarhan, découvert au hasard des pérégrinations dans les lives de KEXP (c'est par ici), m'a donné l'occasion de réécouter et réévaluer tous leurs albums. On avait déjà eu l'occasion d'évoquer ici le premier album qui porte leur nom ici. Il se dégage quelque chose  […]

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samedi 25 novembre 2023

Fingernails, de Christos Nikou (2023)

fingernails.jpg, nov. 2023

"Sometimes being in love is lonelier than being alone." La science-fiction d'anticipation et la romance font régulièrement bon ménage, et leur association forme dans mon imaginaire une petite constellation agréable avec parmi les réussites des films comme Eternal Sunshine of the Spotless  […]

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vendredi 24 novembre 2023

Manœuvre, de Frederick Wiseman (1979)

manoeuvre.jpg, nov. 2023

Travaux pratiques C'est la troisième incursion documentaire de Frederick Wiseman dans le corps militaire : il y a eu la formation à la guerre et l'inculcation d'une supériorité morale et physique dans Basic Training, il y a eu des GIs se faisant chier comme des rats morts dans une zone  […]

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