Je m'attarde - Mot-clé - Famine le temps d'un souffle<br />2024-03-29T08:45:23+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclearLe Nôtre parmi les autres, de Nikita Mikhalkov (1974)urn:md5:834209c548902e0ed3b01e388e0187062022-09-26T10:31:00+02:002022-09-26T09:33:53+02:00RenaudCinémaFamineGuerreNikita MikhalkovOrRussieRévolutionTrahisonVolWestern <div id="centrage">
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/notre_parmi_les_autres/.notre_parmi_les_autres_A_m.jpg" alt="notre_parmi_les_autres_A.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/notre_parmi_les_autres/.notre_parmi_les_autres_B_m.jpg" alt="notre_parmi_les_autres_B.jpg, août 2022" />
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<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Western de l'est et chaos de la guerre civile russe</strong></ins></span>
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<p>Pour son premier film, <strong>Nikita Mikhalkov </strong>(le réalisateur de <ins>Soleil trompeur</ins>, <ins>Urga</ins> et <ins>Quelques jours de la vie d'Oblomov</ins>) décoche une flèche aussi tonitruante qu'étrange dans la toile du cinéma soviétique en réalisant un western de l'est doté d'un sens baroque aigu. Il exige un certain temps d'adaptation pour s'immerger, et a posteriori un autre temps pour bien assimiler tout ce qui s'est passé durant les cent minutes écoulées. <ins>Le Nôtre parmi les autres</ins> est un de ces films russes abordant la Révolution d'Octobre à travers le spectre du prolongement en guerre civile au début des années 20, et en l'occurrence au lendemain de la victoire des bolchéviques. C'est en ce sens une œuvre que l'on peut instinctivement rapprocher du magnifique <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Rouges-et-Blancs-de-Miklos-Jancso-1967"><ins>Rouges et Blancs</ins></a> de <strong>Miklós Jancsó </strong>qui abordait la guerre sous un angle hongrois.</p>
<p><strong>Mikhalkov </strong>produit un récit extrêmement bigarré, versatile, et parfois confus dans la fracturation de sa linéarité. Les ruptures sont nombreuses, beaucoup d'émotions s'entrechoquent, beaucoup de registres cohabitent. Il y a du western spaghetti là-dedans, activé par une bonne grosse dose de nostalgie soviétique, très typique, dès l'introduction qui présente en sépia ou noir & blanc l'amitié de quelques personnages, dans une séquence très kitsch, présente uniquement pour illustrer par la suite à quel point elle volera aux éclats.</p>
<p>L'histoire est celle de cinq camarades soviétiques, des anciens de l'armée rouge, en charge de la protection d'un butin d'or destiné à acheter des céréales pour nourrir un pays en famine. L'or est acheminé jusqu'à Moscou en train, mais une série d'attaques et de vol de voleurs aura tôt fait de l'en empêcher. Au milieu des chevaux, des bandits, des pistolets, des attaques de train et de trésor, il y a donc une trame liée à la trahison, à la convoitise et à l'infiltration vraiment très surprenante. C'est un film qui prend le soin de ne pas brosser le manichéisme soviétique dans le sens du poil, il n'y a pas vraiment le camp des méchants monarchistes opposés aux gentils communistes : c'est avant tout une histoire d'amitié perdue, brisée par l'idéologie. On note la présence d'<strong>Alexandre Kaïdanovski </strong>(le Stalker), et une mise en scène globalement chaotique qui rend la progression pas toujours très intelligible. Mais une bizarrerie qui vaut le coup d'œil, assurément.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/notre_parmi_les_autres/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, août 2022" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/notre_parmi_les_autres/.img2_m.jpg" alt="img2.jpg, août 2022" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/notre_parmi_les_autres/.img4_m.jpg" alt="img4.jpg, août 2022" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Notre-parmi-les-autres-de-Nikita-Mikhalkov-1974#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1070Les Naufrageurs, de Charles Brabant (1959)urn:md5:43991bf62280e8e3dd27c1e0ba045aa22021-03-30T10:36:00+02:002021-03-30T10:36:00+02:00RenaudCinémaBateauBretagneCharles VanelDany CarrelFamineHenri VidalIleNaufragePlage <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/naufrageurs/.naufrageurs_m.png" alt="naufrageurs.png, fév. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>L'Île nue<br /></strong></ins></span></div>
<p>Du cinéma très pragmatique des années 50 françaises, un travail d'artisan plus que d'artiste pour au service d'un microcosme un peu particulier. Un peu comme <strong>Raymond Rouleau </strong>recréait deux ans plus tôt le village de Salem au XVIIe siècle dans <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Sorcieres-de-Salem-de-Raymond-Rouleau-1957"><ins>Les Sorcières de Salem</ins></a> (1957), <strong>Charles Brabant </strong>place son récit sûr une île désolée du Finistère, au milieu du XIXe siècle, en pleine famine. L'heure n'est plus à l'ethnofiction côtière ou à la poésie îlienne chères à <strong>Flaherty </strong>et <strong>Epstein </strong>dans les années 20 et 30 : dans <ins>Les Naufrageurs</ins>, il est bien question d'une île, Blaz-Mor, mais le tournage aura lieu sur la terre ferme et sur la côte du continent. Et ce sont des acteurs tout ce qu'il y a de professionnel pour donner chair à cette histoire, qui semble héritée du Moyen Âge, avec une sauvageonne, un chef de village, une famine, des pillages, et des couteaux longs comme le bras.</p>
<p>Tout partira d'un fanal brisé par une personne du village, fanal qui tenait lieu de phare pour les embarcations évoluant dans les eaux dangereuses du coin. Il en découlera un naufrage largement prémédité, et une aubaine pour tout le village qui pourra apaiser sa faim et sa soif avec les victuailles qui emplissaient les cales du navire. Mais il y a eu également un massacre de survivants, et lorsque le commissaire et le curé débarquent sur l'île, on sent bien que la tension sourde qui s'installe est là pour durer.</p>
<p>On le comprend assez vite, on n'est pas vraiment dans le registre comique de l'île écossaise en folie du type <ins>Whisky à gogo</ins>, dans lequel les habitants tombent sur un navire échoué (mais pas par leur soin, pour leur défense) et dont les cales regorgeaient du précieux liquide. Ici, tout le monde conserve un sérieux un peu trop rigide, de <strong>Henri Vidal </strong>le courageux à <strong>Charles Vanel </strong>le vieux chef en passant par <strong>Dany Carrel </strong>la belle villageoise qui s'éprendra d'un beau marin allemand (particulièrement à l'aise en français, m'enfin bon). Pas mal d'archétypes, à commencer par la figure de paria qui vit recluse loin de tous, mais qui se trouvent à mes yeux bien contrebalancés par la photogénie et l'atmosphère des lieux.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/naufrageurs/.bateau_m.png" alt="bateau.png, fév. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/naufrageurs/.cote_m.png" alt="cote.png, fév. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/naufrageurs/.danny_m.png" alt="danny.png, fév. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/naufrageurs/.procession_m.png" alt="procession.png, fév. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Naufrageurs-de-Charles-Brabant-1959#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/923L'Ennemi silencieux, de H. P. Carver (1930)urn:md5:b89a3fd067cb8b461c63702d80a2e5392017-10-25T16:11:00+02:002017-10-27T21:30:10+02:00RenaudCinémaAmérindiensCinéma muetEtats-UnisFamineReconstitution <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ennemi_silencieux/.ennemi_silencieux_m.jpg" alt="ennemi_silencieux.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="ennemi_silencieux.jpg, oct. 2017" /><div id="centrage">
<p><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Idéal indien au seuil du réalisme<br /></strong></ins></span></p>
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<p>On imagine sans peine l'effet que pu produire <ins>The Silent Enemy</ins> lorsque le public de 1930 découvrit ce récit des Indiens Ojibwa, natifs d'Amérique du Nord, dans les frontières actuelles du Québec et de l'Ontario. Même si de nombreuses précautions sont prises pour souligner le fait qu'il s'agit d'une reconstitution, il est difficile de ne pas voir derrière cette démarche fictionnelle une volonté documentaire tant le film insiste sur de nombreux détails de (ce qui est présenté comme) la vie de cette tribu indienne, entre l'organisation sociale du groupe, les antagonismes enflammés par la menace de la famine, et les interactions avec la faune locale très diversifiée.</p>
<p>Le préambule va d'ailleurs exactement dans ce sens, avec ce qui s'apparente à un argument d'autorité : un chef Indien s'adresse directement à nous, en attestant l'authenticité du contenu à suivre et en précisant que les acteurs du film ne sont pas des acteurs professionnels mais de véritables Indiens, issus de différentes tribus (pas seulement Ojibwa, donc). En dépit de cette enveloppe à portée documentaire, on ne peut s'empêcher de voir en <ins>The Silent Enemy</ins> une des premières pierres de l'édifice qui constituera la figure de l'Indien à travers les yeux des occidentaux. À ce sujet, la première pierre doit sans douter se situer non loin d'un film sorti 10 ans avant, <ins>The Daughter of Dawn</ins> (réalisé par <strong>Norbert A. Myles </strong>en 1920), et même si ce dernier film souffrait d'un certain idéalisme, entre vision romancée de l'indigène et enjeux artificiels, ces deux incursions en territoire indien partagent la même volonté d'authenticité en incluant les principaux intéressés dans le processus de création cinématographique. Et du côté de la réalisation, la volonté de sauvegarder une partie de l'Histoire amérindienne, en l'imprimant sur pellicule avant qu'il ne soit trop tard, ne fait aucun doute.</p>
<p>Au-delà de la fiction, évidente, la reconstitution de ce qui aurait pu être la vie des Ojibwa avant l'arrivée des colons blancs touche son but. L'immersion dans le quotidien de la tribu, entre les préoccupations liées à la nourriture et la dimension spirituelle de leur société, est relativement efficace. La menace de l'hiver et de la raréfaction du gibier, la nécessité de migrer en direction du Nord à la recherche des troupeaux de caribous (à l'origine d'une querelle quelque peu archétypale entre deux grande figures de la tribu, le chasseur et le shaman) : tout le film s'articule autour de cet ennemi silencieux éponyme, la faim, au cœur de décors magnifiques nécessairement naturels. Dans ces conditions, devant l'ampleur du projet et des images capturées, on n'est guère étonné d'apprendre que le tournage dura plus d'un an.</p>
<p>C'est dans une certaine mesure un cousin lointain de <ins>Nanouk l'esquimau</ins> (1922, <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Nanouk-l-Esquimau-de-Robert-Flaherty-1922">lire le billet</a>), dans lequel <strong>Flaherty </strong>s'efforçait également de montrer la vie d'un peuple étranger à la culture européenne, en brouillant tout en explicitant la mince frontière séparant le documentaire de la fiction. L'impression de réel derrière l'artifice de la mise en scène est ici accentuée par l'omniprésence du règne animal : loups, ours, carcajous (sorte de blaireau polaire, "wolverine" en anglais), ou encore orignaux peuplent les environs. Le point culminant du récit correspond d'ailleurs au moment où réalité et fiction semblent coïncider, indépendamment de toute frontière, lorsque les Indiens se retrouvent face à un véritable troupeau de caribous. Un troupeau immense, qui sonne la fin de la famine et donne lieu à deux choses, aux frontières du réel : six jours de chasse du côté de la fiction, et un déluge d'images bien réelles qui semblent, au-delà de leur mise en scène, capter avec sincérité et réalisme la tension teintée de joie que ce moment épique représentait pour les Ojibwa.</p>
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/ennemi_silencieux/.indiens_m.jpg" alt="indiens.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="indiens.jpg, oct. 2017" />https://www.je-mattarde.com/index.php?post/L-Ennemi-silencieux-de-H-P-Carver-1930#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/453