Je m'attarde - Mot-clé - Lino Ventura le temps d'un souffle<br />2024-03-25T15:05:00+01:00Gilles P.urn:md5:53884a1dc0a56fcabb5795c6d1504dfbDotclear125, rue Montmartre, de Gilles Grangier (1959)urn:md5:9fa4424d2ebe8e3cd33d4b45fcf56d582023-01-31T13:23:00+01:002023-01-31T13:24:57+01:00RenaudCinémaArnaqueAssassinatGilles GrangierJean DesaillyLino VenturaMichel AudiardParisSuicide <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/125_rue_montmartre/.125_rue_montmartre_m.jpg" alt="125_rue_montmartre.jpg, janv. 2023" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Pour moi y a qu'une chose de sérieux dans la vie, c'est l'heure des repas."</strong></ins></span>
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<p>Avec <strong>Lino Ventura </strong>dans le rôle principal et <strong>Michel Audiard </strong>aux dialogues, il ne faut pas se poser trop de questions : si on peut facilement dénombrer pas mal de ratages chacun dans leur coin, la combinaison des deux personnalités doit presque nécessairement déboucher sur un noir des années 50 de grande qualité. Sans surprise, <ins>125, rue Montmartre</ins> est une plongée délicieuse dans le Paris de l'époque, dans l'univers des vendeurs de journaux à la criée et dans les magouilles de première catégorie.</p>
<p>Je trouve <strong>Lino Ventura </strong>toujours aussi impressionnant quand les rôles sont taillés sur mesure pour lui, il incarne une solide continuité de ce que <strong>Jean Gabin </strong>a pu produire dans les décennies qui ont précédé — sans oublier que le même <strong>Grangier </strong>le mettait dans la peau d'un clochard anar l'année avant, en 1958, dans le tout aussi réjouissant <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Archimede-le-clochard-de-Gilles-Grangier-1959"><ins>Archimède le clochard</ins></a>. <strong>Ventura</strong> dispose dans ces conditions d'un capital crédibilité tout aussi imposant (il a même participé au peaufinage du scénario), presque instantanément vraisemblable dans ces rôles de travailleurs des temps anciens, ou encore dans celui d'un taxi dans l'excellent <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-Temoin-dans-la-ville-de-Edouard-Molinaro-1959"><ins>Un témoin dans la ville</ins></a> de <strong>Molinaro </strong>(1959 également).</p>
<p>Quand bien même on se douterait qu'il y a quelque chose de louche dans cette tentative de suicide inaugurale, provoquant la rencontre d'un certain Didier avec son sauveur, avec tout le grand déballage qui s'ensuit au sujet de manigances familiales, la présence de <strong>Lino </strong>adoucit tous les angles un peu trop rugueux. Il y a derrière tout cela un soin particulier dans la description des milieux sociaux et dans la constitution des atmosphères que les critiques virulentes de <strong>Truffaut </strong>de l'époque (la fameuse "qualité française" contre laquelle s'est érigée la Nouvelle Vague) ne saurait amoindrir, avec le recul. Le film n'a aucune vocation documentaire et pourtant, le quotidien des vendeurs de journaux à la sauvette entre le siège et les coins de rues participent à un réalisme génial. La seconde partie de type "Cluedo" dès que le personnage de <strong>Jean Desailly </strong>apparaît est forcément moins intéressante dans mon référentiel, plus convenue, mais elle permet à <strong>Lino Ventura</strong>, l'innocent bourru et accusé, de faire un dernier joli tour de piste. On peut très facilement se laisser bercer par des tirades du genre "<em>Pour moi y a qu'une chose de sérieux dans la vie, c'est l'heure des repas et puis de temps en temps la bagatelle, mais à condition de pas se foutre à la flotte pour ça.</em>"</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/125_rue_montmartre/.img1_m.jpg" alt="img1.jpg, janv. 2023" />
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/125-rue-Montmartre-de-Gilles-Grangier-1959#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/1109Le Bateau d'Émile, de Denys de La Patellière (1962)urn:md5:3dbc62962b7af777119ff7f9f45ea02d2021-01-19T17:52:00+01:002021-01-19T17:56:19+01:00RenaudCinémaAnnie GirardotBateauDenys de La PatellièreGeorges SimenonHéritageLa RochelleLino VenturaMichel AudiardMichel SimonPierre BrasseurTahiti <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bateau_d_emile/.bateau_d_emile_m.jpg" alt="bateau_d_emile.jpg, janv. 2021" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>"Dans la famille, il y a une tradition de la crise cardiaque devant les emmerdements."<br /></strong></ins></span></div>
<p>Sans atteindre les sommets de la comédie dramatique française à caractère social de la fin des années 50 comme <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Rue-des-prairies-de-Denys-de-La-Patelliere-1959"><ins>Rue des prairies</ins> </a>ou <a href="https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Les-Grandes-Familles-de-Denys-de-La-Patelliere-1958"><ins>Les Grandes Familles</ins></a>, ce film estampillé "qualité française" de <strong>Denys de la Patellière </strong>a le mérite de faire coïncider énormément de bonnes dispositions : des dialogues en béton armé (<strong>Michel Audiard</strong>), un scénario adapté doté d'un solide potentiel caustique sur la bourgeoisie d'après-guerre (<strong>Georges Simenon</strong>), et un cortège de comédiens qui s'en donnent à cœur joie chacun dans son registre (<strong>Lino Ventura</strong>, <strong>Michel Simon</strong>, <strong>Annie Girardot</strong>, et <strong>Pierre Brasseur</strong> notamment). Avec autant d'ingrédients de qualité, très certainement, on était en droit d'attendre beaucoup plus de cette histoire d'héritage menaçant la tranquillité des affaires d'une famille aristocratique d'armateurs de La Rochelle.</p>
<p>Sans doute qu'il manque un <strong>Gabin</strong>, pour le dire un peu crument, tant <strong>Ventura </strong>ne paraît pas toujours très à l'aise dans les nombreuses envolées que lui impose l'écriture de son personnage : beaucoup de colères, pas mal d'ivresse, et des oscillations entre gaieté simple et tristesse profonde. Des commentaires qui ne témoignent pas d'un féminisme avant-gardiste, aussi, il faut le reconnaître. Ces changements de registre très fréquents, qui confèrent d'ailleurs au récit un rythme parfois farfelu, ne fonctionnent pas de manière très naturelle, comme si les rouages manquaient un peu d'huile : ça coince de temps en temps. On peut aussi regretter la sous-exploitation patente du personnage (et de l'acteur a fortiori) interprété par <strong>Michel Simon</strong>, par lequel arrive le désastre au sein de cette famille propre sur elle : un débauché extrêmement riche, qui profitait de ses vieux jours à Tahiti, décide de rentrer en France pour se venger de sa famille et foutre le boxon en léguant sa fortune à son fils né d'une vieille liaison passagère — dont il ne connaît rien — et non à ceux qui attendaient l'héritage comme un dû. "La famille a une mine splendide. L'air toujours aussi connard, mais le teint frais ! La vertu, ça conserve", "Dans la famille, il y a une tradition de la crise cardiaque devant les emmerdements" et autres "Elle ressemble à sa mère... Elle sourit... Elle prend ça pour un compliment." Le frère du vieux trublion, président de la compagnie d'armateurs, est bien sûr fou de rage à l'idée que ce capital lui file entre les doigts pour atterrir dans ceux d'un misérable ouvrier qu'il a toujours considéré, non sans dédain, comme un vulgaire étranger issu de la populace.</p>
<p>Cette manigance pour priver sa famille de l'héritage tant attendu sera la source de nombreuses entourloupes et de grandes compromissions, les uns courbant l'échine autant que possible et les autres rivalisant d'ingéniosité (mais pas assez) pour tenter de rouler l'oncle sénile dans la farine — quitte à donner la main de sa fille, à promouvoir un neveu sur le tard, et tout un tas d'abjections diverses et variées. Le duo <strong>Ventura </strong>/ <strong>Girardot </strong>tourne à plein régime pour donner corps à ces prolos en engueulades constantes suivies de réconciliations, recevant un immense cadeau tombé du ciel. De leur côté, <strong> Simon </strong>et <strong>Brasseur</strong>, vieux croûton rempli de poison et grand méchant aristo, forment des caricatures savoureuses qui participent à l'atmosphère légèrement comique et très attrayante du film.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bateau_d_emile/.simon_m.png" alt="simon.png, janv. 2021" />
<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bateau_d_emile/.ventura_m.png" alt="ventura.png, janv. 2021" />
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/bateau_d_emile/.ventura_girardot_m.png" alt="ventura_girardot.png, janv. 2021" />
</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Le-Bateau-d-Emile-de-Denys-de-La-Patelliere-1962#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/891Un Témoin dans la ville, de Édouard Molinaro (1959)urn:md5:39e9f4c2e58e74067ca0a0aa818a1bc12020-05-07T09:58:00+02:002020-05-07T10:57:19+02:00RenaudCinémaFilm noirLino VenturaNuitParisTaxiVengeanceÉdouard Molinaro <img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/temoin_dans_la_ville/.temoin_dans_la_ville_m.jpg" alt="temoin_dans_la_ville.jpg, mai 2020" style="margin: 0 auto; display: block;" />
<div id="centrage"><span style="font-size: 18pt;"><ins><strong>Un taxi pour l'échafaud</strong></ins></span>
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<p>Un polar français des années 50, sec et brutal, avec <strong>Lino Ventura </strong>à ses débuts (ou presque, en tous cas, ses traits étant sensiblement moins affirmés que ceux du Lino qu'on connait bien, typé lutteur), plongé dans la nuit parisienne au creux d'un film noir, et réalisé par... <strong>Édouard Molinaro</strong>. Il faudra donc ajouter aux images de <strong>Louis de Funès </strong>cabotin et d'autres comédies des années 80 faisant intervenir <strong>Gérard Jugnot</strong>, celles beaucoup moins connues d'un <strong>Lino Ventura </strong>massif et déterminé, envers et contre tout, à accomplir sa vengeance. La dissonance cognitive n'est pas loin, avec ces différentes branches d'une même filmographie. <strong> Molinaro</strong>, ce petit cachotier. </p>
<p>Atmosphère jazzy évoquant très légèrement la Nouvelle Vague (le saxophoniste français <strong>Barney Wilen</strong>, auteur de la musique du film, avait d'ailleurs travaillé avec <strong>Miles Davis </strong>l'année précédente sur celle de <ins>Ascenseur pour l'échafaud</ins>), pessimisme absolue de l'action dans la droite lignée du film noir, sécheresse de la narration chevillée au corps : <ins>Un témoin dans la ville</ins> détonne incroyablement dans le paysage du polar français. Il serait éventuellement à ranger dans la case des exercices de style, tant le film se résume à une ronde nocturne après avoir commencé sans ambage par un assassinat à bord d'un train (qui pourrait tout aussi bien constituer une scène de fin dans beaucoup d'autres films). <strong>Molinaro</strong>, une fois passée l'exposition de la problématique au gré d'une préparation de vengeance au cordeau, collera aux basques de <strong>Ventura </strong>jusqu'à la fin dans un dédale aux quatre coins de Paris, comme une plongée semi-documentaire et quasiment en temps réel renvoyant son souci de réalisme de manière assez évidente. <strong>Ventura</strong>, parfaitement à l'aise dans le registre de l'homme traqué toujours hésitant avant de passer à l'acte, évolue dans la faune d'un autre temps, peuplée d'opératrice téléphoniques, de chauffeurs de taxi à l'ancienne qui se regroupent régulièrement pour une clope et un café, d'officier de police aux vieux uniformes, et de prostituées au fort accent. Aussi sec que fluide, le minimalisme de mise à tous les niveaux irrigue très bien la quête de vengeance qui vire à l'obsession meurtrière sans jamais faire du protagoniste un tueur archétypal. On se situe bien au-delà du mari trompé et du tueur obstiné, <strong>Ventura </strong>composant un personnage pétri d'incertitude et de maladresse.</p>
<p>C'est d'ailleurs une particularité du film : les personnages ne sont pas vraiment approfondis dans leur psychologie ou leurs états d'âme et ne laissent presque rien percer à travers leur carapace. Le protagoniste est simplement prisonnier d'un engrenage, dénué de tout contexte, et n'est défini ici que par son mouvement, poursuite frénétique d'abord puis fuite désespérée ensuite. La question morale à l'encontre de ses actes ne se posera jamais réellement, comme si on était happé par le flot de sa cavale sans avoir le temps de s'y appesantir. Il ressort de ces décors imprégnés d'onirisme une violence froide, enveloppant la solitude de cet homme seul face au monde, convergeant presque inexorablement vers cette séquence finale d'une noirceur infinie.</p>
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<img src="https://www.je-mattarde.com/public/RENAUD/CINEMA/temoin_dans_la_ville/.taxi_m.png" alt="taxi.png, mai 2020" />
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</div>https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Un-Temoin-dans-la-ville-de-Edouard-Molinaro-1959#comment-formhttps://www.je-mattarde.com/index.php?feed/atom/comments/770