Knock est un film d'acteurs et de dialogues avant tout, il me semble, et dont le côté théâtral très appuyé ne trouvera de source de soulagement (ou d'aggravation, pour peu que l'on ne supporte pas la prestation) que dans l'interprétation de Louis Jouvet. L'acteur y est vraiment over the top, il en fait des caisses et des caisses en cabotinant à plein régime dans ce rôle qui lui va si bien, un charlatan prenant la succession d'un médecin de village et changeant radicalement l'équilibre local et les habitudes de chacun. À grands coups de "toute personne en bonne santé est un malade qui s'ignore", son objectif est de mettre tout le canton au lit, avec l'impression d'être malade, et de se servir de la médecine comme du bras armé de son enrichissement personnel.
Le jusqu'au-boutisme du personnage de Jouvet est assez rare dans son extrémisme : une fois rentré dans son nouveau rôle de notable sachant se faire respecter par la terreur, il n'en ressortira plus et règnera en seigneur tout puissant. Ralliant les uns à sa cause pour en faire des serviteurs et faisant peser une angoisse sourde de maladie sur les autres, le personnage représente l'incarnation absolue du commerçant manipulateur, capable de mettre au point des formules lucratives que personne ne voit venir — le coup de maître des consultations gratuites, attirant toutes les ouailles des environs tout en lui assurant prise d'informations directe et prescriptions diverses rémunératrices dans un futur proche.
La structure de Knock est simplissime et son cœur repose sur une série de quelques consultations-clés mises en scène dans un style assez inimitable. On voit défiler les patients, initialement confiants et tout à fait bien portants, et après un passage sous le rouleau-compresseur Louis Jouvet le tortionnaire médical, ressortent complètement lessivés, convaincus d'être les porteurs des pires pathogènes. La formule est éculée mais le schéma fonctionne pas mal, et d'autant plus qu'il n'est pas sans écho avec des réflexions plus contemporaines sur la pratique de la médecine conventionnelle ou du cortège de médecines parallèles. On voit passer quelques seconds rôles appréciables, Jean Carmet en grand guignol transformé en suiveur docile, Louis de Funès dans une micro-apparition vaguement chevelue de moins de 10 secondes (dont 5 en silence et de dos), ou encore la tronche inoubliable de Yves Deniaud dans le rôle du tambour de la ville. Pas le film du siècle étant donné son rythme laborieux et son austérité de mise en scène, Knock se satisfait en outre d'un unique argument très simple décliné à toutes les sauces du début à la fin, mais la perfidie chevillée au corps du médecin éponyme exploitant la crédulité des gens jusqu'à la moelle conserve une bonne part d'humour noir et de mépris assumé encore assez surprenants.
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