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L'ombre d'un pilote

On reconnaît assez vite la sobriété de mise en scène et la pudeur du mélodrame qui caractérise si bien le cinéma du réalisateur britannique Anthony Asquith, qui plus est lorsqu'elle s'incarne à travers un personnage interprété par Michael Redgrave — son rôle d'enseignant dans L'Ombre d'un homme (1951, aka The Browning Version) est inoubliable, et celle du tuteur dans La Solitude du coureur de fond (1962) était également marquante. Le cadre est posé par le quotidien d'une base militaire au Royaume-Uni, en 1942, avec une escadrille anglaise reléguée à l'arrière et essentiellement clouée au sol, à de rares exceptions près.

Asquith semble embrasser une sorte d'effort de guerre en produisant ce film à la gloire de l'armée de l'air britannique, à l'époque où la Seconde Guerre mondiale touchait à sa fin. On peut d'ailleurs se demander si la séquence introductive, qui montre la base vide a posteriori avant de lancer le long flashback qui constitue le cœur du récit, n'a pas été apposée là précisément pour ne pas trop détonner avec le contexte d'armistice lors de la sortie du film, et ne pas faire du temps de guerre quelque chose de déjà anachronique. Plus qu'un film de guerre, The Way to the Stars (renommé "Johnny in the Clouds" aux États-Unis) se révèle davantage dans le mélodrame en s'intéressant aux destins de quelques pilotes et des relations amoureuses dans lesquelles ils sont impliqués.

Sur ce thème précis de la romance croisée avec l'aviation, Seuls les anges ont des ailes (1939) de Howard Hawks me paraît beaucoup plus efficace, même si on navigue en plein référentiel british ici. Le contraste avec les aviateurs américains, arrivés sur le tard dans la base de la RAF, est d'ailleurs un grand ressort comique de la fin du film. À travers le destin tragique d'un personnage et les atermoiements de son ami survivant, la thématique de l'après-guerre se fait dominante : le deuil s'immisce brutalement dans les vies, et la bravoure des soldats est mise en exergue.

couloir.jpg, oct. 2020