deux_visages_du_docteur_jekyll.jpg, janv. 2024
"I'm new to your wicked city. — It's only wicked if you're poor, sir."

Relecture intéressante par la Hammer de l'histoire du Docteur Jekyll / Mister Hyde, qui est opérée par Terence Fisher à l'époque de la pellicule couleur qui bave, tout début des années 1960 britanniques. Ce n'est évidemment pas la première fois qu'on est confronté à ce récit (la cinquième en ce qui me concerne, je dirais) qui explore la dualité de l'être humain, au gré d'une fiction évoluant sur les terrains de l'horreur et de la SF. Mais cette énième adaptation parvient à tirer son épingle du jeu en adoptant un contraste différent entre les deux personnages prisonniers du même corps, et en faisant du monstre Hyde un jeune homme séduisant à l'inverse du scientifique Jekyll, vieux et pas vraiment Don Juan.

Les premiers pas sont quant à eux parfaitement classiques : Jekyll nous parle de ses expériences au travers d'une scène d'exposition un peu plate, provoquée par des dialogues mous et convenus avec un personnage secondaire lambda. Il expérimente sur des animaux une nouvelle drogue capable de changer la personnalité, et on sait bien que c'est l'humain (lui-même en l'occurrence) qui sera le prochain cobaye. Reconnaissons à Paul Massie un plaisir palpable dans le changement de personnalité, avec un passage de Henry vers Edward très remarqué — il en fait des tonnes du côté du corps transformé, avec changement de voix et regard complètement halluciné avec ses yeux grands ouverts. Les personnages féminins sont principalement des faire-valoir, c'est regrettable, et souffrent d'une très faible écriture malheureusement, laissant le champ libre à l'opposition entre le protagoniste et lui-même mais aussi le personnage de Christopher Lee, amant de sa femme.

Le personnage du psychopathe alterne entre phases intrigantes ou engageantes, tant qu'on découvre ce dont il est capable avec cette nouvelle personnalité de grand séducteur, ce qu'il cherche à accomplir ou les malheurs qui s'abattent sur Jekyll une fois qu'il recouvre ses esprits. Fisher est un peu poussif quand il s'agit d'illustrer son impuissance à expliquer sa condition aux autres ou encore l'énième séquence de lutte entre les deux personnalités longtemps dominées par la part ignoble et malfaisante. En plus du retournement moral de cette adaptation, on pourra aussi se souvenir des passages vaguement érotiques, avec des danses de type French cancan ou d'autres plus surprenantes (faisant intervenir un serpent par exemple).

img1.png, janv. 2024 img2.png, janv. 2024 img3.png, janv. 2024